United a un pied à Wembley après avoir dominé de la tête et des épaules une équipe de Schalke qui peut remercier son futur ex-gardien de but Manuel Neuer pour avoir limité la casse.
Quel curieux sentiment que d'être (un peu) déçu après une victoire 0-2 en demi-finale aller de Ligue des Champions... Une déception qui s'explique par le nombre incroyable d'occasions franches que les Red Devils se sont procurées, surtout en première mi-temps, toutes annihilées par Manuel Neuer, qui a démontré en 45 minutes qu'il est probablement l'un des tout meilleurs gardiens de but sur le marché. Pas pour rien que United s'intéresse à lui, espérons que Fergie aura eu l'occasion de lui glisser un mot ou deux pour le dissuader de rejoindre le FC Hollywood de Munich à la faveur de United. Neuer a donc choisi la soirée d'hier pour laisser à ses supporters un souvenir de lui, pour l'un de ses derniers matches dans la très belle Veltins Arena, lui qui a grandi dans la Ruhr et fait toutes ses classes à Null Vier. A la mi-temps, le public ne s'y est pas trompé, si son équipe était encore dans la course pour une place historique en finale, c'était uniquement grâce à son portier, qui a multiplié les arrêts de classe devant les assauts répétés des hommes de Sir Alex Ferguson.
Car si ce score est flatteur pour Schalke et légèrement frustrant pour nous, supporters de United, c'est bien là le seul point négatif de cette soirée où les Reds ont assumé leur statut de favori et même plus que ça, en nous offrant une performance qui, si elle était l'oeuvre du fameux Barça, ferait se palucher toute la presse du foot pendant une semaine. La déception est donc positive, car elle est le résultat de 90 minutes de football total où les Königsblau n'ont pas eu voix au chapitre. Jamais les joueurs de Ralf Rangnick n'ont semblés en mesure de pouvoir répondre à la domination outrageuse de la bande à Rooney, et s'ils étaient rentré au vestiaire à la pause avec un 0-5, ils n'auraient rien eu à y redire.
N'ayant que faire de cette "malédiction" des clubs allemands, Fergie nous sortait l'artillerie lourde avec une formation clairement portée vers l'offensive. Exit les O'Shea et Gibson, place au jeu ! 4-4-2 archi classique pour occasions à gogo, comme à la bonne époque où United et son rouleau compresseur asphyxiait la plupart de ses adversaires. Devant Van der Sar, on trouvait donc le jeune Fabio, à la droite de la paire Ferdinand-Vidic, une nouvelle fois impériale, et de Patrice Evra à gauche. La présence de Fabio dans le couloir gauche annonçait déjà la couleur, United n'avait pas l'intention de défendre hier soir. Au milieu, Carrick et Giggs dans les rôles de Xavi-Iniesta, Valencia occupait son flanc droit et Park, était évidemment aligné en coupe d'Europe, cette fois comme ailier gauche. Rooney en neuf et demi retrouvait son nouveau partenaire d'attaque Javier Hernandez.
United vs Neuer
Le show pouvait commencer. Et malgré un public très bruyant tout acquis à la cause des locaux, le premier à allumer Neuer était Wayne Rooney, mais son tir dévié à la 3ème minute, qui prenait la direction de la lucarne, était sauvée par le portier allemand. Premier arrêt d'une longue série. Puis c'est le tir puissant de Park qui sera repoussé par Neuer (5ème minute). A la 6ème, Valencia adresse une merveille de passe pour Chicharito au second poteau mais la reprise du mexicain est trop faible pour faire mouche. Park, très actif hier soir, isolait à la 14ème minute le même Chicharito, à la limite du hors-jeu, mais à nouveau, Neuer prenait le dessus dans son duel. 21ème, Valencia trouve Hernandez, encore, le petit pois parvenait à se mettre sur son pied gauche pour envoyer un tir du mauvais côté du petit filet. Dans la minute qui suit, récupération d'Hernandez, qui laisse le ballon à Rooney, pour le retrouver tout de suite après, légèrement sur la droite du but de Schalke, cette fois, Chicha préfère tenter la passe vers Rooney au point de penalty mais celle-ci est interceptée par la défense. 26ème, Valencia trouve à nouveau l'attaquant mexicain d'une bien jolie passe, qui se retrouve dans un angle bien fermé par Neuer, son tir trop croisé finit dehors. Une petite minute plus tard, Fabio trouve Vidic au poteau gauche, le serbe adresse un petit centre piqué et Giggs surgit pour fusiller de la tête et à bout portant le mur Neuer, qui, même pris à contre-pied, dégoûtait à nouveau les joueurs de United et tous leurs supporters. La défense des Königsblau en a plein les pattes, et n'a pas fini de souffrir; à la 35ème minute, Carrick ouvre superbement à droite vers Valencia, l'équatorien sollicite Hernandez pour le une-deux, puis tente de retrouver ce dernier, mais sa passe est interceptée. Peu importe, Chicharito récupère le cuir dans les pieds du défenseur et allume Neuer qui repousse une énième fois ! Le ballon arrive vers Park dont la repise de volée est à nouveau bloquée par un défenseur, et puis c'est Giggs qui s'essaie à la volée, mais dévisse et retrouve... Park ! Surpris par la trajectoire de ce tir, le sud-coréen ne peut exploiter cette nouvelle opportunité. Quel stress ! Quel suspense ! Quel gardien ! On se dirige vers la mi-temps et on s'est déjà levé de son fauteuil au moins six fois. On le fera encore deux fois, quand Park, sur unc entre de Valencia, remisera de la tête vers fabio, dont la reprise passera juste au-dessus du but, puis quand Park passera à Rooney, qui lancera Giggs en profondeur pour lui offrir un ouveau tête-à-tête avec Neuer. Le talentueux gardien reste sur ses appuis et gagne à nouveau son face-à-face.
