Les hiéroglyphes anonymes de l'âme désarmée.

Publié le 21 avril 2011 par Ep2c @jeanclp

Une fois n’est pas coutume, La Cité des sens attire votre attention sur la prochaine diffusion de la célèbre émission Répliques, conçue, animée et largement « soliloquée » par Alain Finkielkraut.

Samedi 23.04.2011 - 09:10

La culture : état des lieux

Invité(s) :
Pierre Jourde, écrivain, critique et enseignant.
Philippe Coulangeon, sociologue, chargé de recherches en sociologie au CNRS,

Un sociologue pour débattre de la culture avec un écrivain, critique et enseignant, Pierre Jourde, qui vient de publier C’est la culture qu’on assassine  dont la quatrième de couverture indique :

Les pouvoirs économique, politique, médiatique se conjuguent pour nous plonger dans une nouvelle barbarie : abandon de l'école publique, transformation des universités en monstres bureaucratiques, télévision avilissante, ruine des instituts culturels français, mépris affiché pour la littérature, journalistes usinant du cliché, promotion de faiseurs au rang de grands écrivains, mort de la culture populaire, disparition de l'esprit critique. Face à cette agression, tous les coups sont permis, notamment ceux de l'ironie.

A croire que Pierre Jourde est un pseudo de l’intransigeant vigile hebdomadaire de la barbarie à nos portes et de la Défaite de la pensée qu’est Alain Finkielkraut.

Ils seront donc à deux contre Philippe Coulangeon, qui fera office de sociologue de service au motif, sans doute, vient de publier Les métamorphoses de la distinction. Inégalités culturelles dans la France d’aujourd’hui.

Attendez-vous donc à entendre ceci :

Mais la réponse aux besoins essentiels de l’homme n’est pas seulement une affaire de chiffres et de statistiques. Dès qu’il est question de culture, les sociologues et les planificateurs interviennent avec une sorte d’arrogance et exercent un terrorisme qui s’appui sur un vocabulaire de spécialistes et sur des statistiques en apparence irréfutables. Les problèmes complexes et subtils d’épanouissement de la personne humaine sont littéralement vidés de leur contenu. Devant ces fiches, ces graphiques et ces organigrammes, ceux qui sont aux prises avec le drame quotidien de la culture populaire ressemblent aux parents du petit leucémique qui cherchent en vain à saisir la vérité de leur souffrance dans les hiéroglyphes anonymes qu’ils viennent de retirer au laboratoire d’analyses.

Pour être tout à fait juste, si vous entendez exactement ça, c’est que l’un des interlocuteurs a un peu trop fait dans le rétro et copié les propos tenus par Alfred Simon dans la publication du Théâtre de l’Est parisien, propos cités par un certain Jacques Delors, alors conseiller pour les affaires sociales au Commissariat au Plan, dans une intervention intitulée « Le planificateur face aux problèmes culturels » lors du Colloque de Bourges « Recherche scientifique et développement culturel » en novembre 1964.

Comme dirait Alain F. : c’était mieux avant !

J’ai parcouru « Les métamorphoses de la distinction. Inégalités cultuelles dans la France d’aujourd’hui » du sociologue de service samedi matin, prochain.

Il tente d’éclairer de manière rigoureuse « un certain désarroi à l’égard des vertus émancipatrices naguère prêtées à la démocratisation de la culture et de l’éducation ».

Au titre des explications théoriques de cette inefficacité relative du volontarisme politique (qui a pu récemment alimenter un certain discours sur la « culture pour chacun »), la plus connue est celle de Pierre Bourdieu, qui articule les concepts de distinction, de capital culturel, d’habitus…

Elle a été discutée, infléchie, nuancée, notamment par Bernard Lahire (L’homme plurielLa culture des individus…) que Coulangeon cite dans son chapitre 3, assez joliment intitulé De quel échec celui de la démocratisation de la culture donne-t-il la mesure ?

Comme d’autres, il invite à se défier d’une conception exagérément mécanique des héritages culturels :

Les goûts et les usages se forment ainsi sans la durée, au contact non seulement de l’environnement familial, mais aussi dans les diverses arènes de socialisation scolaire, amicale, amoureuse, professionnelle, etc. qui jalonnent des parcours de vie qui, quelque puisse être la force des phénomènes d’homogamie ou d’homophile sont toujours soumis à des influences hétérogènes. D’où l’importance parfois sous-estimée des différences de genre ou de génération notamment, ainsi que des clivages tout à fat significatifs qu’introduit la diversité des environnements géographiques et des types d’habitat, en particulier en France, où l’opposition Paris/province continue de marquer fortement la différenciation des comportements.

Sur l’importance parfois sous-estimée des différences de genre… je ne suis pas tout à fait d’accord. Il y a belle lurette que la revue Révoltes logiques, animée par Jacques Rancière, articulait la question de l’auto-émancipation des prolétaires et celle des luttes des femmes. Ou qu’un excellent auteur dont mon immense modestie m'oblige à taire le nom abordait la question, trop rarement posée il est vrai…

 

 Depuis 1964, depuis Les héritiers de Bourdieu, depuis la première édition de Répliques (c’est vrai, ça… ça fait combien de temps que ça dure la décadence ?), nos sociétés n’ont cessé d’évoluer et les coups de boutoir du libéralisme n’en finissent pas de brouiller les questions de l’émancipation individuelle et collective comme celle du sens de l’action artistique et culturelle ou celle de la domination masculine. Tous ceux qui prétendent traiter les unes sans se confronter aux autres ont, pour parler comme le faisaient jadis les situationnistes, un cadavre dans la bouche.

Le mouvement se développe (H/F… on en a parlé ici) qui remet en question la prédominance de H sur F dans le « champ culturel ». Mais gare à La tentation de Pénélope !


Belinda Cannone par franceculture

Voir aussi la tribune de Geneviève Fraisse : La raison des femmes est l’enjeu de la modernité.

  

REMARQUE : ceux qui fréquentent un peu régulièrement La Cité des sens  savent combien cette question de la différence des sexes est un sujet de prédilection de ce blog.

L'égalité des sexes se lève aussi à l'est. Egalité entre hommes et femmes dans les métiers de la culture--- Question de genres --- Diversité culturelle et stéréotypes sexistes --- Le sexe faible dans la cour des grands --- Du vivant spectacle de la domination masculine --- Où il est mon deuxième sexe ? --- Rois et Reine --- T’as trouvé ça où ? --- Question de genre --- La chose artistique (4) ---Bovary bat don Quichotte par KO debout --- 

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