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Sur le chemin de Stevenson (à pied mais sans Modestine...) !

Publié le 24 avril 2011 par Sylvainbazin
Cette semaine, nous avions décidé, avec Philippe Delachenal et quelques amis de "Courir et découvrir", l'association bien nommée, de courir, en tous cas de découvrir, le chemin de Stevenson, nommé aussi, moins poétiquement, GR 70. Nous sommes quatre (le projet s'est un peu monté à la dernière minute même si cela fait plus de trois ans que nous en parlions ensembles!) à nous élancer de la gare du Puy-en-Velay pour 254 kilomètres (nous faisons aussi un peu de rabe: Stevenson avait commencé au Monestier sur Gazeille et s'était arrêté à St Jean du Gard, mais bon...) qui doivent nous conduire, à travers ces sentiers, jusqu'à son homologue d'Alès. Outre Philippe, je retrouve ainsi Bernard Rouziès, le "chamois du Rouergue", éleveur à l'accent chantant et trailer émérite (j'ai écrit un portrait dans Running Attitude actuellement en kiosque) et Gilles Barthalay, un des collectionneurs de trails parmi les plus compulsifs que je connaisse et excellent compagnon qui plus est. Guy Mazuès, "l'homme du Jura", expert ès-topo et cartes, nous accompagne cette fois en VTT et Silvère Bonnet, monsieur animation et évènements à Pralognan-la-Vanoise, assure l'intendance, le transport des sacs, le ravito... Efficace!
Nous n'avons donc plus qu'à mettre nos pas dans ceux de l'écrivain écossais, qui a un peu inventé le voyage à pied et la randonnée, sans bien sûr s'en rendre compte, en ce mois de septembre 1861 où il s'est embarqué sur ces sentiers avec son ânesse, Modestine. Pour l'heure nous ne sommes pas accompagné d'un compagnon à quatre pattes et aux longues oreilles (de nombreux randonneurs parcourent ainsi ce chemin rendant ainsi hommage à l'auteur de Dr Jekyll et Mr Hide): Silvère le remplace!
Notre première étape nous mène au Bouchet Saint Nicolas, après 42 kilomètres à travers le Velay. Le sol est un peu teinté de pierre volcanique, nous courons à travers de beaux plateaux, où ils ne doit pas faire chaud l'hiver, à environ 1000 mètres d'altitude. Cette "mise en jambe" est parcourue sous un beau soleil printanier, qui ne nous quittera pas du voyage. Nous faisons quelques pauses, prenons le temps d'admirer le paysage: c'est le propre de ce type de "rando-course": nous allons certes bien plus vite qu'un randonneur, le défi physique est là, mais nous pouvons prendre ce temps, sans pression, de nous accorder une pause ou de rencontrer des gens... Il ne nous faut cependant pas traîner trop car nous sommes partis en début d'après-midi et voulons éviter la nuit. Nous arrivons à bon port, dans un gîte sympathique et bien tenu, juste à temps. Ce n'est pas plus mal car sur ce plateau la température chute vite avec l'obscurité. Un bon repas nous attend, de quoi nous requinquer pour mieux repartir le lendemain. L'ambiance est d'emblée excellente, sans pression, juste l'amitié et la passion partagée. La première bière de l'expédition est bien appréciée!
La deuxième étape est déjà un sacré morceau: 61 kilomètres entre Le Boucher et ! Nous partons donc assez tôt (à 8h...) sur les chemins du Velay. Le plateau offre de beaux panoramas et des chemins assez roulant, de larges perspectives. Nous parlons un peu de la Mongolie et c'est vrai que cela peut y faire un peu penser. D'ailleurs le vent qui nous accompagne me rappelle celui des steppes. Nous descendons ensuite vers les premiers villages du parcours. Ils sont vraiment bien préservés. Nous plongeons dans une "France profonde", pittoresque mais pas endormie. A Arquejol Philippe et moi nous arrêtons devant une maison où est sculptée, en fronton, une tête de loup, ou plutôt de bête du Gévaudan: nous entrons effectivement dans le pays où cette énigmatique créature a sévi... La jeune femme qui habite là nous explique que son compagnon est un grand spécialiste de l'affaire, auteur d'une trilogie sur le sujet. Cette histoire m'a toujours intéressé et je me promets de jeter un oeil sur son livre. Après cette pause intéressante, nous continuons à travers des chemins bien "aérés" a une allure plutôt régulière. Nous visitons un peu Pradelles, magnifique village fortifié, puis nous arrêtons pour un déjeuner à Langogne où nous attend Silvère. Quelques tranches de pain et de fromage et un café plus loin, nous repartons.