Fin de la première période. On se demande comment United n'est pas déjà qualifié pour la finale... Le score devrait déjà être lourd, très lourd. Le public de la Veltins Arena ovationne son héros ganté et les Red Devils rentrent au vestiaire légèrement frustrés, mais pas encore démoralisés. Il faut dire qu'ils ont livré une première période cinq étoiles où seuls manquaient les buts. La circulation du ballon, alternant jeu long et jeu court, les appels, contre appels, mouvements avec ou sans ballon... Tout était parfait et s'ils continuaient de la sorte à mettre une telle pression sur le but allemand, ils finiraient tôt ou tard par trouver la faille. A contrario, les attaquants de Schalke ne se sont essayés que trois ou quatre fois, à distance, sans conviction. On avait du mal à croire que cette équipe avait vaincu Valence et surtout, avait donné la leçon à l'Inter Milan, par deux fois. On craint malgré tout un peu un scénario catastrophe. Combien de fois une équipe ultra dominante s'est-elle faite surprendre sur la seule occasion franche de son adversaire ? Il faut absolument battre ce diable de Neuer.
La faille, enfin !
Le temps de se désaltérer, de respirer un grand coup et de changer de maillot pour Van der Sar, et le match peut reprendre, sur les même bases. Coup franc de Giggs, tête de Carrick et... Arrêt de Neuer (47ème). Puis c'est Giggs qui manquera encore la cible (48ème). A la 50ème minute, United trouve enfin le chemin des filets ! Mais le but d'Hernandez est annulé pour hors-jeu ! Damned ! Ce fait qui semble anodin sera de l'aveu de Fergie après le match, le déclic. Les Red Devils ont alors la preuve que ce gardien de but n'est pas invincible. Schalke va tenter de sortir la tête de l'eau mais la défense, à l'image de Rio Ferdinand, maîtrise son sujet et stoppe toute tentative allemande, tout en relançant proprement avec quelques sorties d'école. Et puis, la délivrance ! Rooney, aux abords du rectangle, feint un tir avant d'adresser une merveille de passe vers Giggs, qui cette fois-ci ne laisse aucune chance au dernier rempart de Schalke, en propulsant le ballon entre ses jambes, il donne un avantage plus que mérité à ses couleurs. 0-1 (67ème). Et puis 0-2, deux minutes plus tard !!! Javier Hernandez récupère (encore) le ballon avant de servir Rooney dans le sens de sa course, Wazza fusille Neuer qui n'avait aucune chance. Cette fois, ça y est !
A partir de là, MU va se contenter de gérer, Fergie procédant à deux changements; Park et Hernandez laissaient ainsi leurs places à Scholes et Anderson (73ème). Puis ce sera au tour de Nani de faire son entrée au jeu, en lieu et place de Rooney (82ème). United se retrouve donc sans attaquants pour les dix dernières minutes. Visiblement, ce score suffit à Sir Alex... Personnellement je trouve qu'un troisième but n'aurait pas été de trop, mais notre manager devait déjà avoir un oeil sur Arsenal et penser que cet avantage de deux buts serait amplement suffisant pour aborder le match retour face aux allemands avec sérénité. Nani mettra encore le feu une fois ou deux dans la défense des Königsblau, mais sans réel danger pour le grand Manuel. United a un pied en finale, une finale qui serait la troisième en quatre saisons pour cette équipe. Pas si mal pour une formation si souvent critiquée depuis des mois, et qui a donc l'occasion de répéter le fabuleux doublé de 2008. Raùl peut exaucer son voeu, il aura bien le maillot d'une autre légende du foot, Sir Ryan Giggs.
