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Fable politique contemporaine

Par Borokoff

A propos de Détective Dee : Le mystère de la flamme fantôme de Tsui Hark 4 out of 5 stars

Fable politique contemporaineEn 690, dans la petite ville de Chang-An, la régente Wu Ze-tian s’apprête à être couronnée impératrice de l’Empire chinois. Mais une série de meurtres aussi étranges que barbares menace l’intronisation de Wu Ze-Tian (Carina Lau). La future impératrice décide, malgré ses réticences, de faire appel à un ancien rebelle du régime emprisonné depuis huit ans : le juge et détective Dee (Andy Lau).

Les premières images de Détective Dee : Le mystère de la flamme fantôme augurent du souffle épique qui règne tout au long du nouveau film de Tsui Hark, inspiré de la vie du véritable Détective Dee (603-670), chancelier sous le règne de l’impératrice Wu et devenu un véritable légende en Chine (son nom originel est Di Renjie). En Europe, Dee a été popularisé par les romans d’un diplomate néerlandais, Robert Van Gulik dans les années 1950-1960, qui en a fait le héros de ses livres.

Détective Dee : Le mystère de la flamme fantôme est un spectacle d’une beauté époustouflante, un ballet chorégraphié de deux heures qui mêle habilement les genres, du thriller au mélo en passant par la fable politique et le fantastique. Tant de beauté est renversant. Si Détective Dee : Le mystère de la flamme fantôme est aussi réussi, c’est qu’il s’appuie d’abord sur une mise en scène et des acteurs solides (Andy Lau, Carina Lau mais aussi Tony Leung Ka Fai et Chao Deng, alias le juge péroxydé Bei Donglai). Tsui Hark n’est plus un cinéaste que l’on présente mais il signe là l’un de ses meilleurs films sans doute. Le plus maîtrisé en tout cas.

Privilégiant le suspense et les rebondissements, l’intrigue de Détective Dee : Le mystère de la flamme fantôme se situe sous la dynastie Tang (608 à 907). Wu Ze Tian doit être couronnée Impératrice (ce sera la seule Impératrice dans l’Histoire de la Chine) mais une série de complots ourdis par des conspirateurs maléfiques va ébranler son pouvoir. Wu fait alors appel à un banni du régime qui lutta autrefois contre son ascension et le pouvoir despotique qu’elle mir en place. Car pour arriver au trône, Wu n’a pas hésité à faire assassiner ses adversaires, ce que lui reproche Dee, emprisonné depuis huit ans.

Fable politique contemporaine

L’intrigue est palpitante, qui nous plonge dans une Chine admirablement reconstituée (en 3D notamment). Les décors et les tenues très colorées de la Cour font contrepoint au bazar sous terrain du « marché fantôme ». Les victimes de ceux qui conspirent contre l’Impératrice sont les architectes d’une immense statue de Bouddha qu’elle souhaite ériger en bordure de son palais. Elles meurent en s’embrasant mystérieusement, la faute à des scarabées porteurs d’un venin mortel.

Il y a un sens du récit incontestable chez Tsui Hark, un mélange des genres qui enchante. On trouve à la fois de la poésie dans les chorégraphies qui émaillent le film (les décors de la forêt rappellent ceux de Le secret des poignards volants), une ambiance de conte (avec les cerfs parlants), de mélo (sentiments ambivalents entre Dee et la servante de Wu) et de fantastique (décors mouvants et baroques). Les arabesques que dessinent les personnages dans l’espace renvoient aux cercles concentriques du pouvoir et aux intrigues de la Cour comme les volutes et la trace très colorée laissée par les vêtements de la servante de Wu dans l’air. La forme du bazar fantôme lui-même, véritable labyrinthe, fait écho aux nœuds du pouvoir et à la complexité des différents jeux politiques entre les clans.

Mais le pouvoir d’évocation de Détective Dee : Le mystère de la flamme fantôme, on pourrait dire d’envoûtement est un résultat d’ensemble. Amalgame réussi entre sa mise en scène, son suspense, son univers visuel (couleurs, ambiance de ses décors, chorégraphies) et le jeu de ses acteurs, Andy Lau et Bingbing Lee (la servante de Wu) en tête. Mais là où Tsui Hark est le plus remarquable, c’est dans la fable politique et contemporaine qu’il livre. Dee est un ancien opposant politique revenu en grâce. A la fin du film, il explique à Wu qu’en faisant régner un climat de terreur et de répression, elle a mis le peuple au bord du gouffre, le pays au bord de l’implosion. Dee accepte de se mettre au service de l’Impératrice à une condition : c’est qu’elle cesse les exécutions arbitraires d’opposants et devienne une impératrice qui tout en restant ferme et juste, agisse dans le bien du peuple. A bon entendeur…

www.youtube.com/watch?v=_41e5lOpY9g


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