Les Anonymous

Qui sont-ils ?

Aujourd’hui diabolisés par des médias souvent trop peu renseignés voire parfois manipulés, les Anonymous n’ont pas toujours eu cette image de pirates informatique qu’on leur prête volontiers depuis ces derniers mois. Travaillant dans l’ombre depuis trois ans environ, ce groupe de personnes masquées, cachant leur identité et menant des actions obscures pour qui ne s’y intéresse pas de prêt, peut effrayer et amener à se poser la question de leur réelle motivation. Qui donc dirige cette organisation, qui en fixe les règles et qui définit les limites ?

Tout a débuté un jour de janvier 2008. Une vidéo mettant en scène Tom Cruise et destinée aux recruteurs de l’Eglise de Scientologie fuite sur Youtube. Normalement censée être réservée à un usage interne, celle-ci ne fait pas vraiment dans la psychologie fine et a pour vocation de galvaniser les troupes de la secte la plus puissante du monde. Cette publication suscite bien entendu de nombreux débats sur la toile et l’Eglise de Scientologie demande à la célèbre plateforme de partage de vidéos de supprimer l’objet du litige. C’est à ce moment que des individus se manifestent pour la première fois et se prononcent ouvertement contre la scientologie. Ces personnes, regroupées sous l’appellation « Anonymous », manifestent partout dans le monde, de manière pacifique, se rassemblent devant les principaux fiefs de la scientologie et protestent contre le mouvement sectaire créé par L. Ron. Hubbard.

Le nom du mouvement est directement tiré de la possibilité qu’offrait internet quelques années auparavant de laisser des commentaires sans s’identifier. Chaque commentaire de ce type était signé « Anonymous », qui était donc un des membres les plus actifs de la toile, où que l’on aille. C’est donc un message fort qu’envoyaient ces personnes masquées, puisque le nom de leur organisation symbolisait une omniprésence en même temps qu’une impossibilité d’être formellement identifié permettant une liberté d’expression importante. Cette incessante obsession d’anonymat se justifie par les pratiques de l’Eglise de Scientologie, qui n’hésite pas à perpétuer ce que l’on appelle la propagande noire afin de discréditer leurs opposants dans la société. Pire, ils n’hésitent parfois pas à agresser physiquement les manifestants, comme en témoigne ce fait récent qui s’est passé à Paris. On voit régulièrement ces Anonymes arborer le masque de V, héros de BD librement inspiré de Guy Fawkes, personnage du XVIII siècle qui se battait pour la liberté religieuse. Là aussi, la symbolique est forte, ramenant une fois de plus à la liberté d’expression mais également au film V pour Vendetta sorti trois ans plus tôt et montrant comment un homme seul pouvait faire monter les foules contre l’oppression d’un gouvernement ou d’une quelconque organisation totalitaire.

Les actions menées en 2008 avaient fait grand bruit, passant dans beaucoup de journaux télévisés, que ce soit en France, en Angleterre, aux Etats-Unis ou en Australie par exemple. Cependant, le soufflet était assez vite retombé, les actions des Anonymous se faisant plus discrètes bien qu’étant régulières (on compte encore aujourd’hui environ un raid tous les mois devant le siège de l’Eglise de Scientologie à Paris). A l’époque déjà cependant, on voyait les prémices d’une nouvelle façon de manifester plébiscitée par les Anons : les attaques par déni de service sur des cibles bien précises. Afin de bien comprendre le point de vue des Anonymous et ce que l’on y adhère ou non (ce n’est pas le but de cet article de prendre parti), il faut savoir ce qu’est une telle attaque. Pour faire simple, il s’agit d’une attaque menée par un grand nombre de personnes, qui effectuent des millions de requêtes de connexions simultanées vers un site. Cela cause une saturation du réseau et une indisponibilité du site ou du service visé. Ainsi, en marge des manifestations physiques menées partout dans le monde, les sites officiels de l’Eglise de Scientologie ont été attaqué et ont vu leur disponibilité cesser pendant quelques temps. Aux diverses accusations de piratage dont on a accusé les Anonymous, ceux-ci ont toujours répondu la même chose : ce procédé, qui n’est pas intrusif et ne modifie en aucun cas le contenu d’un site internet, n’est pas différent d’un sitting devant une entreprise pour en empêcher l’accès en guise de protestation. Que l’on adhère ou non à ce procédé actuellement considéré par la loi comme un délit, il faut bien être conscient que cela ne cause rien d’autre qu’une indisponibilité temporaire de la cible visée.

