La gauche, c’est des idées. Pour Bahia Benmahmoud (Sara Forestier), jeune femme née de père algérien (Zinedine Soualem), cela rime avec altruisme, folie, conviction. Elle pleure lorsqu’elle vote Chirac, couche avec des mecs de droite pour les convertir à sa cause, et, se retrouve nue dans le métro parisien parce qu’elle est trop occupée, hyperactive, distraite. Lorsqu’elle tombe amoureuse d’Arthur Martin (Jacques Gamblin), qui cache derrière un nom d’une banalité à pleurer un passé plus complexe, elle y voit l’acte militant par excellence: l’étreinte romantico-politique d’une arabe et d’un juif, l’amour en réponse à une France sectaire, qui condamne, et juge. Il y a du Woody Allen dans cette comédie enlevée de Michel Leclerc, scénariste de La Tête de Maman et réalisateur de J’invente rien- de la mélancolie en pagaille et un regard acéré sur le monde qui nous entoure, ou comment arrive-t-on à vivre avec ses racines, et en quoi celles-ci nous conditionnent, nous nourrissent.
Le cinéaste se questionne alors sur l’identité (nationale, personnelle), alterne HD, super 16 et en super 8 pour parler d’amour, d’origine, de préjugés. Le ton, lui, est sacrément (dé)culotté, et épingle le pays avec une rare acuité: communautarisme, racisme, lâcheté et a priori. Fachos, prolos, bobos : tout le monde en prend pour son grade- le tout enrobé avec délicatesse dans une histoire d’amour tout sauf gnangnan, inattendue et crédible. Dialogues soignés, mise en scène inventive, cocktail réussi d’humour et d’émotion : Le Nom des Gens gagne sur toute la ligne, et réinvente la figure féminine française. Une Marianne aux yeux bleus, métis de sang et de cœur qui ose dire merde à un pays d’étiquettes, où l’on étouffe la singularité dans un perpétuel et inconscient classement social. Riches/pauvres, noirs/blancs, français/musulmans : autant de cases où vient pulluler la puanteur des intolérances, poison d’une France qui sacrifie sa diversité, son multiculturalisme, et ... ses sourires sur les photos d’identité.