Concrètement, le texte propose d'intégrer deux puces au précieux document. La première stockerait l'état civil de son propriétaire (nom, prénoms, sexe, date de naissance, lieu de naissance,
adresse) et certaines caractéristiques physiques (taille, couleur des yeux, photographie, empreintes digitales), comme l'expliquait Le Point.fr. La seconde, facultative, serait une sorte de
signature électronique destinée à protéger de la fraude lors de transactions en ligne.
Lever les inquiétudes
Déjà approuvé par la commission des Lois, ce texte, qui sera discuté au Sénat mercredi, met volontairement l'accent sur son aspect "protecteur". Son rapporteur centriste, François Pillet, refuse
d'ailleurs de le laisser qualifier de "sécuritaire". Et pour cause : après une première esquisse en 2001, le projet INES en 2005 avait suscité une levée de boucliers, notamment à la suite du
rapport du Forum des droits sur l'Internet et des réserves émises par la Cnil, avant d'être suspendu par le ministre de l'Intérieur de l'époque... Nicolas Sarkozy.
Mais pour François Pillet, les inquiétudes qu'INES avait suscitées sont levées par ce nouveau texte. Notamment celles qui concernaient la nature même du fichier centralisant les données
biométriques. "À l'arsenal législatif, cette proposition de loi ajoute une protection matérielle pour les citoyens", explique-t-il. Traduction : selon lui, ce fichier ne pourra en aucun cas être
utilisé à d'autres fins qu'à celle de l'identification des citoyens. Pour une raison simple : cela est matériellement impossible. En outre, le projet prévoit de pouvoir tracer les éventuelles
consultations de la fiche d'identité biométrique d'un citoyen.
Projet "a minima"
Reste que pour les détracteurs du projet, le problème réside avant tout dans le principe même de collecte et de stockage de données biométriques, qui constituent à leurs yeux une atteinte à la
vie privée, quel que soit l'usage qu'on en fait. Quant à la portée symbolique du texte, son auteur Jean-René Lecerf, qui a fait de la lutte contre l'usurpation d'identité son cheval de bataille
et qui en était déjà à l'origine en 2005, reconnaît, lui, plus volontiers une dimension sécuritaire. À tel point qu'il s'étonne lui-même que la proposition n'ait pas figuré dans l'arsenal
juridique de la loi Loppsi (Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure). "J'en avais parlé à Brice Hortefeux lorsqu'il était ministre de l'Intérieur... Il
a jugé préférable de traiter le problème à part, plus tard", explique-t-il. Selon le sénateur Lecerf, le ministre de l'Intérieur actuel, Claude Guéant, lui aurait fait savoir qu'il était
favorable au projet. Voire plus. Si aujourd'hui il reste une initiative parlementaire, ce projet de loi "a minima" pourrait bien, à l'avenir, être renforcé par le gouvernement avec des
amendements un peu plus musclés.
Une information que ne confirme pas François Pillet. Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a pourtant lui-même évoqué à plusieurs reprises ces derniers mois le développement de "l'usage de la
biométrie", notamment pour lutter contre l'immigration irrégulière, à l'heure où la France se dote de 120 "postes de lecture" en plus pour les visas biométriques, entrés en vigueur en 2006.
Ceux-ci permettront, déclarait-il au Figaro, début avril, de "reconnaître à coup sûr non seulement l'identité, mais aussi la nationalité des personnes sans papiers". Hasard du calendrier sans
doute : l'un des derniers communiqués du ministère de l'Intérieur, mis à jour le 24 avril, vante de son côté les mérites des passeports biométriques, qui sont désormais au nombre de 5 millions en
France. "Plus rapide", "plus sûr", "plus simple", peut-on lire. Le passeport biométrique fait pourtant toujours l'objet d'un recours en annulation devant le Conseil d'État.
Source : Le Point