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Serena

Par Anne Onyme

serenaRon Rash
Éditions du Masque
380 pages

Résumé:

L’héroïne, sorte de Lady Macbeth des années 1930, est l’épouse de George Pemberton, riche et puissant exploitant forestier. Ces deux-là sont des prédateurs, prêts à tout pour faire fructifier leur entreprise dont l’objectif est de couper tous les arbres à portée de leur main. Une ambition que vient menacer le projet d’aménagement d’un parc national, pour lequel l’État convoite leurs terres. Pemberton met sa fortune à contribution pour soudoyer tous les banquiers et politiciens qu’il faut, et Serena n’hésite pas à manier fusil et couteau pour éliminer les obstacles humains. Belle, ambitieuse et intrépide, Serena fascine son mari et ses employés, pour lesquels elle n’éprouve aucune compassion. Et pourtant chaque jour apporte son lot de blessés, voire de morts, tant le métier de bûcheron est dangereux en soi et la nature alentour hostile, quoique magnifique. Le roman prend des allures de thriller lorsqu’elle poursuit de sa haine implacable le fils naturel que Pemberton a engendré avant son mariage et qu’il semble vouloir protéger. Sa fureur vengeresse ira très loin…

Mon commentaire:

Un jour, Pemberton, un entrepreneur forestier sans scrupule, ramène au campement sa nouvelle épouse, Serena. Sur le quai de la gare les attendent le vieux Harmon et sa fille Rachel, à qui Pemberton a fait un enfant avant de partir. Le vieil homme demande réparation, mais la confrontation se termine mal. Pemberton retourne alors sur le chantier avec son épouse. Serena est une femme ambitieuse, belle, volontaire, qui n'a pas froid aux yeux. Elle porte des pantalons, dirige les hommes du chantier de main de maître, dresse un faucon et monte à cheval comme un homme. En 1930, elle se démarque tout à fait des autres femmes et les têtes se retournent sur son passage.

Le couple maudit a pour ambition de tout raser et de s'approprier le bois de toutes les forêts environnantes. Ils voient grand et n'ont aucun considération pour quiconque se place dans leur chemin. Ils ont d'ailleurs leur propre justice et n'hésite pas à s'en servir pour arriver à leurs fins. Si par moments, Pemberton laisse poindre une légère lueur d'humanité, Serena est froide comme la mort et sans pitié. Elle sait quoi faire pour se rendre là où elle souhaite aller. Et elle en est d'autant plus effrayante...

Le roman de Ron Rash est un livre particulier. C'est un roman noir, qui prend par moments des allures de roman écologique. Avec leur envie de tout couper et de faire fructifier les coupes de bois qu'ils dirigent, Pemberton et Serena saccagent littéralement la région qui les entoure. Au fil du roman, on assiste à certaines conversations des bûcherons qui constatent la destruction des milieux naturels et l'impasse dans lesquels ils se retrouvent. Dans une région difficile où le travail se fait rare, ils ont assez peu de moyens de se battre contre Pemberton et Serena. Le travail est leur seule porte de sortie afin de nourrir leurs familles. Si certains s'allient aux patrons pour toutes sortes de raisons, plusieurs se méfient d'eux et de leur incontrôlable ambition. Il ont bien raison. Il tombe autant d'arbres sur le chantier que d'hommes morts des suites "d'accidents" qui auraient pu être évités. La protection de leur personnel n'est, hélas, pas la priorité de Serena et Pemberton...

Le roman de Ron Rash est un roman noir qui repose essentiellement sur le personnage de Serena. Elle est folle à lier, mais d'une folie distinguée, froide, meurtrière. Elle prend le contrôle du chantier comme du roman dans lequel elle évolue. C'est elle qui dirige, qui prend les choses en main et son comportement donne par moment le frisson. Elle est si froide, si insensible à tout ce qui l'entoure, qu'elle en est terrifiante. Le roman prend une tournure se rapprochant du polar lorsque Serena s'allie à un homme de main à qui elle a sauvé la vie et qui est prêt à aller n'importe où pour elle. Même jusqu'au meurtre. Un de plus ou de moins, de toute façon...

Si l'idée d'un roman mêlant l'écologie (et son non-respect) avec un personnage féminin terrifiant dans sa nonchalance et son ambition démesurée vous séduit, ce roman est pour vous! Une lecture qui m'a personnellement bien plu, puisque le cadre où il se déroule - un chantier forestier - est plutôt intéressant et que Serena est un personnage assez inoubliable... pour les mauvaises raisons! Une bonne lecture.

Un extrait:

"Pendant qu'elle déjeunait, Kephart se tint sur le pas de la porte. Rachel mourait de faim et elle mangea tous ses haricots jusqu'au dernier. Kephart remplit une deuxième fois son pot de babeurre dont elle but la moitié, avant d'émietter un morceau de pain de maïs dans ce qui restait. Elle se dit que c'était un réconfort de manger dans les moments difficiles, parce que cela vous rappelait qu'il y avait eu d'autres jours, des jours heureux, où vous aviez mané les mêmes choses. Cela vous rappelait qu'il y avait aussi des bons jours dans l'existence, quand tout paraissait aller mal." p.295


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