Jérémy Ouisse (au centre) s'est intéressé au monde des mineurs chiliens
L’épopée des 33 mineurs bloqués durant 69 jours sous terre a fait parler d’un monde disparu en France mais encore très prégnant au Chili : celui de la mine. Véritable colonne vertébrale économique du pays, le cuivre a fait – et fait toujours les grandes heures de l’exportation chilienne. Une manne dont le pays ne peut se passer. Alors, le précieux métal est exploité à tous crins. Les hommes aussi avec de nombreux dérapages dont l’illustration la plus frappante a marqué l’année 2010 (Chili et carnets en a parlé ici, ou encore là). Mais ce qui frappe les esprits, c’est la fierté des mineurs. Leur sentiment d’appartenir à une grande famille, leur respect plus que leur crainte pour ces galeries obscures où la mort peut frapper à n’importe quel instant.
Dans un documentaire tourné en 2009, donc bien avant la catastrophe de San Jose, le Français Jérémy Ouisse a suivi des mineurs chiliens dans leur quotidien. Et a capté cette ambiance si particulière dans ce métier si particulier. Pour la première fois, ce mercredi 20 avril, son docu Le salaire du Chili est diffusé à la télévision. Sur France Ô à 20h35.
« Pour des raisons personnelles, je me suis attaché à ce pays, explique le jeune réalisateur. Lors d’un voyage, j’ai découvert la mine de cuivre El Teniente. » Il s’agit de la plus grande mine souterraine du monde à 120 km au sud de Santiago. Jérémy Ouisse se passionne pour le site, son histoire. « J’ai voulu aller plus loin et filmer les mineurs dans leur descente à la mine, capter leur état d’esprit. J’ai obtenu les autorisations pour descendre avec eux. »
Mais il ne s’arrête pas là. Le réalisateur rencontre des historiens chiliens et des mineurs, affine ses connaissances, met en lumière l’implication et les intérêts des Etats-Unis. La souffrance aussi des mineurs comme dans la séquence d’ouverture durant laquelle un ouvrier raconte, en pleurs, comment il a écrasé par accident un de ses amis avec une pelleteuse titanesque.
L'équipe du "Salaire du Chili" a pu descendre avec les mineurs et filmer le travail et les dangers de la mine (photos avec l'autorisation de Jérémy Ouisse)
Dans les mines, larmes et sourires ne sont jamais très loin. Les mineurs et leurs proches forment une communauté qui se comprend à demi-mots. Il y a encore peu de temps, des cités ouvrières poussaient là où le cuivre apparaissait. Près d’El Teniente, créée en 1905, elle s’appelait Sewell. « La ville la plus moderne du Chili pour l’époque. Elle avait cinquante ans d’avance », s’enthousiasme Jérémy Ouisse qui est allé à la rencontre d’anciens habitants, récolter leurs souvenirs émus. La ville a périclité au début des années 70, plus précisément après le 11 juillet 1971, date à laquelle le cuivre a été nationalisé. Gardiennes de souvenirs et de tragédies – comme la Tragedia del humo qui, le 19 juin 1945, a vu mourir 355 mineurs, intoxiqués par du monoxyde de carbone -, les antiques bâtisses ne sont plus qu’un passage obligé pour les touristes. Mais pour les « anciens » c’est un pan de leurs vies.
Proche de l’humain et didactique, Le salaire du Chili témoigne d’une réalité que l’actualité récente n’a fait qu’effleurer. Passionnant.
Le salaire du Chili, de Jérémy Ouisse (production Made in Frog), 52 minutes, diffusé ce mercredi 20 avril à 20h35 sur France Ô. A noter, le documentaire est aussi visible en ligne juste là.
Entre passé et présent, Jérémy Ouisse brosse le portrait d'une mine, d'une communauté
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