Une fois n'est pas coutume, il faut parler, sur ce blog, de l'opposition à Nicolas Sarkozy plutôt que du monarque lui-même. Depuis des mois, une sale musique se répand sur le Net et ailleurs, celle d'une collusion rampante entre le Front National version Bleu Marine et quelques opposants radicaux.
Disqualifier une fraction de l'opposition pour laisser la place aux candidatures « raisonnables » est un vieux stratagème. Il est vrai que Nicolas Sarkozy attire les foudres et les critiques de toutes parts. Il suffit pourtant de trier le grain de l'ivraie.
Monarque impopulaire
On peut sans conteste affirmer que Nicolas Sarkozy est impopulaire depuis l'automne 2007. Sans attribuer une importance plus démesurée que cela aux sondages, de nombreux indices concordants (éditoriaux, presse, etc) - comme dirait la justice - laissent à penser que le déclic s'est fait là, très tôt, trop tôt. Depuis, Nicolas Sarkozy a perdu toutes les élections intermédiaires. Il suscite scepticisme, rancoeur voire révulsion auprès d'un nombre croissant d'électeurs. Ses quelques proches ont eu beau jeu, à plusieurs occasions, de faussement s'inquiéter de cet anti-sarkozysme primaire. Leur Monarque adore cliver l'opinion, les voici pourtant qu'ils protestent du retour de bâton. Ainsi, le 30 mars dernier dans l'Express, Henri Guaino se demandait encore « si l'antisarkozysme ne rendait pas fou.»
L'antisarkozysme est devenu une franchise politique protéiforme. On y trouve de tout : des résistant(e)s des premiers jours aux indulgents reconvertis en opposants, d'anciens collaborateurs devenus sceptiques aux soutiens devenus inquiets. En 2011, toutes les bonnes âmes si rapidement séduites par une collaboration « neutre » avec le Monarque d'alors sont devenues de farouches opposants. On hume, à tort nous semble-t-il, le parfum d'une victoire promise.
Mais l'irruption du phénomène Marine Le Pen dans le paysage politique depuis 6 mois a modifié certains comportements. On s'inquiète d'un nouveau 21 avril, avec inquiétude. Evidemment, les opposants se disputent. Le scrutin présidentiel approchant, les positionnements se précisent, les conflits se font plus virulentes.
On se bat pour la peau de l'ours alors que Nicolas est encore là.
L'opposition nauséabonde
Contre Sarkozy, certaines critiques sont effectivement nauséabondes. Celles qui attaquent « Sarkozy le sioniste », fustigent « Sarkozy le juif », frisent et dépassent largement les bornes de l'antisémitisme. Elles sont ignobles, stupides et contre productives. Ces sales relents d'une France rance se lisent partout, y compris dans les commentaires de certains blogs ou de journaux. Y compris sur Sarkofrance, y compris chez des gens qui se pensent encore à gauche.
On trouve de tout contre Sarkozy. Sa complaisance à l'égard de la politique d'Israël suscite les pires dérapages. Certains s'appellent facilement antisioniste pour masquer leur antisémitisme. L'atlantisme du Monarque Nicolas a également attiré les révisionnistes et complotistes en tous genres; celles et ceux qui pensent encore que l'Amérique ce grand Satan est capable de tuer 3000 des siens dans les Twin Towers de Manhattan le 11 septembre pour conforter sa domination mondiale. Ces hurluberlus s'appellent Reopen11 ou le réseau Voltaire. On y trouve facilement, à portée de main, quelques dérives sur DSK et Sarkozy et leurs prétendues allégeances respectives à Israël.
Bleu Marine, ou chemises brunes
D'autres opposants - parfois les mêmes - s'imaginent que Marine Le Pen pourrait être la meilleure opposante à Nicolas Sarkozy. Il faut donc le répéter. Marine Le Pen, son Front National, ses sbires, ses skin-heads qui cachent leur bras levé, ne sont pas nos adversaires. Ce sont nos ennemis, celles et ceux, dans le spectre politique de gauche à droite, contre lesquels il ne faut envisager rien d'autre qu'un combat direct et sans dialogue, dans une clairière ou ailleurs.
