Aujourd'hui a été le grand jour. Celui tant redouté du dernier adieu. Depuis maintenant une semaine qu'on navigue dans cet environnement mortuaire, la chose avait perdu de son sens. On règle des dizaines de niaiseries administratives en famille, la mère, la soeur et les deux autres frères. On fait tout ce qu'il faut faire pour que les choses soient bien faites. L'entrée au salon nous replonge dans la peine. La famille et les amis arrivent et l'espace temps est complètement chamboulé. On vit dans le passé pendant quelques heures, celui des retrouvailles comme celui des souvenirs. Des vieilles tantes comme de vieux oncles. Des amis jeunes qu'on a vus il y a tellement longtemps qu'ils ont l'âge de leurs souvenirs. Ce passéisme joue presque l'effet d'un analgésique. Pendant quelques heures même, c'est un peu comme si on perdait le sens de cette rencontre. La cérémonie religieuse vient brusquement nous ramener à la réalité. Celle de la vraie fin. Celle qui nous fait violemment comprendre enfin que seuls les souvenirs continueront d'émouvoir, comme les uniques témoins toujours vivants. Éternellement vivants.