L’action des Anonymous s’est donc poursuivie dans le plus pur anonymat jusqu’à la fin 2010 et l’affaire Wikileaks. A ce moment là déjà, le mouvement avait pris de l’ampleur et prônait, en plus d’une lutte permanente contre la scientologie, la défense de la liberté d’expression. Sans rentrer dans le débat sur Wikileaks, puisque ce n’est pas ici le sujet, des éléments dans l’affaire ont fait réagir les Anonymous. En effet, avant même qu’un procès soit intenté et qu’une décision de justice soit prononcée, Wikileaks s’est vu, sur pression de l’Etat américain, supprimer les possibilités de donations via Paypal, Visa ou Mastercard. Le groupe des Anons a donc pris position pour Wikileaks, protestant contre la suppression des accès bancaires du site préalablement à toute action légale. Ils ont donc, une nouvelle fois, effectué une attaque DDOS contre les trois sites. Là également, il en a résulté une indisponibilité temporaire de chacun des services bancaires, les obligeants à revenir sur leur décision de couper les vivres à Wikileaks. Cette première grande victoire des Anonymous contre de grandes institutions les a donc projetés en pleine lumière, faisant naître autant d’admirateurs que de détracteurs. D’une manière générale, les médias généralistes semblaient avoir oublié les sujets qu’ils avaient écrits deux ans auparavant, diabolisant ici le phénomène des Anonymous, les qualifiant de cyber-criminels et de pirates informatiques. On a pu voir fleurir les sujets mal renseignés, comme il en existe malheureusement trop sur le jeu vidéo par exemple.

Vint ensuite un autre événement dont nous avons assez peu entendu parler dans les JT, qui préférait se concentrer sur l’arrestation d’un jeune garçon de quinze ans dans la banlieue de Clermont-Ferrand, présenté sans grand détour par France 3 comme la tête pensante des Anonymous en France. Début 2011, le monde arabe implose, les révolutions éclatent, le peuple se soulève contre les dictatures instaurées lors de décolonisation. Afin d’endiguer un mouvement qui s’organise en grande partie sur les réseaux sociaux, comme par exemple Facebook ou Twitter, ainsi que de minimiser les remontées médiatiques à l’étranger, les gouvernements menacés décident de restreindre les accès à internet, voire même de les couper totalement (en Egypte notamment). A ce moment, les Anonymous, dans leur volonté de défendre la liberté d’expression, mettent à disposition des révolutionnaires les moyens de contourner ces blocages. Les locaux arrivent ainsi à passer outre la censure du gouvernement et peuvent continuer à s’informer, à informer et à communiquer entre eux. On qualifie aujourd’hui la révolution tunisienne de révolution Facebook. Si cela est peut-être un peu exagéré, il est en revanche indéniable que les réseaux sociaux ont été un facteur accélérateur dans les renversements de ces gouvernements despotiques. Bien que les Anonymous ne soient pas les créateurs de ces outils permettant de contourner la censure, ce sont tout de même eux qui ont monté les réseaux pour pouvoir les mettre à disposition du plus grand nombre. Plus que cela même, alors que l’Egypte était complètement coupée du monde, n’ayant plus aucun accès à Internet, ils ont mis à disposition du peuple un numéro de téléphone qui, couplé à un mot de passe et un modem comme ceux que l’on avait il y a dix ans, permettaient d’avoir accès à une connexion sans aucune restriction si ce n’était un débit limité à 56K.

En parallèle de ces événements, Sony voyait sa Playstation 3 piratée et attaquait GeoHot, qui avait publié la Master Key sur son site. Si l’on peut difficilement blâmer Sony de vouloir faire valoir ses droits et d’attaquer un homme ayant commis un délit, il est moins aisé de les défendre sur leur croisade qui a pris des proportions encore jamais vues. La firme, après avoir passé des accords avec Youtube pour bloquer les comptes de personnes montrant le hack (sans forcément dévoiler le moyen de parvenir à exploiter la faille), a demandé à obtenir toutes les IP des personnes ayant visité le site de GeoHot et donc potentiellement en possession de la Master Key ouvrant virtuellement le système de la PS3 à n’importe quel bidouillage. Ici, la liberté non pas d’expression mais simplement d’information étant fortement bafouée par Sony (rien n’interdit en effet le quidam d’aller sur le site de GeoHot), les Anonymous ont réagit avec virulence à l’égard de la firme, effectuant à nouveau une attaque par dénis de service de grande ampleur. Après avoir rendu inaccessible les serveurs du PSN pendant une bonne journée, un arrêt des actions a été décidé, celle-ci impactant les utilisateurs (c’est pas leur guerre comme dirait l’autre).
Cependant, le PSN est actuellement toujours indisponible et semble avoir subit des attaques bien plus intrusives de la part d’individus qui n’ont pas revendiqué l’action. Des mots de passe semblent avoir été volés, ainsi que des informations bancaires. Rien n’indique cependant que ce soit les Anonymous qui soient à l’origine de ce hack, et cette déclaration semble même prouver le contraire.

