Dans la vie, il est des choses que nous sommes incapables de supporter plus longtemps. Oh ! ne crois pas que nous allons te reprocher d’avoir commencé ta carrière comme conseiller au ministère de l’Intérieur sous Giscard, d’aimer la police au point de la commander, de t’être donné corps et âme à ce Nicolas Sarkozy, d’avoir singé le cardinal de Richelieu dans des complots obscurs… Non ! petit-fils du terrible Pasqua ! L’ambition est la destinée de l’homme et l’on ne pouvait attendre de toi d’autres actes.
Nous ne nous étonnons pas que tu te sois pris pour un Talleyrand au petit pied, fricotant avec les dictatures d’Afrique et les services secrets syriens, algériens et libyens. Tu as excité le peuple contre les Roms, encouragé un absurde débat sur l’identité nationale, flatté les instincts xénophobes des perdants de la mondialisation. Tu as multiplié les gaffes et les provocations, parlé de “croisade” alors que l’armée française protégeait le peuple musulman de Benghazi, assuré que devant l’immigration “les Français ont le sentiment de ne plus être chez eux”. Tu veux, à l’inverse de ce que disait ton maître Sarkozy il y a trois ans, limiter l’immigration légale, accélérer les réexpéditions à la frontière et refouler à Vintimille les Tunisiens de Lampedusa.
Les humanistes se bouchent les oreilles et les intellectuels te couvrent de risées. Mais nous apprenons que tu commandes des sondages secrets sur l’impopularité de Brice Hortefeux, que tu dénigres auprès de l’imperator cet homme semblable à toi, que tu lui reproches à tort d’avoir ouvert les portes de la France aux immigrés.
Voilà qui est au-dessus de nos forces. Réprime, mais ne calomnie pas. Verrouille, mais épargne ce pauvre Brice en recherche d’emploi. Terrorise, mais surveille ton vocabulaire. Tu n’en es pas capable ? Alors dégage ! Tel est notre amical conseil.
Les Inrocks
D’après la dernière lettre de Pétrone à Néron dans Quo Vadis ? d’Henryk Sienkiewicz.
édito des Inrocks du 12.04.2011