Jean-Marie Le Pen est un homme habile. En rendant publique son opposition à l'exclusion du FN d'un militant pris en flagrant délit de salut nazi, exclusion décidée par sa fille Marine, il l'a dédouane et en fait, en quelque sorte, une tendre. « Marine, a-t-il déclaré, n'a pas pris connaissance du procès verbal de la commission des conflits, elle aurait dû attendre. Elle pourra faire appel de sa propre décision. » Ladite commission a en effet décidé que les photos de l'accusé étaient des photos truquées ce qui n'est évidemment pas le cas.
Chez les Le Pen, on a donc décidé de se répartir les tâches. Pour l'un les chambres à gaz sont un point de détail de l'histoire, pour l'autre, c'est le sommet de la barbarie. Il ne faut pas s'étonner que la fille de son père devienne, aux yeux d'un cinquième des Français, quelqu'un pour qui on peut voter. Du moins quand on vote puisque les votants se font de plus en plus rares. En prenant la tête du Front national et en écrivant aux préfets de la République, Mme Le Pen-Aliot veut jouer dans la cour des grands. Elle fait celle qu'on peut croire, celle qui va gouverner le pays, celle dont personne n'a rien à craindre. Il se trouve même 36 % des ouvriers prêts à voter pour elle. Cela ne fait pas une majorité, heureusement, mais démontre que la Gauche a encore du boulot d'ici 2012.
Les livres, les émissions, les témoignages ne vont pas manquer à l'occasion du 30e anniversaire de l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand et de la gauche en 1981. Hier soir, une chaîne consacrait deux heures à expliquer les événements de la semaine qui vit Giscard et Barre faire le dos rond après la victoire, dans les urnes, du premier secrétaire du Parti socialiste devenu président de la République. Entre le 10 mais et le 21 mai, les Français pleins aux as ont sorti un milliard de dollars par jour de notre pays sans que les VGE-Barre ne lèvent le petit doigt. Alors que des hauts fonctionnaires du ministère des finances et de la Banque de France proposaient à Raymond Barre d'agir et de prendre des mesures conservatoires, il a refusé ! C'est ainsi que la dévaluation s'est imposée et que Yvon Gattaz, ancien président du CNPF, pouvait assurer sans rire que les socialistes voulaient la destruction et la disparition des entreprises françaises. Ce sont les mêmes qui, depuis des années, délocalisent, suppriment des emplois, refusent les augmentations de salaires, spéculent à tout va…gonflés les patrons !
Le président de la République se mue en candidat. Il vient de faire distribuer 5000 exemplaires d'une plaquette dressant le bilan de ses quatre années de présidence. J'en ai lu des extraits. Je n'ai pas l'impression de vivre dans le même pays. Tout va bien : sécurité, emploi, immigration…la France est plus juste, plus moderne, réformée.
Le hic, c'est que les faits sont têtus. Et qu'il lui sera impossible de vendre un bilan pareil. Le président de la France qui se lève tôt, du travailler plus pour gagner plus a échoué sur toute la ligne. Le chômage n'a pas baissé, le pouvoir d'achat n'a pas augmenté, l'insécurité des personnes est plus grande encore et les moyens pour y remédier sont inadaptés ou inefficaces. Etonnons-nous que des hommes de droite, plus avisés que d'autres, proposent des primaires dans le camp UMP !
Nous sommes en guerre en Afghanistan, en Libye et en Côte d'Ivoire. Arnaud Montebourg soulignait, hier, qu'à aucun moment le Parlement n'a été invité à donner son avis sur les engagements militaires de la France et sur les moyens d'atteindre les objectifs fixés par le président de la République. En Afghanistan, la situation est, dit-on stabilisée. Chaque jour, les attentats des talibans et les drônes américains coûtent des vies. En Libye, la situation évolue. On a maintenant des conseillers français des forces spéciales au sol pour diriger les frappes aériennes et, qui sait, préparer…le terrain. Pendant ce temps-là, le clan Kadhafi règle quelques petits problèmes d'intendance en plaçant des milliards de dollars dans les paradis fiscaux. Les Koweitiens viennent, eux, d'offrir 180 millions de dollars aux insurgés : ils pourront acheter des armes et continuer le combat à Misrata ou ailleurs. Gérard Longuet, ministre de la Défense a prévenu : ce sera long et difficile.