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OTAN en Libye (3) Une simple boîte à outils ?

Publié le 24 avril 2011 par Egea

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Toutefois, cette négociation laissera des traces, le secrétaire général ayant eu un « coup de sang » contre les représentants français, allemands et turcs, le 22 mars, selon la lettre TTU . Il reprochait aux uns de chercher à affaiblir l’alliance après l'avoir rejointe ne grande pompe, aux Allemands le retrait de leurs AWACS et aux Turcs leurs réticences sur l'état-major allié d'Izmir, en charge de la composante aérienne. Et TTU d'ajouter : « Ayant perdu le soutien des trois membres majeurs, sa position en interne serait, selon certaines sources, fortement fragilisée et il pourrait bientôt être remplacé ».

Il reste que l'engagement de l'organisation paraissait inéluctable : d'une part pour complaire aux alliés n'ayant que l'Alliance pour exister au niveau diplomatico-militaire, d'autre part pour tenir compte du recentrage britannique.

L’engagement de l’alliance intervenait au moment où l'on commençait à s'interroger sur les buts de guerre : on entendit ainsi M. Rasmussen déclarer que l'Alliance était « impartiale », et qu'il ne s'agissait pas de chasser M. Kadhafi.... Des déclarations curieuses quand on dirige une organisation militaire engagée dans une opération de guerre : Quand on applique le « droit de protéger », on est au moins du parti des populations civiles. Surtout, on sait depuis Clausewitz que la guerre est un affrontement de volonté : ne pas l’admettre affaiblit immédiatement sa propre volonté. On peut être elliptique sur ses buts de guerre mais se justifier par « l’impartialité » ne convainc personne et affaiblit l’Alliance.

Il reste que les discussions ont été très ardues, la France souhaitant contenir le rôle de l'OTAN, les Américains et les Britanniques souhaitant au contraire lui donner sa place. On aboutit finalement à une formule curieuse (comme toutes les formules diplomatiques trouvées pour surmonter des divergences très marquées), celle d'une « instance de pilotage politique » qui réunirait les ministres des affaires étrangères de la coalition et de la ligue arabe. Mais c'était admettre la position française, et donc ne pas confier la coordination politique au Conseil de l'Atlantique Nord. Cela était déjà arrivé dans les faits (qu'on se souvienne du Kossovo), mais c'est la première fois que c'est officialisé aussi nettement. Toutefois, on peut faire la lecture inverse : ce conseil politique n'était qu'une concession faite à Paris, la réalité du pilotage se faisant au CAN, comme le déclarait le chef du Foreign office, William Hague, le 29 mars.

L'OTAN était toutefois rétrogradée au rang de boîte à outil, et son éventuel rôle politique était passé sous silence. L'accord était finalisé le 27 mars, et le transfert des opérations à l'OTAN effectif le 31. Cependant, sur les 28 alliés, huit s'abstiennent de participer à l'opération : on a connu des consensus plus intenses. Quant aux autres, ils se répartissent entre ceux qui participent aux bombardements (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Canada, Italie, Belgique, Danemark, Norvège), ceux qui fournissent des avions pour la surveillance (Espagne, Pays-Bas et le partenaire suédois) et ceux qui ne participent qu'aux opérations navales ou mettent des bases à disposition (Turquie, Grèce, Roumanie). En fait, cela marquait un changement profond de la nature de l'alliance, comme le remarque Etienne de Durand (IFRI) « Jadis, les interventions militaires servaient à agréger de la puissance. Maintenant, cela sert surtout à diluer les responsabilités ».

(à suivre)

O. Kempf


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