Nicolas Sarkozy est en weekend au Cap Nègre avec son épouse Carla. Son agenda officiel ne reprend que demain. Les nouvelles
ne sont pas bonnes. Le gouvernement masque son inquiétude, l'UMP ne cache plus son agacement. Le nouveau tremblement de terre pas loin de Fukushima ? Non. L'enlisement de la situation en Libye ?
Même pas. Les bombardements français en Côte d'Ivoire ? Que nenni ! L'inquiétude est ailleurs : la cote de confiance du candidat ne progresse pas. Bien au contraire !
Flambée énergétique, et... ?
Sourires crispés et visages contrits, Christine Lagarde, Eric Besson et Frédéric Lefebvre ont rencontré quelques
représentants de la filière pétrolière lundi matin. La semaine dernière, Fillon avait décidé de revaloriser de 4,6% le barème fiscal des indemnités kilométriques, pour prendre en compte l'envolée
des prix des carburants. Lundi en fin de matinée,
Christine Lagarde se voulait satisfaite de la rencontre : « les acteurs de la filière du pétrole ont accepté de contribuer à la réduction de la facture des Français. La prise en charge du
coût supplémentaire s'élève à 115 millions d'euros. (...) La contribution sera versée à peu près à 60% par le secteur des producteurs-raffineurs et à 40% par les distributeurs.» Cette mesure
est marginale. Elle ne concerne que les salariés qui (1)
payent de l'impôt sur le revenu et (2) peuvent déduire une fraction de leurs dépenses de carburant réalisées pour des motifs professionnels, soit 5 millions de personnes. Rappelons aussi que le
bénéfice net de Total, en 2010, fut de ... 10 milliards d'euros.
Au Japon, un second tremblement de terre a secoué le pays, un mois jour pour jour après celui du 11 mars, et à 80 km de la
centrale de Fukushima. On reconnaît enfin, grâce à de nouvelles études, que la
dégradation de Fukushima est plus grave que Tchernobyl. 270.000 personnes dans la zone ont déjà été déplacées. Des particules infimes se dispersent partout. La nature est contaminée à très grande
échelle. Stéphane Foucart, dans le Monde, parle d'accident de civilisation. En Sarkofrance, on se tait. La ministre de l'écologie est en visite à la Nouvelle Orléans et à New-York.
Crise sociale... et ?
A défaut de tarif social de l'énergie, le clan présidentiel s'agite. A l'Assemblée, une proposition de loi vise à réduire la prise en
charge par l'Etat du coût des plans sociaux d'entreprises bénéficiaires. Quel effort ! En 2010, le nombre de plans sociaux, « plans de sauvegarde de l'emploi », a été divisé quasiment
par deux par rapport à l'explosion de l'année précédente (1195 versus 2245), mais reste bien supérieur au niveau d'avant la crise, 2007 (957)... Evidemment, le gouvernement « voit d'un oeil
favorable » cette proposition. Elle fait office de mesure « sociale » pour cette nouvelle année.
On tente également de nous faire croire que la reprise est là. C'est l'un des autres leit-motiv de
Sarkofrance. KJeudi dernier, devant un parterre d'ouvriers, Nicolas Sarkozy expliquait qu'il fallait être sévère contre ces chômeurs qui refusent une offre d'emploi. Ce lundi, on pouvait lire
dans le Figaro que « l'industrie française connaît
un bon début d'année.» Le journal évoque déjà un « printemps de l'industrie ». Pourquoi tant d'optimisme ? « L'indice de la production industrielle totale a progressé de
0,4% » indique le quotidien. 0,4%... Quel succès ! Finalement lucide, le Figaro relate l'avis d'un analyste: « La production industrielle est certes en hausse de près de 14% depuis son
point bas de mars 2009, mais elle reste inférieure encore de 9% à son niveau de début 2008 et a simplement retrouvé sa valeur de début 1998 ».
Dernière « preuve » de la préoccupation sociale du Monarque, il a publié, alors qu'il était encore en congé,
la lettre de mission adressée à Gilles de Robien. Qui
? Gilles de Robien, ancien centriste, maire déchu d'Amiens, ancien ministre de l'Education nationale. Ce courrier est incroyable de narcissisme: « Aussi ai-je fixé à notre Présidence du G20
des objectifs ambitieux, tant sur les aspects monétaires et financiers, que sur le volet social, qui forme le complément indispensable de toute politique économique cohérente et responsable. Je
tiens également à associer davantage les partenaires sociaux aux travaux de la Présidence ainsi qu'aux grands rendez-vous inscrits à son ordre du jour, y compris le futur Sommet de Cannes. »
Je, je, je...
Bizarrement, l'Elysée ne commenta pas le remplacement de l’allocation en faveur des demandeurs d’emploi en formation (AFDEF),
supprimée depuis 1er janvier 2011, par une rémunération de fin de formation (R2F). Cette dernière est d'un montant 30% inférieur à la précédente. Les chômeurs en formation apprécieront. La décision date du 11
avril.
