J’avais étudié « Le Festin de Babette » du même auteur en classe de 2nde. Je n’en gardais pas un souvenir ému mais la collection Folio Deluxe qui embellit depuis quelques années ma bibliothèque, m’a poussée à lire l’ouvrage peut-être le plus connu de Karen Blixen.
C’est long. Très long. Plus de 500 pages interminables pour celles et ceux qui ne sont pas plus friands que ça d’anthropologie. Sur bien des points, j’ai eu l’impression de relire une resucée de « Moby Dick » à la sauce saga Africa. Point de romanesque ou de sentimentalisme ici mais plutôt un inventaire de la faune et de la flore kenyane, conséquence de l’époque (XIXè) et des origines danoises de l’auteure, pays au combien respectueux mais qui est un général peu connu pour ses soirées bonga bonga à la Berlusconi.
Vous vous dites sans doute, à la lecture de ces quelques lignes, notamment si vous n’êtes pas forcément scientifiques dans l’âme, que ce livre n’est pas fait pour vous. Que nenni car il y a dans cet ouvrage, bien d’autres intérêts. On est ici bien loin du concept de la négritude cher à Césaire et à Senghor… Nous assistons aux relations in vivo entre ceux que l’on appelle encore « les nègres » et les occidentaux au début du siècle dernier. Les premiers sont alors les esclaves des premiers mais aucune once de racisme ici. Leurs coutumes semblent forcément étranges aux « Blancs » mais tout nous est ici décrit avec une grande véracité, sans moquerie aucune. Pas de violence ni de rapports abusifs dans ces relations mais plutôt beaucoup de respect.
On peut également être dérangé si on a comme moi, un petit coeur estampillé « 30 millions d’amis« , par les liens entre les animaux et les humains somme toute un peu… barbares. Mais là encore, c’était ainsi que cela se passait alors. Il faut savoir quelques fois savoir lire avec d’autres yeux que ceux du lecteur de 2011.
Une des autres forces du livre réside dans le féminisme de Karen Blixen. Pas un féminisme artificiel ou forcené mais plutôt un féminisme que je qualifierais « de terrain« . On se doute que ce ne fut pas facile pour une femme de cette époque de tenir une exploitation de cette ampleur et de réussir en même temps, à faire face aux autorités locales. Et pourtant, elle y arrive parfaitement, obtenant le respect de tous, sans jamais faire preuve de faiblesse et sans jamais utiliser non plus sa condition féminine comme circonstance atténuante.
Pour résumer, je ne placerai pas « La Ferme africaine » dans mon Panthéon personnel mais ce livre mérite d’être lu ne serait-ce que pour le fait qu’il appartienne aux grands classiques de la littérature.