Le Front national, ses sbires, ses patrons, sont les seuls à n'inspirer que l'irréparable. Marine, comme hier son père, est à la lutte sociale ce que le hamburger à la gastronomie. Une imposture dotée d'un sale arrière-goût.
A celles et ceux qui seraient tentée par le discours brusquement social d'une Marine, il suffit de lire le site officiel de l'officine frontiste. L'exercice est aisé. Les textes sont aussi courts que les idées. On y trouve une dénonciation de « l’ère mythique de la démocratie sociale », on y critique « la gestion dite paritaire a fait la démonstration de son impuissance ». Rien n'a changé. On y prône toujours la « suppression des allocations familiales pour les non-nationaux ». On exige l'augmentation de 35% des cotisations sociales maladie et chômage sur les salaires des étrangers. Faudrait-il exiger le port d'un insigne afin qu'on les reconnaisse dans l'usine ? De ses sales propositions, le Front national de Marine Le Pen espère trouver 5 milliards d'économies. Est-ce tout ? D'où vient ce chiffre ? Nul ne sait. On se précipite alors sur la rubrique « acteurs économiques et emploi » pour poursuivre cet examen des propositions de la Marine. Et que lit-on : « » On reviendra donc. Le FN a bientôt 40 ans. Et il nous faut attendre « quelques jours » depuis quelques mois pour connaître ses propositions contre le chômage...
Continuons « l'analyse » du programme économique frontiste. Sur les retraites, la sociale Marine a de belles mesures à proposer, pour garantir 40 années de cotisations et pas une de plus : la sortie de l'Union européenne ( « 19 milliards d’euros versés chaque année à Bruxelles, et 12 en retour, pour quel résultat ? » ), la fin de l'immigration, « dont le coût est évalué à 60 milliards d’euros par an », et, évidemment, la « fraude sociale », un grand dada du Monarque Sarkozy actuel : « 10 millions de fausses cartes vitales en circulation, qui aura le courage de s’y attaquer ? ».
Faut-il continuer ? Lisez donc cet instructif article de MyEurop.
Amalgames faciles
Une autre fraction, radicale, de l'opposition est aux antipodes de la faction frontiste. Certains tentent pourtant de la coller à la « bande à Marine.» Le procès est facile. Les succès médiatiques, et électoraux, de Jean-Luc Mélenchon lui ont valu d'être assez rapidement traité de populiste. On connaît l'antienne. Ses éclats de voix, sa faconde efficace, ses attaques souvent violentes contre une réalité qui ne l'est pas moins, lui ont attiré nombre de critiques dont une, agaçante car hypocrite, visait à l'amalgamer avec le populisme du Front national.
Une récente salve mélangea ainsi quelques grandes figures de la réacosphère avec d'autres représentants de l'opposition antisarkozyste. Philippe Cohen (rédacteur en chef de Marianne2) s'est ainsi vu alpagué dans un mauvais article d'Ariane Chemin du Nouvel Obs. Il dénonçait la critique moralisatrice antifrontiste. Et alors ?
A la différence de Philippe Cohen, je crois qu'il faut sans cesse répéter que celles et ceux qui sont tentés par le vote frontiste ne méritent que le combat et le mépris. La bêtise, quand elle devient dangereuse, n'appelle aucune tolérance.
A l'instar de Philippe Cohen, ou de Jean-Luc Mélenchon, je crois qu'il est un peu facile de se réfugier derrière des références à l'Occupation, ou une bouillie politiquement correcte pour dénoncer les exactions verbales de Marine Le Pen. La culpabilisation est un jeu un peu court et franchement inefficace. Cela permet de se donner bonne conscience, sur ses propres échecs, ses propres lacunes.
Plus généralement, j'ai lu ici ou ailleurs, que Marianne « dérivait ».
Vraiment ?