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La concordance des temps - Évelyne de la Chenelière

Par Venise19 @VeniseLandry
La concordance des temps - Évelyne de la ChenelièreNotre rédactrice de la Recrue, Catherine Voyer-Léger n'a pas son pareil pour relier et colorer chaque numéro de notre webzine. Encore ce mois-ci, son mot m'épate. Personnellement, comme je n'avais pas voté pour le titre de la Recrue du mois, j'ai couvert le premier roman de la très prolifique femme de théâtre Évelyne de la Chenelière en repêchage (3 repêchages à chaque mois)Exercice de jonglerie
« Avec une énergie loin du désespoir, lucide et vitale, Évelyne de la Chenelière explore dans son premier roman le gouffre qui éloigne et sépare, malgré eux, les êtres les plus semblables. »
Je suis assez d’accord avec cette assertion trouvée en quatrième de couverture. Ce qui n’est pas toujours le cas, vous en conviendrez. Mais l’affirmation peut être prise dans plusieurs sens, vous allez voir.
Ce qui m’a le plus charmée est indéniablement le style de l’auteure, ces tournures de phrases qui retentissent comme des vérités d’où l’on peut prélever à loisir maintes et maintes sentences qui font réfléchir. Il y a dans ce texte continu une pensée qui porte. Il est clair que la voix narrative mature a du vécu, de l’expérience et donc des opinions, et du talent pour les écrire.
Mais l’histoire, elle ? Comment se fait-il que je n’en ai pas encore touché mot ? C’est que la trame est bien mince. On suit les pas d’un homme à travers la ville, il se dirige vers la femme avec qui il a, ou a eu, une histoire d’amour. Elle l’attend dans un restaurant. Immobile dans son corps, mobile dans son esprit. Ils font chacun de leur côté le bilan de leur histoire de couple.
Abordons la forme maintenant. Je ne parle pas du style, mais comment est présenté le texte. Il y a trois parties dont je n’ai pas su détecter les contours. Il n’y a pas de chapitres. L’auteure donne la parole à un et à l’autre avec comme seule division un interligne de plus. Confondant. En tout cas, moi, j’ai été confondue, d’autant plus que l’on nous annonce des êtres semblables, tellement semblables que j’en ai perdu leur identité, leur individualité. Est-ce l’homme qui s’exprime, ou la femme ? Est-ce si nécessaire de faire la distinction ? Est-ce que cette confusion est désirée ou désirable ? Comme je ne peux répondre à ces questions, la confusion demeure. À moins que la réponse se trouve dans l’incipit ? « Je reste bouche bée devant la langue française qui a eu la fantaisie de donner un sexe à toutes les choses. »
On s’interroge sur tout dans ce texte et on répond à tout, sans trop en avoir l’air, avec cet art consommé du flou. Du trouble. Du troublé. Ce qui en fait un exercice de jonglerie pour amoureux des sens de la vie.
« Tu te souviens quand on répertoriait, ensemble, tout ce qu’il faudrait changer, et qu’il faudrait arracher les sexes de l’érotisme, les langues du langage et les biens de leurs propriétaires. Il faudrait extraire l’encre des livres, et l’ivresse des bouteilles, et la clarté de la lumière, et l’amour du cœur des hommes … »
À lire si on accepte le flou et d’être un peu floué sur l’histoire qu’on attendait.
La concordance des temps, Evelyne de la Chenelière, Leméac, 2011, 140 p.

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