La performance collective fut donc exceptionnelle. On ne sait pas vraiment si c'est Schalke qui a été nullissime ou MU qui était trop fort. Probablement un peu des deux, mais ne minimisons pas l'ampleur de l'exploit, les Red Devils se sont montrés dominateurs du début à la fin et ont fait preuve d'une maîtrise, individuelle et collective, jamais observée cette saison, avouons-le, utilisant chaque recoin du terrain pour avancer ses pions, donnant le ballon, le redemandant directement, multipliant les solutions pour le coéquipier en possession du ballon. Les onze titulaires ont été tellement bons qu'il est difficile de sortir un joueur du lot. Ferdinand et Vidic ont été intraitables derrière et ont parfaitement assuré à la relance, Vidic se permettant même d'offrir un caviar à Giggs. Les deux backs ont pistonné à souhait et Fabio a démontré toutes ses aptitudes offensives, notamment sur un raid solitaire où seule la dernière passe lui a fait défaut. Carrick ! Quel énigme ce joueur... Capable du pire comme du meilleur, comme face à Chelsea au tour précédent ou contre Schalke. L'anglais a pris le jeu à son compte, avec un ratio passes jouées/passes complétées proche des 100%, sans compter le nombre de ballons récupérés, interceptés. A ses côtés, Ryan Giggs s'est à nouveau montré décisif, devenant au passage le plus vieux buteur de l'histoire de la Champions League, à 37 ans. Sur les flancs, Valencia a fait du Valencia; dédoublements, une-deux, centres millimétrés... Sans faire dans le cliché, son retour de blessure fut comme un nouveau transfert. C'est incroyable de jouer à ce niveau après une telle blessure, j'adore ce mec. Park, dans un autre registre, a lui aussi contribué à cette démonstration de jeu offensif, grâce à ses appels, ses récupérations, ses tirs et ses passes presque décisives. Wayne Rooney est bel et bien de retour, qu'on se le dise ! Ce match est à classer parmis ses grands classiques. Plus neuf et demi que dix, il a orchestré les vagues incessantes de son équipe vers la cage de Neuer, avec encore une poignée de transversales, toutes réussies, des ouvertures lumineuses, comme celle qui amène le but de Giggs, et un but décisif en vue de la qualif. Enfin, last but not least, Javier Chicharito Hernandez n'a peut-être pas connu hier la réussite qu'on lui connaît, mais quel travail, quelle abnégation ! Avec un autre gardien dans les perches, le mexicain aurait probablement signé un hat-trick ! Sa complémentarité avec Rooney ne cesse d'augmenter et ils se trouvent désormais les yeux fermés. Cadrant quasiment tous ses ballons, pouvant se montrer collectif si besoin, Chicharito nous a montré qu'il pouvait également assurer dans la conservation du ballon, en résistant plusieurs fois aux charges teutonnes. Le transfert de l'année ? Non, du siècle !
Inutile de vous dire qu'avant d'affronter les Gunners à l'Emirates, ce match parfait tombe à pic et nous fait saliver d'avance à l'idée de revoir ne serait-ce que la moitié de ce qu'on a vu hier soir. Dans cette forme là, United est difficilement arrêtable. La vérité d'un match n'étant pas celle du suivant, nous nous garderons de trop nous emballer, mais ne boudons pas notre plaisir et savourons ce grand pas en avant vers la finale. Merci les gars de nous avoir offert un tel moment ! United rules !
United : Van der Sar, Fabio, Ferdinand, Vidic, Evra, Valencia, Carrick, Giggs, Park (Scholes), Rooney (Nani), Hernandez (Anderson).
Pas utilisés : Kuszczak, Rafael, Evans, Smalling.
Homme du match : Difficile à dire, mais pour les bonnes raisons, cette fois ! Manuel Neuer mérite un prix pour avoir maintenu son navire hors du naufrage si longtemps, mais les onze Red Devils présents sur la pelouse de Gelsenkirchen sont tout aussi méritants pour avoir continué, sans relâche, d'attaquer, encore et encore. Carrick, Giggs, Park, Valencia, Hernandez ont élevé leur niveau de jeu des dernières semaines, mais celui qui mérite le titre d'homme du match est Wayne Rooney, pour son assist lumineux, pour son but, pour l'ensemble de son oeuvre. Un plaisir à regarder dans un nouveau rôle qui semble lui aller comme un gant et le genre de performance qui nous rappelle qu'il est, dans cette forme, l'un des trois meilleurs joueurs au monde.