Si on trouve parfois que la gestion de nos finances publiques laisse à désirer, ce n’est rien comparé aux États-Unis.
Les élus américains devront bientôt voter pour le relèvement ou non du plafond de la dette des États-Unis. Il faut relever cette limite pour que le gouvernement puisse continuer à emprunter, faire fonctionner l’État et honorer son service de la dette. Si le « non » l’emporte, une nouvelle crise financière et un « vrai chaos » nous attendent, selon le patron de la réserve fédérale, Ben Bernanke.
Plusieurs élus républicains refusent de relever ce plafond encore une fois — on l’a relevé six fois depuis 2006 ! Leur appui viendra seulement en retour d’importantes concessions de la part de la Maison Blanche en regard aux futures dépenses de l’État.
On peut comprendre leur inquiétude. La dette publique américaine dépasse aujourd’hui $14.000 milliards. C’est environ $45.000 pour chaque homme, femme et enfant au pays. Plus inquiétant encore : cette dette a doublé depuis 2000.
On « ferme » le gouvernement
On a failli « fermer » le gouvernement la semaine dernière. Des centaines de milliers de fonctionnaires auraient eu à rester chez eux. Des agences, des bureaux et des parcs auraient fermé leurs portes temporairement. On aurait suspendu la paye de militaires qui se sacrifient à l’autre bout du monde. Tout ça, parce que les élus démocrates et républicains ne s’entendaient pas sur les coupures à effectuer dans le gouvernement. Les deux partis se sont finalement mis d’accord : des coupes de $38 milliards. Ça a l’air gros comme ça, $38 milliards. Mais c’est à peine plus de 1% du budget américain.
Sauf que le bureau du Budget du Congrès américain (CBO), un organisme indépendant, a révisé ces chiffres. Selon l’Associated Press, le CBO calcule que les vraies coupures pour l’année fiscale — quand on exclut les tours de passe-passe comptable — vont plutôt tourner autour de… $352 millions.
C’est un peu comme si une famille au revenu annuel de $60.000 $, endettée à mort, décidait de réduire ses dépenses de… $6.
(Dessin de presse : René Le Honzec)
Des choix douteux
Les gouvernements américains successifs ont creusé un trou énorme. Le plus triste (ou révoltant), c’est que pour s’en sortir, les politiciens proposent maintenant de couper, entre autres, dans l’aide alimentaire à l’étranger, les programmes environnementaux, les soins de santé aux jeunes mères et à leurs enfants. Ils veulent également revoir le filet social américain, notamment les programmes Medicare et Medicaid.
Mais que demande-t-on aux banquiers de Wall Street ? Comme le fait remarquer le gestionnaire de portefeuille Paul Dontigny, on attend toujours une mesure qui ferait supporter une partie du fardeau aux institutions financières qui ont contribué à nous plonger en crise.
Rappelons que la banque centrale (la Fed) a dépensé environ un billion et demi ($1.500 milliards) depuis deux ans pour acheter aux grandes banques leurs dettes les plus « toxiques ». Le gouvernement américain a aussi allongé des centaines de milliards pour sauver les banques comme Goldman Sachs ou Bank of America. Et la plupart de ces grandes banques viennent de connaître les deux années les plus profitables de leur histoire.
Pendant ce temps les contribuables américains vont se faire couper des services — austérité oblige ! —, et seront probablement forcés de renflouer à nouveau ces banques si l’économie rechute.
On se lamente beaucoup au Québec (moi le premier) sur l’État de nos finances publiques et sur les choix douteux de nos politiciens. Mais quand on se compare, on se console.