Wong Kar-wai est un réalisateur, scénariste, et producteur hongkongais né le 17 juillet 1958 à Shanghai, en Chine. Il est mondialement connu pour ses comédies dramatiques pour lesquelles il a remporté de nombreux prix sur les scènes nationale et internationale, dont le prix du meilleur réalisateur à Cannes en 1997 pour Happy Together, ou encore le César du meilleur film étranger en 2001 pour In The Mood For Love.
Le style de Wong Kar-wai est très marqué par la mélancolie des personnages dont il décortique avec lenteur les sentiments amicaux ou amoureux, dont ils sont souvent les prisonniers. Il se dit que l’exil familial qu’a subi Wong Kar-wai étant enfant a contribué au façonnage de son style, ou les thèmes récurrents de la séparation, de l’errance et de la mémoire prédominent. On retrouve systématiquement dans ses œuvres une multitude de personnages marginaux et énigmatiques, aux vies torturées, imbriquées les unes dans les autres, et faisant souvent preuve d’une dualité qui nous pousse à les confondre entre eux, quand ils ne se confondent pas eux-mêmes.
L’une des grandes particularités du style du hongkongais est sa propension à tourner une quantité exagérée de scènes, autant de vies alternatives données aux personnages, qu’il supprime ou conserve au fur et à mesure du montage en ne respectant pas forcément de trame chronologique. Cette méthode de montage et de multiplication des flashbacks rend les films du réalisateur facilement identifiables, et accentue le côté énigmatique et déroutant de ses scénarios. La redondance, tout au long de ses œuvres, de thèmes musicaux récurrents et obsédants, est aussi une de ses marques de fabrique caractéristiques (le thème musical de In The Mood For Love, Yumeji’s theme, reste dans les mémoires, pour certains plus encore que de le synopsis du film). Cette recette, le réalisateur réussit à l’appliquer quels que soient les lieux ou les époques servant de théâtres à ses œuvres : au gré des œuvres dans des lieux et des époques très différents les uns des autres : années 60 (Nos Années Sauvages), présent (As Tears Go By) et même futur (2046), Hong-Kong (Chungking Express, Les Anges Déchus), Argentine (Happy Together), Etats-Unis (My Blueberry Nights) et même Chine Médiévale, ce qui nous amène à notre sujet.
En 1994, Wong Kar-wai a réalisé Les Cendres du Temps (Ashes of Time), un Wu Xia Pian (film de sabre) qui tranche, c’est le cas de le dire, radicalement avec le reste de son œuvre. Si la longueur du tournage a littéralement sabordé le film qui reste aujourd’hui l’un des désastres commerciaux les plus retentissants du cinéma hongkongais, Les Cendres du Temps est pourtant un chef d’œuvre, dont le remastering en 2008 donne au film tout l’éclat qu’il mérite (Ashes Of Time Redux).
L'histoire se concentre encore une fois sur les relations amoureuses des personnages. On y retrouve tous les ingrédients du style romantique et lancinant de Wong Kar-wai , mais efficacement complétés par la flamboyance caractéristique des films de sabre chinois. Les paysages désertiques de la chine médiévale accentuent la sensation déjà bien présente de vide et de lenteur. Mais dans Les Cendres du Temps, cette lenteur est tranchée à coup de sabre par la violence des sentiments des personnages et par le vacarme étouffant des scènes de combat fidèles au genre : exagération du nombre de combattants, supériorité physique et psychologique des héros, et de leurs qualités de guerriers. Forces surnaturelles en opposition totale avec les faiblesses déroutantes qu’ils affichent sur le terrain des sentiments amicaux et amoureux.
Renforcé d’un bande son à couper le souffle, Les Cendres du Temps réussit la prouesse de venir dénoter dans l’œuvre globale de Wong Kar-wai , tout en restant, définitivement, un film de Wong Kar-wai .