Nous n'allons pas bien loin: en passant devant l'école du village, à Saint-Flour de Mercoire, les enfants nous demande si nous souhaitons prendre une tasse de thé ou un café. Nous acceptons bien entendu. C'est dans l'ancien four à pain que ces gamins bien élevés et spontanés, avec l'aide de leur maîtresse bien sûr, nous prépare le café. Ils nous disent leur bonheur de vivre ici, en pleine campagne. Il est vrai qu'en cette belle journée d'Avril, leur programme de l'après-midi, "faire du vélo", parait bien alléchant par rapport à celui de petits citadins... Nous sommes invités à écrire un petit mot sur le livre d'or du four à pain, je me charge de dessiner un âne en train de courir (sur deux pattes et avec short et maillot) pour les remercier de leur accueil.
Le chemin est relativement facile et nous reprenons un bon rythme pour filer jusqu'à Cheylard-l'Evêque, où nous attend... une nouvel pause! Guy connait en effet le gérant du gîte local, chez qui nous dégustons deux bières artisanales bien appréciées!Le temps est au beau fixe, le moral aussi et même si les articulations souffrent un peu... Certes, la reprise est un peu difficile mais nous reprenons tout de même notre course à travers un paysage de plus en plus vallonné. Une succession de collines nous conduit jusqu'à l'étape du jour, la Bastide Puy Laurent. Nous goûtons à un repos bien mérité après ces 61 kms autour d'un bon repas dans un petit hôtel où le temps semble s'être arrêté dans les années 60... Les discussions, comme lors de la journée en courant, vont bon train: nos projets de courses et de voyages font partie bien évidemment des sujets favoris mais nous goûtons aussi ce qui nous entoure dans ce voyage là.
Nous reprenons notre route le lendemain avec un certain entrain. Nous nous enfonçons dans le Gévaudan avant d'aborder les pentes du Mont Lozère. Le vent se fait de plus en plus violent. A Chasseradès, le fidèle Sylvère nous attend pour un premier ravitaillement devant une belle église romane. Ce n'est pas vraiment "l'étape gastronomique" qui semblait tenter Gilles (elle est signalée dans ce village par le guide de l'association du Chemin de Stevenson) mais ce n'est pas si mal! Les pauses ponctuent très bien ce périple. Celle au café du Bleymard, au pied du Mont Lozère, est particulièrement appréciée. L'étape commence à être longue et une bonne ascension nous attend. Le Mont Lozère n'est certes pas si difficile mais il souffle un vent à "décorner tous les hiboux" comme l'aurait écrit... non pas Stevenson, Marcel Aymé! Nous progressons tout de même jusqu'au sommet, point culminant de notre périple stevensonien, où ne nous attardons cependant pas trop pour faire quelques images. Il fait vraiment trop froid. J'entame ensuite seul la descente; mes amis, Bernard surtout, se ressentant un peu de leurs efforts. Le début de la descente est assez technique, puis nous retrouvons des chemins plus roulants, offrant de très belle vues à travers le "chaos des collines bleues" qui avait frappé Stevenson. Guy me rejoint sur son vélo un peu avant l'étape, et je le retrouve à une terrasse ensoleillée au bord de l'eau, près d'un des ponts de Pont de Montvert, le très joli bourg qui nous accueille aujourd'hui. Mes compagnons de course ne tardent pas à nous rejoindre. Nous ne nous prélassons pas car nous sommes invités! François d'Haene, un des plus talentueux coureur de trail français, nous attend à quelques sinueux kilomètres de là pour l'apéritif. Il habite en effet un tout petit hameau niché dans la vallée, avec sa compagne. Il est kiné et circule dans le coin pour soigner ses patients, elle travaille dans une association de développement local. Ils semblent heureux de cette vie dans cette région rurale, belle mais tout de même sauvage. Cet apéritif est encore un excellent moment de convivialité.
