Depuis deux mois, les pistes de danse des discothèques se remplissent au son du nouveau tube de Magic System, Ambiance à l’africaine. Ce morceau, qui ouvre Touté Kalé, leur sixième album, a un petit air de déjà entendu… Excepté la touche raï de Khaled, c’est le petit frère du dernier succès du groupe, Même pas fatigué, en collaboration avec Khaled, plus de 300.000 exemplaires vendus en 2009 et paru sur la compilation Raï’n’b fever. Et pourtant, malgré une recette connue et plusieurs fois réchauffée depuis son Premier Gaou, Magic System réussit, quasiment à chaque nouvelle sortie de disque à susciter l’enthousiasme du public.
La méthode Magic System
Abonné aux tubes de discothèque depuis Momo, issu du premier album Papitou (1997), Magic System a accumulé en quinze ans de carrière douze Disques d’or et deux de platine. Dans le contexte de crise du disque, les chiffres de ventes impressionnants de Magic System soulignent leur trajectoire hors du commun.
En quelques années, le groupe vocal d'Anoumabo, dans la commune de Marcory à Abidjan est devenu faiseur de tubes. Rare groupe d’Afrique à avoir réussi à s’échapper de la case "musique du monde", Magic System est invité régulièrement sur les plateaux des émissions de télévision de variété française à des heures de grande écoute.
Asalfo, le porte parole du groupe, constate : "C’est dommage que dans un club branché on entende Magic System et pas d’autres groupes africains". Pour lui, le zouglou doit s’inspirer de la trajectoire du raï de Cheb Khaled ou de Mami. Ils avaient réussi dans les années 90 à inonder le monde, en dopant le raï moderne avec des sonorités occidentales…
Asalfo développe : "Il y a 850 groupes de zouglou en Côte d’Ivoire, dont on entend à peine parler ici et qui ne sortent pas de la communauté. Pour connaître de gros succès, il n’y a pas deux façons de faire : c’est la méthode Magic System. Mondialiser. Il faut apporter un son nouveau avec une base que les gens connaissent déjà".
C’est ce que savent sur le bout des doigts les producteurs qui accompagnent le combo ivoirien. Ainsi, dans Touté Kalé, il y a un peu de tout, pour faire plaisir à toutes les oreilles. Un mélange de musique "afro-occidentale", du zouglou mélangé à de la dance ou de la techno et bien sûr, du zouglou originel.
Fédérateurs
En interview, le groupe se défend de faire une musique saisonnière. Asalfo insiste "On essaie de décoller l’étiquette qu’on nous colle de groupe dancefloor, mais toute rupture brutale de style peut avoir un revers… On donne à entendre ce que nos fans attendent, de la joie, du soleil, des messages d’espoir, mais il y a d’autres titres à découvrir dans l’album".
Dans Touté Kalé, le groupe a aussi composé plusieurs morceaux zouglou – dont le meilleur morceau du disque, Souvenir d’Anoumabo, hommage "pays" et dansant à leur enfance en Côte d’Ivoire. Magic System a aussi tenté l’ouverture à d’autres styles : Ça va aller, un reggae fédérateur avec Tiken Jah Fakoly sur la crise ivoirienne ou quelques morceaux guitares/ voix, comme L’eau va manquer sur le réchauffement climatique ou Pas si différents sur le racisme…
Thématiques ô combien contemporaines en France comme en Côte d’Ivoire, mais aussi traitées de façon très consensuelle… "On s’adapte à la situation, vu le contexte social dans l’Hexagone. C’est un fait : peu d’artistes africains sont autant écoutés que nous en France, on devient des messagers pour toute la communauté au sens large, donc on essaye de faire passer des messages de façons très positive…" sourit Asalfo.
Sensations
Prochain événement important pour les fans du groupe – près de 92.000 personnes sur leur page Facebook, c’est la Nuit Africaine du Stade de France, le 11 juin, où d’autres stars africaines, comme Manu Dibango, Sékouba Bambino, Mokobé, Meiway ou Alpha Blondy seront là pour la fête. Pour Magic System, qui jouera avec des musiciens, c’est l’occasion de renouer avec des sensations de live, de grand show. "Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, nous ne sommes pas un groupe de studio ou de discothèque. On s’exprime mieux avec nos musiciens, on aime toujours faire entendre nos voix. Avec un micro, on ne sait pas tricher" conclut Asalfo. C’est peut être cela aussi l’un des ingrédients de la potion du Magic System, quatre voix d’or et l’envie intacte de faire le show.