A-t-on pris à Sainte Périne
Tous ces dictateurs impotents?
Leur ton dolent, leur voix chagrine
Déconcertent les combattants
On les voit, quand la France expire
Reboucler avec onction
La muselière de l'Empire
A notre Révolution.
Le peuple sent qu'il est trahi,
C'est trop aboyer à la lune,
L'Hôtel de ville est envahi,
Paris proclame la Commune.
Sont-ils idiots ou complices ?
Leur comité, peuplé d'ânons,
Brait quand on parle d'armistices,
Et fond, à regret, les canons.
Morigénant la populace,
Qu'ils craignent plus que l'étranger,
Ils laissent, dans leur main molasse,
Quatre-vingt treize se figer.
L'accapareur, âpre vermine
Fait le vide dans les marchés,
Et, souliers percés, la famine
Fait queue aux portes des bouchers.
Révoltez-vous sombres familles,
Vous, meurt-de-faim, toujours déçus.
Éclatez comme des torpilles,
Puisqu'on veut vous marcher dessus.
Chez les chamarrés, rien ne bouge.
Va-nu-pieds, marchons de l'avant,
Nommons une Commune rouge,
Rouge comme un soleil levant !
Quittons la tactique enclouée
De nos généraux de carton,
Nous irons faire une trouée
Guidés par l'ombre de Danton.
Et, dès ce soir, ivresse folle,
Favre et Trochu sont conspués;
Paris danse la Carmagnole
Autour des murs évacués ;
Et l'on verra la plèbe saine,
Traquant les francs-fileurs bourgeois,
Brancher la race des Bazaine,
A tous les vieux chênes gaulois.
- date : 1870.
- texte : Eugène Pottier.
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