Le lendemain, François nous rejoint pour l'étape du jour. Pour moi, qui suis un peu "désigné" pour l'accompagner devant, ça ne va pas être une étape de repos! Cependant la forme n'est pas mauvaise et je peux accompagner François sans trop le ralentir. Nous faisons un petit détour par un beau sentier pour nous rendre au sommet du Bougès, où nous sommes rejoints peu après par nos compagnons de chemins. Le vent est toujours bien présent. La descente vers Florac est belle et plutôt roulante. Nous arrivons juste à 12h, pour retrouver Silvère qui fait les courses... Le pittoresque marché du jeudi se termine, nous investissons une terrasse de café. Il fait un temps superbe. Le déjeuner dans le parc voisin est bien agréable même si le vent, revenu souffler fort, rafraîchit un peu trop l'atmosphère. Nous repartons à un très bon rythme. François me propose une variante, où il effectue ses séances de côtes. Cela nous permet de passer devant un beau château en ruine et de découvrir un joli panorama. Nous descendons ensuite vers un joli hameau où François me montre quelques tombes dans un jardin: nous sommes en pays camisard, celui là même que Stevenson, écossais mais protestant, était venu visiter. Cela me rappelle des tombes semblables dans le Poitou, près de Saint Sauvant. Nous dégringolons ensuite, en compagnie de Guy qui nous a rejoint sur son VTT, dans un petit sentier un peu défoncé par les sangliers et qui fleure bon la châtaigne. Nous rejoignons ainsi le GR 70 qui file le long de la Mimente jusqu'à la gare de Cassagnas, je commence à avoir un peu de mal mais nous avançons toujours à bonne allure. Nous faisons une bonne pause dans cet agréable endroit, en attendant nos amis.
La remontée vers le col de la Pierre Plantée est plutôt agréable et la descente vers Saint-Germain de Calberte l'est également, même si la route forestière est un peu trop large... sauf sur les tous derniers kilomètre où un petit chemin ombragé poursuit le GR.
Nous arrivons donc à Saint-Germain pile à 19h, après 7h13 de course effective pour 63 km et 1900m en ce qui nous concerne. Une étape bien rapide donc pour moi, mais bien agréable aussi. Le village de Saint-Germain est charmant et l'auberge, où réside un bon toutou et un chat noir tout aussi sympathique, est accueillante. François repart et nous dînons très bien. Un vrai repas gastronomique... L'ambiance est toujours aussi amicale malgré la fatigue. Demain, nous aurons juste 48 kilomètres à parcourir pour atteindre Alès et la fin, déjà, de notre joli périple.
Il fait beau ce matin là sur Saint Germain de Calberte et contrairement aux prévisions météo nous connaîtrons la journée la plus chaude de la semaine. Le parcours est agréable et traverse de très jolis villages perchés, aux maisons de pierres ocres très bien conservées. C'est plutôt vallonné et je me ressens nettement de mes efforts d'hier. Cette fois c'est moi qui suis un peu à la traîne. Je flâne avant d'arriver à Saint-Jean du Gard, où nous faisons une courte pause. C'est là que Stevenson s'était arrêté (et avait revendu Modestine, non sans un pincement au coeur: " Ses défauts étaient ceux de sa race et de son sexe; ses vertus lui étaient propres." écrivait il...) mais nous, nous continuons jusqu'à Alès sans prendre la voiture hypomobile...Silvère, notre Modestine à nous (bon il n'a pas les mêmes qualités ni les mêmes défaut que l'original...) nous quitte là, appelé  à son devoir professionnel sur la côte d'Azur. Nous poursuivons notre chemin. Le chemin est de plus en plus tortueux et devient franchement caillouteux au-dessus d'Alès.Après un regard sur le beau panorama dominant la vallée, nous tentons de ne pas perdre trop le chemin qui est assez mal balisé. Je me sens tout de même un peu fatigué mais bon la fin est proche. Le vent est tombé et la chaleur est là. Nous terminons devant la gare d'Alès cette belle semaine de course, placée sous le signe de la découverte, de la France profonde et de l'amitié.
Les images très bientôt!

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