Quand le jour est venu, il faut y passer. Nous y sommes. Nous voici donc, ma douce et moi, dans le très beau théâtre Mogador, confortablement assis et placés pour assister à la comédie musicale Mamma Mia ! Succès international depuis plusieurs années, le spectacle basé sur les chansons du groupe Abba, est donné à Paris et en français depuis le mois d’octobre jusqu’à ce que les spectateurs ou les organisateurs se lassent.
J’avais deux façons d’envisager ma chronique, soit analyser point par point le spectacle et donner mon opinion à la fin, soit dire immédiatement que j’ai trouvé ce spectacle très mauvais et le démontrer ensuite. C’est cette option que j’ai choisie, car je sais votre temps précieux.
Dans le genre spectacle, Mamma Mia ! est une comédie musicale, elle peut donc être analysée comme une opérette ou un opéra, grosso modo il s’agit du même type de programme. Nous allons par conséquent aborder le livret et la musique principalement et quelques points complémentaires pour que le dossier soit exhaustif.
Le livret, c'est-à-dire le texte. Une jeune fille va se marier, dans l’auberge tenue par sa mère célibataire dans une île grecque. A cette occasion, elle a invité à l’insu de sa mère, trois hommes qui pourraient être son père et qu’elle ne connaît pas. De son côté, la mère a invité deux de ses meilleures copines qu’elle n’a plus revues depuis les fredaines de leurs vingt ans. Je n’ai aucune critique à porter sur le sujet, car si on devait éplucher les livrets des opéras par exemple, souvent on pâlirait à leur lecture. De plus, personne ne s’attend à entendre des textes magnifiquement écrits et dits, nous ne sommes ni au cinéma, ni au théâtre, encore moins plongés dans un livre. Ce n’est donc pas le texte qui va nous faire vibrer, et je confirme que rien ne vibre.
Venons-en à la musique qui se décline sous deux aspects, l’orchestre et la musique proprement dite. Evacuons immédiatement l’orchestre, il est plutôt lourd et ne fait pas dans la finesse, à sa décharge je dirai qu’Abba faisait du disco ce qui n’arrange pas les choses. Et la musique dans tout ça ? Il y a 22 chansons du groupe – d’après le programme, car pour ma part je n’en ai reconnues que deux ou trois, comme Waterloo ou Money, Money mais je n’ai jamais apprécié ce groupe et le connais très mal – et des musiques additionnelles pour faire le lien. C’est surtout là que le spectacle pêche à mon avis. Les musiques additionnelles sont d’une banalité affligeante et semblent avoir été entendues mille fois déjà (une goutte de Goldman, un doigt de Michèle Torr), et les chansons d’Abba n’ont pas la brillance et l’entrain que leur conféraient les quatre Suédois ; Abba est Abba, la troupe de Mamma Mia ! c’est autre chose, en moins bien. Comme de plus, les orchestrations utilisent de vieux trucs comme une montée du son en puissance pour exagérer le pathos des situations, par exemple, vous comprendrez que sur le plan musical – c'est-à-dire l’essentiel – j’ai trouvé le spectacle très décevant.
Pour charger la mule définitivement, j’ajouterai que la mise en scène n’a rien d’originale, excepté peut-être, le premier tableau après l’entracte, où les costumes verts et roses fluo créent un effet assez réussi (le fameux kitsch des années 70, ce genre d’esthétisme…) et que la troupe ne semble pas receler de talents exceptionnels.
En me relisant je constate que je suis très dur, mais c’est réellement ce que je pense. Alors pour vous prouver mon honnêteté, j’avoue que je savais par avance que ce n’était pas un spectacle pour moi, je n’étais là que pour faire plaisir à ma femme. Je dirai aussi que si je n’ai pas aimé, ma douce a adoré, car elle a pris plaisir à voir des jeunes gens pleins de vie, sauter, danser et chanter sur un fond d’histoire pour midinettes et qu’elle s’est sentie rajeunir. Je ne lui ai pas répondu qu’en s’asseyant sur un banc devant la sortie d’un lycée, elle aurait vu des jeunes gars et filles, pétant la santé, s’aimer, se battre ou chanter, et ce pour beaucoup moins cher… J’avouerai néanmoins aussi, que je suis un peu troublé par l’ampleur de ce succès mondial et les salles pleines, tous aiment sauf moi ? La psychologie des masses est imprévisible.
Mamma Mia ! Au théâtre Mogador à Paris – Pour en savoir plus c’est ici.