En ces temps de catastrophe(s) nucléaire(s) et de débat pré-présidentiel, ces quelques lignes prennent une saveur particulière :
«Je ne crois pas que l'humanité renoncera à l'énergie nucléaire. J'irai plus loin : je ne pense pas qu'il soit souhaitable qu'elle y renonce. ... C'est pourquoi je propose que les pays développés, ceux en tout cas qui disposent de cette culture de la qualité en matière industrielle et qui cultivent l'objectif du "zéro défaut", fassent l'effort nécessaire pour développer, sur leur territoire, une production importante d'électricité d'origine nucléaire.»
Leur auteur est un certain Dominique Strauss-Khan...
Le dernier publi-reportage diffusé récemment sur CanalPlus [1] a complétement omis ces lignes extraites de "La Flamme et la Cendre". Il ne peut s'agir que d'un oubli, certes regrettable, tant cette information est indispensable pour se faire une idée plus précise de ce grand économiste qui contraint une partie de l'Europe à appliquer des politiques néo-libérales, synonymes de catastrophe économique et sociale là où elles ont été appliquées, de ce grand démocrate qui vantait encore récemment la politique du camarade socialiste Ben Ali, et de cet immense visionnaire qui fut un travailleur du nucléaire !
Par travailleur, n'entendez pas par là qu'il œuvra au cœur d'une centrale, mais qu'il fut, plus modestement, un "consultant" :
«Un des pionniers modernes du trafic d'influence est Dominique Strauss-Kahn, directeur en 2010 du Fonds monétaire international. Il était en 1991-1992 ministre français de l'Industrie. Revenu à la vie civile, il est transformé en consultant offrant ses services, bien rémunérés, aux grandes entreprises dont il était précédemment le ministre de tutelle.»
Un jour, au service des intérêts du secteur privé, le lendemain au service de l'intérêt général, un autre jour... des allers et venues public-privé qui caractérisent les mœurs du monde néo-libéral :
«La confusion des genres atteint son summum avec son contrat pour Électricité de France (EDF). Celle-ci voulait développer un nouveau type de réacteur dit EPR avec l'Allemagne, mais s'inquiétait de la position du SPD, le Parti social-démocrate, dans un pays où les écologistes étaient influents.»[2]
La Cogema l'engage pour 600.000 francs soit plus de 92.000 euros :
«Il joue de son double carnet d’adresses pour organiser une série de rencontres discrètes à Düsseldorf et à Strasbourg, mêlant à la fois des députés (ou ex-députés) socialistes français et des élus sociaux-démocrates allemands. Très intéressée par cette prestation, la Cogema - qui produit les combustibles nucléaires - accepte de cofinancer l’opération avec EDF. »[3]
Notre grand socialiste "travaille" aussi bien le côté allemand, Gerhard Schrôder, futur chancelier, et le leader écolo futur ministre Joschka Fischer, que le coté français, Pierre Moscovici, Gérard Fuchs, Jean-Yves Le Deaut, Philippe Bassinet, Christian Bataille, Élisabeth Guigou et Henri Nallet...
Ce lucratif travail de lobbyiste cesse lorsque la gauche retourne aux affaires. Lionel Jospin le nomme ministre de tutelle de ses anciens (futurs ?) employeurs ! Il en faut du caractère, mes ami-e-s, pour rester impartial et juste !
Tous ces liens, ne tombons pas dans la vulgarité, n'est-ce pas, en évoquant les 1,6 millions versés par EDF, n'influencent-ils pas, même inconsciemment, la pensée et la pratique politique du grand homme ?
« Pour moi, il n'y aurait pas de scandale à ce que la chaire de physique nucléaire de Paris-VI soit financée par EDF, si EDF trouve que c'est bon pour son image. Mais ce n'est pas dans les mœurs. »Libération, 19 septembre 2006 [4]
Ami socialiste, qu'en dis-tu ?
Notes
[1] Un an avec DSK
[2] Hervé Kempf - l'oligarchie ça suffit, vive la démocratie
[3] S-EAU-S : Le lobby nucléaire en terre socialiste. Quand Dominique Strauss-Kahn travaillait pour EDF.
[4] Jean-François Dumas Blog - Du FMI à l'Élysée?