Les cristoliens flânaient au bord de leur lac sans soupçonner la fébrilité qui animait la Maison des Arts de Créteil (94). L’endroit se préparait à célébrer pour la seconde année consécutive la cérémonie des Molières que la grande famille du théâtre attend avec autant d’émotion que celle du cinéma pour les Césars.
Rien ne laisse présager qu’un coup de théâtre aurait pu se produire à quelques dizaines de mètres du boulevard de la Croisette, puisque c’est bien ainsi que se nomme l’allée d'où j’ai pris cette première photo d’une série de presque 150 dont je ne publierai que les plus intéressantes de mon point de vue (et dans plusieurs billets abordant différents moments de la cérémonie).
L’an dernier j’étais assise dans la salle et j’ai suivi la soirée en tant que spectatrice. Cette fois je suis debout, parmi les photographes accrédités pour la manifestation, et je suis restée jusqu’à la fin en coulisses. La perspective est radicalement différente.
Je vais essayer de vous faire vivre les choses autrement qu’elles vous ont été montrées sur votre écran de télévision, sans adopter non plus le langage convenu que vous pourrez lire dans les magazines.
Créteil est quand même un peu le bout du monde comme le dit l'animateur de la soirée Laurent Lafitte, même pour la banlieusarde avertie que je suis. Le dimanche les bus fonctionnent au ralenti. Il est prudent de prévoir deux heures de route par les transports en commun. Ne comptez pas sur le conducteur pour vous orienter, ni sur les habitants. C’est à se demander quel est le public de cette salle de spectacle. Odette fut providentielle pour me faire économiser quelques centaines de mètres et rejoindre directement la terrasse.
Il était 18 heures. La lumière était encore vive. Les photographes se disputaient ce qu’ils croyaient être les meilleures places juste devant les portes de verre. Je m’installais toute seule en haut de l’escalier recouvert du tapis rouge, m’assurant le calme et une vue plongeante sur les arrivées (face à moi) et, en pivotant, sur les conversations entre professionnels (derrière moi).
Andrée Damant, merveilleuse comédienne à l’affiche à Montparnasse, est arrivée parmi les premières et, le temps que j’échange quelques mots avec elle à propos de son rôle dans Au nom du fils qu’il est urgent d’aller voir au Théâtre de poche, la meute des photographes s’était agglutinée autour de moi sans ménagement.
Ma présence étonnait les plus aguerris qui commençaient à être mi-amers, mi-agressifs : c’est à cause de gens comme vous, les bloggeurs, qu’on perd notre boulot ! Cela reste à voir parce que un bon tiers ne connaissait pas les invités et fallait voir comme ils étaient contents que je leur souffle les noms, les orthographes, la catégorie dans laquelle ils étaient nominés, leur cursus … même qu’à la fin j’ai demandé en riant si je ne pouvais pas prétendre à toucher des droits.
On a donc pactisé. Je les laissais mitrailler, ce qui n’est pas ma méthode pour obtenir un scoop. Je regarde avant de déclencher. Je ne veux pas être noyée sous les clichés. Et comme me l’a conseillé Sabine Weiss c’est le cadre qui compte. En échange ils ne m’ont pas éjectée, loin de là, même si parfois je devais courber l’échine pour me glisser dans une petite fenêtre, comme on s'en rend compte ci-dessous.Fallait les entendre crier une fois que j'avais soufflé à ceux qui débutent dans le métier le prénom de la comédienne ou du comédien : Fanny ! Fanny ! Fanny ! Fanny ! à droite, à gauche, encore, s’il-vous-plait Fanny, au moins 50 fois, avant de tout à coup paniquer, mais c’est qui qu’est à coté d’elle ? Son fils, Maxime.
Et les revoilà à crier de plus belle, Maxime, Maxime, Maxime ! Fanny, plus près de Maxime ! merci Fanny ! Les plus jeunes demandaient Fanny qui ? Mais Cottençon bien sûr !
C’est là qu’on voit qu’on a vieilli, quand on doit expliquer qui sont Evelyne Pagès, Patrick Préjean, Daniel Russo (venu avec sa fille Charlotte), et même Jacques Toubon (ancien ministre de la justice, marié depuis presque 30 ans à Lise, que les photographes people aguerris n’hésitent pas à appeler familièrement Lison).
TF1 programmait en seconde partie de soirée le film Paparazzi que j'avais le sentiment de vivre en "live". J'ai évité aux photographes de "passer à coté" de Julien Sibre que j'avais repéré sur la dalle et que je leur ai présenté.
Heureuse initiative puisque l'auteur-metteur en scène-comédien repartira avec 3 Molières.
Je leur dois à l'inverse de m'avoir renseignée sur des personnalités que je n'aurais pas reconnues sans aide, n'étant pas habituée à les voir de près. Comme la chanteuse Cecilia Cara, merveilleuse interprète de la comédie musicale Il était une fois Joe Dassin, Enzo Enzo, si radieuse devant Amanda Lear, ou la discrète Chloé Lambert qui alterne avec bonheur télévision et théâtre.
Pierre Lescure, avait annoncé une très belle salle à la conférence de presse d'annonce du palmarès. Il y eut néanmoins peu de vedettes ce soir, en dehors de celles qui étant nominées comme Julie Depardieu, Aurore Auteuil ou Valéria Bruni-Tedesci qui venaient avec l'espoir de se voir remettre le trophée et repartirent sans.
On vit apparaitre quand même quelques personnalités du grand écran comme Dominique Besnehard, ou du petit écran, des habitués de la Bande à Ruquier (Stéphanie Bataille et Eric Naulleau) ou de la scène comme Shirley et Dino, Mathilda May avec son papa Victor Haïm, dont la pièce Jeux de scène, allait être jouée ce soir, Pascal Légitimus ...
Et puis des fidèles de la cérémonie, Annie Duperey, Brigitte Fossey, Danièle Evenou et sa bande d'amis.
Le soleil déclinait. Il était temps pour les invités de gagner leurs sièges puisque la retransmission allait avoir lieu en direct, et pour moi de descendre en coulisses. Dans le deuxième billet je vous montre les personnalités nominées et non récompensées. Le troisième reviendra sur la cérémonie proprement dite.