Des questions se posent cependant maintenant quant à l’organisation même de ce groupe d’individus dont les revendications peuvent finalement sembler assez floues pour qui s’y intéresse de loin. La première chose à savoir et peut être la plus importante est qu’Anonymous est ouvert à tous. Il n’y a aucunement besoin de s’y connaitre en informatique, aucune restriction d’âge ou de sexe. Seule la motivation compte, et l’objectif de l’organisation est toujours aujourd’hui de lutter contre les méfaits de la scientologie. Il n’y a pas non plus de dirigeant chez les Anons. Les décisions d’actions « virtuelles » sont soumises à un vote démocratique, même si dans les faits elles sont généralement acceptées à la grande majorité, eut égard aux nombreuses discussions sur le sujet au préalable. Les Anonymous ne sont pas des anarchistes non plus, leurs actions sont le plus souvent effectuées après de nombreuses discussions effectuées sur les canaux IRC.
Reste maintenant le problème de l’anonymat, qui, s’il protège les membres contre l’Eglise de Scientologie, renvoi inévitablement l’image de personnes ayant quelque chose à cacher. Cependant, cela est fait avant tout dans un souci de sécurité personnelle, tout comme le fait de cacher son adresse IP. L’église de Scientologie est puissante et utilise des moyens souvent illégaux pour nuire à ses détracteurs.
Cependant, cet anonymat donne la possibilité à des personnes utilisées d’utiliser la notoriété grandissante de l’organisation à des fins personnelles. On voit de plus en plus de personnes se revendiquer Anonymous, arborer le masque et effectuer des actions illégales et intrusives. La première règles des Anonymous est « Nous sommes pacifiques » et elle est respectée de tous les membres sérieux, puisqu’elle peut être un motif de bannissement si elle n’est pas respectée. Il faut donc faire très attention lorsque l’on entend parler des Anonymous et des actions qu’ils mènent. Afin d’être certain qu’une action vient de cette organisation, il suffit de chercher sur Youtube ou Dailymotion des vidéos de revendications, puisque, sous couvert de voix digitalisées, les Anons revendiquent tout ce qu’ils font.

Bien entendu, cet article n’a pas vocation à prendre parti pour qui que ce soit et n’est présent que dans le but d’informer les personnes qui se posent des questions à propos de ce que sont les Anonymous. Vous trouverez ci-dessous des vidéos avec légende afin d’être le plus exhaustif possible, ainsi que des liens qui vous permettront d’approfondir vos recherches si vous le désirez. Le phénomène est important et fait énormément parler de lui en ce moment, c’est pourquoi il est important de s’informer le mieux possible et de ne pas se cantonner à un seul média afin de faire le tri de ce qui semble s’avérer juste ou pas. Nous ne donnerons pas de lien vers les avis de l’Eglise de Scientologie, que nous ne considérons pas pertinents et que l’auteur de l’article condamne pour ses dérives sectaires.

Cette vidéo est un document de France 2, diffusé pour l'émission Complément d'Enquête. Quelque jours après l'émission, la personne présentée comme un Anonymous est arrêtée par les services de polices et interrogée par ceux-ci. Elle avouera ne pas être un Anonymous et avoir été manipulée par la chaîne de télévision. L'arrestation du hacker nous amène en plus à nous poser de sérieuses quand à la protection des sources exercée par la chaine du service public.

Document publié dans l'émission Tracks diffusée sur Arte (2009) et présentant l'action des anonymous contre la scientologie.

Emission Arrêt sur Image, tournée à l'occasion de la révolution du monde arabe et parlant aussi bien de l'action des Anonymous lors de ces événements que de leur origine et des attaques DDOS.

Vidéo d'Anonymous présentant les règles à suivre durant les raids de protestation contre l'Eglise de Scientologie.

La première vidéo des anonymous à l'encontre de l'Eglise de Scientologie.

Liens annexes :

Site francophone sur les Anonymous : http://www.anonymes-france.eu/

Site WhyWeProtest (une partie du forum francophone) : http://www.whyweprotest.net/

Par melkor • Aujourd'hui à 01h31

Gimlee
il y a 47 minutes
melkor @gimlee "Bonne lecture et n'hésitez pas ensuite à donner votre avis, de manière constructive si possible bien évidemment." Qu'est-ce que tu as pas compris ? Le passage où faut lire ou celui où faut être constructif ? Ou les deux p'têt ? il y a 33 minutes
Gimlee Pardon j'avais pas lu XD, enfaite j'ai survoler vu que je connais assez bien le sujet

il y a 8 minutes