L'Espace Senghor, situé à un jet de pierre de la place Jourdan et de sa célèbre friterie
"Antoine" affiche complet ce soir pour la venue du jeune pianiste prodige arménien Tigran Hamayasan.
Né il y a 23 ans, à Gyumri, la deuxième ville d'Arménie, ce génie des claviers passait, enfant, 12 heures par jour au piano à jouer, lire et transcrire. Il a grandi en écoutant des groupes rock
comme Black Sabbath, Led Zeppelin, Deep Purple ainsi que des grands noms du jazz 70's , comme Herbie Hancock et Joe Zawinul. Lors de sa jeune carrière, Tigran a rencontré Zawinul, côtoyé Hancock,
joué avec Wayne Shorter, tous ont reconnu en lui un futur(très) grand du piano.
Avec "Fable" son premier album piano solo, il est certain que sa carrière va prendre réellement son envol et que sa renommée va bientôt aussi
toucher le grand public.
Ce soir, une importante colonie arménienne a fait le déplacement et, sur le coup de 20h15, les portes de la salle s'ouvrent.
Je m'installe au premier rang histoire de pouvoir profiter au maximum de la prestation de l'artiste.
Il nous faudra patienter jusqu'à près de 21h00 pour voir Tigran Hamasyan fouler les planches de la scène.
Coiffé d'un feutre et vêtu d'un costume gris, il salue timidement le public puis s'installe tranquillement au piano.
Quelques secondes de concentration, et ses doigts se posent sur les touches avec une infime délicatesse. Immédiatement le jeune arménien entraîne l'auditoire dans un univers où il réussit à
peindre des tableaux uniques, empreints de fulgurances jazz ou d'instants magiques d'une beauté totale empruntée au classique. Musant sur la plupart des titres qu'il interprète ou les
accompagnant d'éructations jazzy, quasi imperceptibles, il y a du Keith Jarrett en lui.
Arc-bouté sur son piano à queue Schimmel, chaque note jouée habite son corps des pieds à la tête, il se dresse et claque de furieux
accords avant quelques instants plus tard de se rasseoir et d'embrasser en quelque sorte les touches du piano, recroquevillé sur lui- même, faisant montre d'un doigté d'une immense subtilité.
Certains titres pourraient servir de bande son idéale à la projection de vieux films muets, d'autres sont à la croisée du jazz et du classique, d'autres encore semblent empruntés au folk
arménien. Capable de rentrer en quelques secondes dans une interprétation d'une grande émotion ou dans une partition musicale exaltante l'homme semble faire corps avec son instrument avec une
facilité déconcertante.
Après quelque titres, Tigran tombe la veste dévoilant un t-shirt blanc à tête d'indien(?) et s'adresse au public en anglais:
" Ce soir je vais vous faire quelques titres de mon dernier album.....merci d'être venus...j'espère qu'on va bien s'amuser... mon album s'appelle "Fable" et le
titre suivant s'intitule " Someday my prince will come"..."
Et de se lancer dans une interprétation toute personnelle génialissime de ce thème musical intemporel, connu des petits
et des grands. Extraordinaire performance !
Tigran jouera encore deux derniers titres et n'oubliera pas de remercier l'organisation et une fois encore ce public conquis et attentif prêt à s'enflammer après chaque titre.
Ovation.
Le maestro reviendra pour deux rappels enchanter un auditoire qui n'en croit pas ses oreilles.
Un triomphe !
Tigran Hamasayan est un immense pianiste de génie promis à une magnifique carrière mondiale.
Ne ratez surtout pas sa fulgurante ascension !