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… et la gifle !

Publié le 05 février 2008 par Philippe Thomas

L’autre événement symptomatique de la semaine dernière s’est déroulé dans une classe de sixième d’un collège ordinaire. Un élève traite un prof de « connard », en plein cours. Il reçoit une gifle en retour. Voilà les faits. Ensuite, l’enseignant a été placé 24 h en garde à vue au commissariat, où il aurait même subi un prélèvement d’ADN, sur plainte de la famille. On apprit peu après que le gamin avait été exclu du collège pour trois jours.

Il est étonnant, pour le moins, que l’affaire n’ait pu être réglée au sein de l’établissement. Certaines fonctions de médiation ont manifestement été défaillantes (le principal, un conseiller d’éducation…). Normalement le bilan aurait dû être conseil de discipline et convocation des parents pour l’un et enquête administrative pour l’autre. Au lieu de quoi, le prof’ offensé fut victime d’une véritable déferlante policière, médiatique et judiciaire puisqu’il devra comparaître prochainement au tribunal ! Il serait actuellement « suspendu » ou en arrêt maladie.

Certes, il n’eut pas dû gifler l’élève. Se maîtriser en toute circonstance, gérer des situations de stress ou de conflit, ne pas craquer doivent être les commandements de tout enseignant. Pour avoir moi-même enseigné à des publics parfois difficiles, j’ai eu moult occasion de vérifier que l’exercice du rôle disciplinaire qu’on endosse avec la blouse de prof est au moins aussi important que la maîtrise de sa discipline. D’abord faire de la discipline avant d’enseigner une discipline ! Mais c’est facile à dire et il arrive qu’à force d’endurer les pressions diverses et les petites provocations, quelqu’un craque, d’une manière ou d’une autre.

Cette gifle-là en d’autres temps n’eut pas fait la moindre histoire. Je connais bien des familles où, si le gamin avait raconté son histoire en rentrant chez lui, il se serait vu semblablement confirmer la sanction d’une main paternelle. Pour autant, je n’ai pas l’intention de faire l’apologie de la pédagogie des baffes (tout a été dit à ce sujet dans Goscinny & Uderzo, Astérix et les Normands, dialogue Astérix-Obélix à propos de Goudurix). Mais il est préoccupant qu’on ait abondé dans le sens d’une famille capable de porter plainte, sans vouloir reconnaître la pertinence sur le fond de la sanction administrée à son rejeton coupable d’incivilité !

S’agissait-il pour les parents de se masquer leur propre turpitude, voire leur échec éducationnel, en rejetant la faute exclusivement sur le prof’ ? Leur comportement semble le résultat d’une vision consumériste de l’éducation (je paie donc je veux) où les parents prétendraient composer les programmes et les méthodes pour le cher petit, un peu comme on chargerait un caddie…

En tout cas, la médiatisation outrancière de l’affaire est désastreuse. J’ai même entendu des syndicalistes enseignants la commenter avec une prudence de sioux neurasthénique : était-ce bien une gifle raisonnée et non un coup violent, y avait-il des antécédents, un contexte particulier, etc… Ce genre de discours péteux contribue aussi à saper l’institution et l’autorité du professeur, en tant que tel garant de l’ordre et dispensateur de savoir.

Le renversement opéré est assez incroyable : l’élève fautif est devenu victime et le professeur a été humilié publiquement et quasiment transformé en délinquant ! Heureusement, il semble que la pression médiatique soit retombée comme un soufflet… Mais je ne peux m’empêcher de penser que dans cette affaire, il y a pas mal de coups de pied au c… qui se sont perdus. Il faut dire, tout de même… quel métier, professeur !

;-)


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