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Le temps qui va, le temps qui vient de Hiromi KAWAKAMI

Par Lecturissime

 

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♥ ♥ ♥

« La vie, c’est toujours quelque chose de décousu. » (p.96)

L’auteur :

Hiromi Kawakami est une écrivain japonaise. Kawakami Hiromi a su s’imposer dans le monde littéraire japonais par la tonalité très particulière de son style, à la fois simple et subtil, dont les thèmes privilégiés sont le charme de la métamorphose, l amour et la sexualité.

L’histoire :

Le vrai héros du dernier roman de Kawakami, c’est ce petit quartier commerçant de Tôkyô où elle a planté son décor : non qu’on nous le décrive en détail, mais c’est à travers la chaleureuse communauté de gens qui l’habitent qu’insensiblement il se déploie et prend corps. Ces voisins sont de tous âges et de toutes conditions : poissonnier, diseur de bonne aventure, enseignante, auxiliaire de vie, chômeuse, un cuisinier et sa patronne, un couple d’imprimeurs, employés de bureau et lycéens... Et chacun à son tour prend la parole dans un livre à la composition surprenante, à la fois très structurée et d’apparence aussi aléatoire que le hasard qui enchevêtre ces vies les unes aux autres. De chapitre en chapitre, chacun passe alternativement du statut de personnage principal à secondaire, et les fils de ces existences séparées peu à peu tissent des liens, entrent en résonance et finissent par se rejoindre et dessiner un motif qui ne deviendra lisible qu’à la fin du roman. (Présentation de l’éditeur)

Ce que j’ai aimé :

La construction en chapitres mettant en scène différents personnages permet de rendre l’aspect décousu de la vie des personnages tout en chantant l’immuabilité du monde. Les hommes passent, mais le monde reste. Tous les personnages semblent indécis face à leur vie, aux choix qu’il faut nécessairement faire et peu réussissent finalement à se décider.

Le récit de Maki qui clôt le roman est lui teinté d’une lucidité lumineuse :

« J’avais vécu, je vivais, et cela suffisait à déterminer les choses à chaque instant. Loin d’être manifeste, le choix avait lieu d’invisible façon, mais le seul fait de connaître quelqu’un, de se croiser, le seul fait d’être là, de respirer, avait des répercussions. Il était impossible de ne pas être impliqué.

Je décidais, quelqu’un décidait, les femmes décidaient, les hommes décidaient, la ronde des causes et des effets qui entraînait la terre dans son mouvement décidait, voilà pourquoi j’étais là où j’étais. » (p. 250)

« Jusqu’à ce qu’un jour les hommes disparaissent de l’univers, moi, Heizô, Genji, nous vivons. Perpétués par ceux qui vivent aujourd’hui ici, dans cette ville, dans ce quartier, au fin fond de la mémoire. Et ainsi de suite, de mémoire en mémoire. (…) Vivre était une chose passionnante. Après la mort, comme plus rien de nouveau ni d’intéressant ne se produit, c’est un peu fade. Mais je n’ai pas vécu pour rien. » (p. 277)

Nul besoin de chercher un sens, la vie est là, comme le souligne l’auteur dans ce magnifique texte écrit pour le magazine Télérama après le tsunami :

« Je ne suis qu'une chose insignifiante. Triste constatation peut-être. Mais c'est justement ce qui rend ma vie précieuse. Minus habens, certes, mais un rassemblement de cent vingt millions de fétus forme le Japon. Jetés à terre par les typhons, écrasés par les séismes, voilà mille ans, deux mille ans que nous vivons. Tant que la vie est là, on peut connaître des instants lumineux sans nombre. La beauté du crépuscule. La magie des pétales des cerisiers que le vent emporte. La valeur inestimable des proches que l'on éprouve soudain, pour un rien. Le plaisir du soleil couchant en compagnie d'amis. L'évocation des plaisirs de la journée qui s'achève dans le moment qui précède le sommeil. »

Ce que j’ai moins aimé :

-   Je n’ai pas toujours réussi à comprendre qui était qui car les personnages sont nombreux, pris sur le vif à différents moments de leur vie et le lien qui les relie est souvent subtil…

Premières phrases :

« Dans la boutique de Uoharu, sur un pan de mur non loin de l’entrée, il y a une photo accrochée avec des punaises.

On y voit deux hommes, deux Occidentaux. En complet sombre, debout, les coudes appuyés sur une table ronde qui leur arrive à hauteur de poitrine. L’un est étiré en longueur comme un fil, l’autre, petit et râblé. Ils ne se dévisagent pas, ils ne fixent pas non plus l’objectif de l’appareil, ils regardent vaguement au loin. »

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Les années douces de Hiromi KAWAKAMI

Autre :

Le temps qui va, le temps qui vient, Hiromi Kawakami, Roman traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu, Picquier, mars 2011, 277 p., 19 euros

Je vous invite à découvrir l'intégralité du texte de Télérama : Japon : les heures d'après, par Hiromi Kawakami, romancière

« La vie est l'instabilité même. Cette philosophie de l'impermanence sous-tend le comportement de ceux qui s'entraident en silence. Oui, la vie est synonyme d'impermanence, oui, l'homme est éphémère, oui, chacun est seul quand il naît, seul quand il meurt, c'est justement pour cela qu'il faut s'entraider pour être sauvé. » (Interview Télérama)

 

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 Je remercie Isabelle LACROZE des Editions Picquier pour cette belle découverte.


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