Un week-end d'été, à l'orée des feuilles mortes
"Eva se demandait souvent ce qu'elle avait fait de sa vie jusqu'à ses quarante ans. Selon elle, ils lui étaient tombés dessus avant qu'elle atteigne réellement cet âge. Ils avaient sauté une, deux années, ils étaient peut-être mauvais en calcul. [...] Eva n'avait pas toujours été cette femme aux hanches creuses, aux épaules tombantes, au dos très légèrement tassé qui signifiait à ceux qui la regardaient : Vous n'aurez rien, vous ne verrez rien. Pas le début du commencement de ma poitrine, pas plus qu'un morceau de la voûte de mon ventre.
A vingt ans, elle était, disons pulpeuse."
Michel est chirurgien esthétique. Il reçoit ainsi régulièrement dans son cabinet des célébrités en quête de jeunesse et de perfection. Un jour, c'est Edgar Homme qui franchit son seuil, pour une simple opération nasale. L'acteur, séduisant, imposant, affable, enrobe très vite le quadragénaire de son charisme. Alors qu'il remarque une photo d'Eva sur le bureau du médecin, il les invite tous les deux spontanément pour un week-end à la campagne. Nous sommes début Août, Eva a acheté une nouvelle robe pour l'occasion, son mari cherche à faire bonne impression, mais la jeune femme a affreusement froid, et l'atmosphère de la demeure de leur hôte se révèle oppressante...
Et bien, ce petit roman acheté dimanche dernier sur un coup de tête est plutôt une bonne surprise. Même si je ne suis personnellement pas vraiment adepte des maisons cachées au fond des bois, de l'humidité et des ambiances à la Hitchcock, il n'y a rien à redire à la qualité de ce texte. J'ai même ressenti de l'affection pour le personnage d'Eva, cette femme qui semble s'enfoncer en elle, victime dont on ne sait trop quel traumatisme ancien, elle qui était si fière de ses rondeurs avant, si belle sur scène avec sa chevelure rousse lui tombant en cascade sur le dos. On aimerait peut-être quelques clés supplémentaires, une autre fin, mais ce roman, loin d'être aussi terrible que l'auteure me l'avait signalé est d'un romantisme sombre plutôt intéressant. Une auteure à suivre, donc...
Ce titre est en fait le premier roman d'Astrid Eliard, publié en second. Nuit de noces, son recueil de nouvelles, est sorti en poche en janvier 2011.
Je vous signale à l'occasion que ce livre est dans la prochaine sélection de l'opération Masse Critique, qui démarre lundi matin à 8h30, qu'on se le dise...
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