Libye, et... Sarkozy se replie
En Libye, le colonel Kadhafi a accepté la feuille de route vers la paix proposée
par l'Union africaine, refusée quelques heures plus tard par les insurgés : « l’initiative qui a été présentée aujourd’hui est dépassée. Le peuple réclame le départ de Mouammar Kadhafi et de
ses fils » a déclaré l'un des représentants du
Conseil national de Transition. C'est un sérieux coup dur pour celles et ceux qui croyaient et espéraient à un changement de régime. En Sarkofrance, on a pris acte. Depuis quelques jours
déjà, la diplomatie Sarkozy souhaite négocier une solution politique avec le boucher libyen. L'OTAN n'a ni le mandat ni la capacité de détruire les forces kadhafiennes sans une intervention au
sol que personne ne souhaite... à part les rebelles. Ces derniers se sont révélés incapables de renverser le dictateur libyen. Lundi soir, les forces américaines se sont retirées du
dispositif offensif. La France est seule à assurer la quasi-totalité des raids aériens. La situation est bel et bien bloquée. Aussi comprend-t-on mieux pourquoi le discours
officiel en France a sensiblement évolué. Nicolas Sarkozy ne réclame plus le départ du colonel Kadhafi comme préalable à l'ouverture de négociations. Il l'a confié, discrètement, à quelques journalistes vendredi dernier.
Cette volte-face est majeure, et comme souvent, peu commentée. Le 11 avril dans la soirée, la chaîne d'information BFM-TV
diffusait une interview de Saïf al-Islam Kadhafi, l'un des fils du colonel Kadhafi. ce dernier s'affichait serein et souriant, promettant une « nouvelle Libye ».
Il sent qu'il a gagné.
Gbagbo arrêté, par la France ?
En Côte d'ivoire, les forces françaises de l'opération Licorne sont passées à l'attaque ce weekend. Fini la protection des ressortissants français ou européens, ou l'exfiltration
des ambassadeurs amis. Elles ont bombardé la résidence de Laurent Gbagbo à Abidjan. Ce bunker a été « construit par des ingénieurs français et conçu pour être inviolable », rappelait le site Armées.com. Officiellement, il s'agissait de détruire des armes lourdes qui menaçaient les
civils des environs. Lundi matin, les hélicoptères français
étaient à nouveau à la manoeuvre. En France, le consensus national s'est du coup rompu. Quelques ténors socialistes ont critiqué cette offensive, craignant qu'elle déborde la mission de
protection validée par l'ONU.
Le conseiller spécial Henri Guaino, toujours prompt à commenter et défendre l'action de son patron, a voulu rassuré, ce lundi matin sur France 2 : « la France n'a pas pour mission de chasser
Laurent Gbagbo militairement; cette intervention militaire française a été requise par l'Onu pour protéger des populations civiles.» De l'avenir, l'auteur de ce sinistre discours de Dakar de
juillet 2007, ne sait pas grand chose : « Je ne fais pas de pronostic, ce serait parfaitement absurde. La France accomplit son devoir pour protéger les populations à Abidjan et puis
nous verrons comment les choses se passeront dans les heures et les jours qui viennent. »
En fin d'après-midi, Laurent Gbagbo était arrêté. Par qui ? Les versions divergent... les forces françaises ? le chef
d'Etat-major des armées françaises a démenti. La nouvelle serait terrible. Gérard Longuet, ministre de la défense, a dû tenir une conférence de presse en fin de journée pour compléter le démenti.
D'après Europe1, les forces françaises ont préparé le terrain, en bloquant et sécurisant l'accès
la résidence de Gbagbo.
L'UMP s'inquiète... et ?
Rien n'y fait. Ni les guerres ni les diversions xénophobes ne semblent avoir une quelconque influence sur la popularité du
Monarque. Ce 11 avril, la loi sur l'interdiction du voile intégral entrait en vigueur. Claude
Guéant pouvait souffler. A priori, il n'y avait nul besoin d'une nouvelle provocation pour placer l'immigration dans l'agenda médiatique. Sans surprise, quelques femmes voilées intégralement
se sont affichées pour provoquer le chaland. Les caméras étaient là. Guéant pouvait être content.
Trois semaines après le déclenchement des opérations en Libye, Nicolas Sarkozy ne capitalise absolument pas sur sa posture de
chef de guerre dans les sondages. Une récente enquête, publiée ce 11 avril par le
Parisien, le crédite de 74% d'opinions méfiantes à son encontre ! « Si les sondés créditent toujours le président d’un volontarisme sur les réformes et face à la crise, ils critiquent ses
'promesses non tenues' (sur le pouvoir d’achat), l’accusent d’être 'au service des riches' et de 'faire le jeu du FN' » commente le journal. Même auprès des sympathisants du FN sondés par
Harris Interactive, sa cote de confiance baisse.
Ses patrons, Jean-François Copé en tête, attaquent désormais la « légalité » des primaires socialistes. Pour ces
dernières, le Parti socialiste a besoin des listes électorales. Serait-ce légal ? La critique UMPiste est tardive. On se souvient aussi que le parti présidentiel sait lui-même utilisé à mauvais
escient certains fichiers plus litigieux. Copé a pris sa tête des mauvais jours, ce lundi. Un visage bien coincé, tout aussi contrit que ceux de Christine Lagarde ou Frédéric Lefebvre le matin
même...
L'inquiétude est grande car le paysage politique, à droite, ne s'éclaircit pas: « Nicolas Sarkozy est notre
meilleur candidat. Je suis profondément convaincu qu'avec lui, nous allons l'emporter (...) Les sondages un an avant, cela ne veut rien dire. » a expliqué le secrétaire désigné de l'UMP ce
lundi.
Borloo est donc parti. Ce devrait être une bonne nouvelle, si Sarkozy savait réfléchir.