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"Ou comme un feu sans feu, sans futur ni passé,
le corps est si léger qu'il semble flotter sur les heures arrêtées,
dans l'étincellement du matin,
je l'appelle le présent, ce feu, il est partout,
il est insaisissable, le main se tend, ne touche rien d'autre que le vide,
une sorte d'ombre claire,
l'envers des choses qui s'effacent et elles jaillissent,
dessinent sur les yeux le leurre de la présence,
je sais qu'elles ne sont pas et pourtant je prononce leur nom,
ce souffle d'air qui les fait durer un peu le temps de croire
que plus que moi elles demeurent
peuplant l'espace que je traverse et que je laisse, .../..."
"Autour de toi toutes les choses sont à leur place et luisent,
mais est-ce entre elles ce qui les sépare,
les réunit, l'intervalle dis-tu, c'est ça, oui,
l'entre ce qui vient et ce qui s'en va,
ce léger éclat, celui contre la vitre d'un paysage et sa bruine solaire,
ses collines, son ciel,
avec ce tremblement de feuilles et cette lumière
qui ressemble à l'enfance puisque tout lui ressemble
quand tu n'en finis pas de la perdre, la trouver,
tu dis à peine mais l'eau déjà emporte l'eau,
ce que tu veux, c'est poser tes mots comme des pierres
pour pouvoir y marcher lentement dans le courant,
que plus rien ne puisse t'emporter que ce désir d'être,
malgré tout, était-ce bien ce qu'il disait,
il regardait ses doigts, le jour avait des couleurs changeantes,
et lui montrait sur la vitre le rayon de soleil oblique, .../..."
extraits de: Chant III et Chant II -"L'identité obscure- de Jacques Ancet-Editions Lettres Vives-
photos: Laurent Laveder