Naissance

Publié le 14 avril 2011 par Florent

Naissance, voilà un joli mot qui tire son origine du latin “nascere”, lui même provenant du grec et même du sanscrit comme nous l’indique le littré :

“La forme entière est gnasci, comme témoignent l’archaïque gnatus et co-gnatus. Gnasci se rapproche tout naturellement du grec et de gigno, formes à redoublement, sanscrit jan, engendrer. Gnascor veut donc dire je suis engendré.”

En chinois le caractère nous montre une jeune pousse qui sort de terre, avec sa première feuille (ou son premier rameau).

Pour la même idée, mais dans le registre animalier, et nettement moins élégant, on a l’expression francaise “mettre bas”, qui se traduit en chinois littéralement par “tomber/descendre- faire naïtre”

降生 Mettre bas

Curieusement le terme chinois a surtout une extension religieuse liée à la réincarnation, comme nous le verrons à la fin de ce billet. Le caractère (on voit à droite deux pieds pointant vers le bas) est très ancien, on en connait aujourd’hui les usages sous ses formes oraculaires; comme celle ci par exemple .

Mencius utilise ce caractère pour parler de la pluie qui tombe. Les annales de Chu 楚 l’emploient pour signifier “venir d’en haut, naître”

Il prend du sens en médecine, pour exprimer une descente physiologique (le poumon et l’estomac “descendent”).

降压 c’est décompresser ; la pression du sang qui baisse.

降心 signifie se calmer, apaiser son coeur-esprit.

降号 c’est en musique un bémol.

降露 c’est la rosée qui se forme et descend sur le sol.

降福产后妇 désigne la cérémonie des relevailles, au sens catholique du terme (cérémonie dont je parlais dans ce billet).

降至今日 veut dire “jusqu’à nos jours” : on retrouve ici l’idée du temps qui descend.

Le caractère renvoie aussi à la mort : 降服 c’est le deuil d’une année.

降咎 est un désastre qui “tombe” du ciel.

(Avec le composant de l’eau à gauche on obtient l’inondation )

Mais on peut aussi vivre un heureux événement qui “tombe du ciel” : 喜从天降

Revenons à cette évocation du début de billet : 降生 a des emplois très nobles en chinois, liés à la naissance où à l’incarnation de divinités.

Comme 降诞; il désigne la naissance de saints Buddhas, particulièrement celle de Sakyamuni le grand Bouddha. (on retrouve le second caractère dans le terme chinois de Noël : 圣诞节 fête de la naissance du christ)

Bouddhistes et taoïstes parlent de 降凡 pour raconter l’incarnation d’une divinité, son apparition dans le monde réel.

Voilà une promenade étymologique qui m’apprend à ne plus trop être dégoûté par l’expression “mettre bas” !

(mais je ne l’emploierai tout de même jamais pour une belle-soeur ou amie qui donnerait naissance…)