Le Japon a porté mardi l’accident de Fukushima au niveau 7 de l’échelle Ines soit le même niveau que celui de la catastrophe de Tchernobyl en 1986. L’AIEA se veut cependant rassurante au motif que la catastrophe ukrainienne trouverait son origine dans une erreur humaine et un défaut de conception, alors que la crise de Fukushima résulterait d’un séisme et d’un tsunami d’une force peu commune.
Plus c’est gros, plus ça passe. L’AIEA s’asseoit un peu vite sur la multitude de témoignages qui met en cause l’intégralité de la chaîne japonaise du constructeur à l’opérateur de la centrale sans oublier les autorités.
Le 28 mars dernier dans les colonnes du Monde l’ancien gouverneur de la préfecture de Fukushima, qui avait engagé une bataille contre Tokyo Electric Power Company (Tepco), le propriétaire et l’exploitant de la centrale de Fukushima lançait un véritable pavé dans la mare.
Eisaku Sato mettait explicitement en cause au-delà de Tepco l’autorité de sûreté nucléaire japonaise, n’hésitant pas à parler “d intérêts opaques“, de “malversations” et de “corruption“. La chaîne de défaillance semble s’étendre à Hitachi mise en cause par l’un de ses anciens ingénieurs qui l’accuse d’avoir dissimulé une erreur de fabrication dans la cuve du réacteur no.4.
Autant dire que les arguments de l’AIEA selon lesquels le facteur humain n’est pas en cause est une énormité qui n’a rien à envier à la catastrophe elle-même.
L’annonce selon laquelle le niveau des émissions radioactives enregistré n’équivaudrait qu’à 10% de celui mesuré en 1986 après Tchernobyl est faussement rassurant d’autant que le nouveau séisme de magnitude 6,6 survenu ce lundi au sud de de Fukushima confirme la précarité de la situation.
L’incapacité des autorités japonaises à maîtriser la situation demeure inquiétante. Face à un drame d’ampleur planétaire il est paradoxal que la communauté internationale toujours si prompte à monter des corps expéditionnaires pour faire le coup de poing aux quatre coins du globe reste aussi impassible.
Seule la Chine élève la voix. La superpuissance régionale a de nouveau demandé que le Japon fournisse des informations “précises et complètes“ sur la situation à la centrale nucléaire de Fukushima. “Nous espérons que les mesures prises par le Japon vont permettre d’améliorer efficacement la situation“, a déclaré Hong Lei, porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
C’est pourtant bien d’un droit d’ingérence nucléaire dont il faudrait aujourd’hui parler. On comprend le silence gêné de la France. Celui-ci n’est pas seulement lié au poids économique du secteur nucléaire. Fukushima a rappelé à ceux qui l’avaient un peu vite oublié que la radioactivité ne connaît pas les frontières.
L’Allemagne mais aussi la Suisse en pays frontaliers regardent d’un très mauvais œil la prolongation de la durée de vie de la centrale de Fessenheim et demandent sa fermeture. La question sous la pression des eurodéputés Verts prend une dimension européenne et constitue peut être la naissance d’un droit d’ingérence nucléaire.
La plus ancienne des centrales nucléaires françaises en service se situe sur une faille sismique. Un rapport de l’Autorité de sûreté nucléaire de 2000 qui soulignait que certaines fonctions de sauvegarde assurant le refroidissement du réacteur pourraient ne plus être assurées en cas de séisme a contraint EDF à réaliser des travaux “de mise à niveau du risque sismique“. Ceux-ci devraient se terminer en juin de cette année.
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