Oui, je vous parle encore d'Azzaro aujourd'hui, car c'est une marque qui, comme je le disais précédemment, trouve une résonance en moi.
J'ai la sensation d'avoir connu son créateur pour de vrai, voire de faire partie de sa famille.
Et Couture me donne l'occasion d'aborder un thème qui me semble crucial : la difficulté de revisiter un classique sans se faire lyncher par les anciens adeptes.
Il faut savoir qu'il y a deux motivations principales qui régissent la volonté d'une marque de réinventer son ancien pilier.
Tout d'abord car c'est souvent l'emblème de la marque : dans l'esprit des connaisseurs, c'est souvent un parfum qu'ils regrettent.
Ainsi, le remettre sur le devant de la scène en le réadaptant aux goûts du jour, semble une stratégie assez évidente.
Ensuite, ceci se justifie souvent par le retrait du marché de certaines matières premières structurelles, comme ce fut le cas de la mousse de chêne, aujourd'hui pointée du doigt alors qu'elle était à l'époque la signature des grands parfums.
Pour la marque Azzaro, alors qu'elle semblait se tourner de nouveau vers les femmes, Couture était une évidence.
C'était le premier parfum du couturier, lancé en 1975.
Et c'était un féminin.
Et quel féminin !
Un parfum avec un flacon goutte en hommage à la célèbre robe du créateur, un jus couleur d'or, magnifique chypré fruité aux matières premières très qualitatives.
Un summum de la classe.
Mais ce jus, aussi beau soit il, ne conviendrait plus aux attentes du marché actuel. Il faisait partie des jus de caractère, mêlant classe et affirmation.
Un parfum de dame, dans le bon sens du terme.
Alors la marque a souhaité le confier à Aurélien Guichard pour lui donner un petit air de modernité sans le trahir.
Vanessa Seward, la Directrice artistique de la marque, a ainsi passé en blanc le flacon initialement noir, et demandé davantage de clarté pour le jus.
Ainsi, nous passons d'un jus à la tête fruitée aldéhydée, au coeur floral tentateur (rose, jasmin, ylang et iris) et au fond affirmé par les bois et la mousse de chêne à une fragrance plus douce.
Concrètement, si la tête fruitée aldéhydée révèle davantage ses aspérités épicées et vertes (absolu de galbanum, oeillet), c'est en coeur et en fond que la différence est la plus nette. Le coeur floral de la version 2008 met en avant des matières premières prestigieuses que sont le jasmin et les absolus de mimosa, de rose de mai (centifolia) et d'iris. Le tout est radieux, ensoleillé et très féminin, avec un côté poudré très agréable. Les fixateurs (notes de fond) ne sont pas en reste, avec un joli patchouli pour le côté mousseux, et l'absolu de graines d'ambrette pour l'aspect gras et imposant.
Pour conclure, quand j'ai découvert Couture 2008, je ne connaissais pas bien la version initiale. Et je l'ai trouvé plus que qualitatif, au regard de la concurrence. Fidèle aux valeurs Azzaro : goût des belles matières, envie de magnifier le charme et l'élégance naturelle.
J'ai tout de même souhaité sentir le parfum de 1975 (oui, j'ai eu cette chance).
Et j'ai compris la difficulté des marques historiques.
Certes les similitudes entre les deux jus est bien réelle, mais il est vrai qu'en me mettant à la place des anciennes utilisatrices qui l'aimaient dans son ensemble, je comprends que l'on ne puisse pas adhérer. En effet, le choix d'un parfum se fait de manière holistique et non parcellaire.
Là est tout le problème.
Imaginez qu'un ami vous emprunte votre vêtement préféré et vous le rende avec quelques modifications. Parmi celles ci, certaines ne vous conviennent pas. Vous allez simplement le reléguer au placard, en vous sentant horriblement déçu(e), voire trahie.
Il en est de même en parfum.
En tout cas, je reste séduite par cette fragrance raffinée.
En outre, le concept marketing est fort, il met bien en exergue la qualité de la marque et ses origines, donc j'ose espérer que ce jus, même s'il déçoit les fanatiques de l'original, a su plaire à d'autres consommatrices qui ont simplement pu l'évaluer de manière objective.
Je souhaite longue vie au Couture blanc !