"B.A. Ba" de Bertrand Guillot

Par Secriture @SEcriture

LIVRE VOYAGEUR (merci à Mathilde et aux Editions Rue Fromentin)


En 2008, Bertrand Guillot pousse la porte d’un cours d’alphabétisation pour adultes, dans le 20e arrondissement de Paris. Il s’apprête à donner son premier cours. Sa motivation est la même que celle de milliers de bénévoles en France : se rendre utile et abandonner les oeillères du quotidien. Ecrit à la première personne, rythmé par des chapitres courts, B a-ba a tout d’un récit d’aventure. Celle d’un « professeur » débutant, tout d’abord. L’auteur est poussé dans le grand bain sans méthode, ni conseils. Après tout, il sait lire, non ? B + A = ba ? Pas si simple. Le costume de « professeur » taille soudain grand face à des « élèves » qui ont bien souvent vécu mille vies et Guillot prend soudain conscience de l’ampleur de la tâche. Le plus sage serait sans doute d’abandonner sur le champ. Il y pense. Pourtant… Sans vraiment se l’expliquer, il va poursuivre ses cours (il en donne toujours aujourd’hui) et vivre un an avec ses élèves, au rythme des joies et des désillusions. Une année dont il a tiré un livre : B a -ba. Cette force de volonté anime le livre. B a-ba n’est jamais larmoyant ou accusateur. Les cours sont l’occasion de dialogues drôles. Les situations sont vues avec un regard réaliste, jamais simplificateur, qui évoque parfois Entre les murs. Car B a-ba est avant tout le récit d’une aventure humaine. La majorité des élèves travaillent, sans papiers, en France. Au fil des cours, l’auteur découvre leurs destins. Chômage, identité nationale, intégration… c’est l’actualité du pays qui défile avec un éclairage nouveau : celui d’hommes et de femmes qui pensent que tout peut changer s’ils apprennent à lire et à écrire.

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B.A.-Ba, c’est un « journal de bord », un reportage, une expérience de vie fascinante. On s’attache à l’histoire et l’on souhaite vraiment que les personnages (les personnes plutôt, puisqu’ici tout est « réel ») lisent. On se réjouit de leurs victoires, s’émeut de leurs échecs.

C’est aussi avec effroi que l’on prend conscience que l’illettrisme est un phénomène important en France, et trop souvent négligé. En effet, 3,1 millions d’hommes et de femmes sont analphabètes en France. Un chiffre vraiment impressionnant... 

Cependant, il serait naïf de croire que l’on apprend de la même manière à 6 ans qu’à 30. On le ressent bien à la lecture de ce roman : malgré toute la volonté du monde, Amah, Bah ou encore Ibrahima devront s’accrocher pour réussir à lire un texte.

(Il faut dire aussi que la langue française n’est pas des plus simples... enfin passons...)

En tout cas, je dois avouer que j’ai été surprise de la facilité de la lecture de ce roman. La lecture est en effet prenante et les chapitres vraiment très courts. C’est donc sans s’en rendre compte que défilent les 200 et quelques pages.

(le seul bémol étant quelques mégardes : fautes de frappe ou d’orthographe).

Pour finir, je dirais que cette lecture est vraiment très instructive, intéressante et agréable. Les brides de vie que l’on apprend sur chacun et chacune sont touchantes, parfois drôles, toujours sincères.

Bertrand Guillot a une plume très « orale » sans être bâclée, un style fluide et simple. J’ai vraiment beaucoup apprécié !

Fixer l’horizon pour mieux franchir les obstacles.

p.98