Changer de l'air des primeurs, parler d'autres choses, voir d'autres gens et ne plus se focaliser sur des dents noires de tanins mesquins.
Me voilà à Londres pour un WE familial planifié depuis des lustres, et le Très Haut, dans son souci de ne pas m'imposer en sus des anglais vivant en Angleterre un temps où les brouillards matutinaux se mêlent à des pluies fines requerrant l'usage de l'umbrella, nous offre un soleil quasi extravagant et un ciel qu'aucun jésuite ne pourrait peindre, c'est à dire un bleu immaculé.
On sait à quel point l'Angleterre (je n'ai pas dit le Royaume-Uni) est, pour pas mal de français (toujours tétanisés par ces méchants ancêtres qui ont brûlé notre Jeanne à nous), un pays que nous ne comprenons guère. Ou plutôt que nous ne cherchons pas à comprendre, tant il est facile d'aligner les poncifs habituels.
Et je n'échappe pas à la règle. Dans le domaine de l'arrogance, c'est clair : nos élites parisiennes ont dépassé les maîtres anglo-saxons. Dans le domaine culinaire, nous avons également réussi, pour bien trop de maisons, à les rattraper dans l'immonde du surgelé usiné bêtement et mal réchauffé dans des cuisines (?) où le chef ne sait plus monter une vraie béarnaise. Pour les autos, c'est vite vu : ils ont tout vendu. Même Morgan ? Ça, je ne sais.
Ce qui me frappe ce week-end.
D'abord, ce vaste mélange de communautés, de gens aux allures si différentes, qui se croisent avec politesse sans cette méfiance qui semble une permanence chez nous. Bon, on sait que ce n'est pas un rose uniforme, mais Londres, c'est un melting-pot qui n'existe pas à Paris.
Ensuite, l'absence relative de la maréchaussée bien qu'on m'ait dit à quel point les caméras savaient tout de tous. Les taxis (ils sont chers maintenant) sont toujours aussi speedy et j'en ai même trouvé un qui aurait fait trembler les meilleurs représentants romains ou napolitains en la matière : c'est dire !
Sérieux : il y a deux villes en Europe qui furent à la tête d'administrations d'empires vastes et complexes. Vienne et Londres. Ici, à Londres, on reste frappé par les imposants bâtiments qui ont abrité des générations de fonctionnaires, sûrs de savoir gérer de vastes pays comme l'Inde ou l'Afrique du Sud où, selon eux, vivaient d'autres catégories d'humains, qui, les malheureux, ne pouvaient jamais atteindre ce pur produit insulaire qu'est l'anglais de souche. Qui sait vraiment à quel point l'anglais a soutenu le trafic de drogue en Chine ? Bon, c'est encore une image facile mais ces victoires des mers avec un système monarchique restera quelque chose dans l'histoire de l'humanité.
Les multiples statues qu'on trouve un peu partout rappellent aussi les vanités humaines. Avec des exceptions. Celle de Churchill, imposante, à elle seule peut faire pardonner tout ce qu'on peut reprocher maladroitement à l'anglais, y compris le fait qu'il circule dans le mauvais sens. Ce diable d'homme, dans un moment où tout semblait perdu pour tous a quand même dit sur un ton que l'histoire radiophonique a gardé : "we will never surrender". Rien que ces 4 mots feront toujours pencher la balance du bon côté. Merci Monsieur. Et on n'oubliera pas que c'est mon maître à penser, question pratique sportive. Pol Roger lui doit aussi beaucoup, ainsi que Cuba.
Cinema
Vu "Fair Game", ce film qui retrace l'histoire de cet agent féminin de la CIA dont le mari ambassadeur avait bien expliqué que l'Irak n'avait pas acheté de l'uranium au Niger. Je reste assez stupéfait par la capacité américaine de traiter aussi clairement et vertement les montages bidons du gouvernement Bush. Excellents acteurs et parfaite mise en scène.Traiter aussi fortement de l'actualité récente n'est pas encore une habitude française.
Lecture
Le Grand Jacques comence une nouvelle carrière d'éditorialiste où il aborde, toujours avec le recul nécessaire, des questions majeures d'actualité. C'est assez fascinant de lire ses textes où l'amour des mots, le besoin d'expressions inattendues, le commentaire "ailleurs" sont des règles qu'il s'impose naturellement … comme De Rouyn s'impose, avec sa belle Clémentine, comme bon descendant de La Bruyère dont on ne relit pas assez souvent Les Caractères.
Vin
Etonné de trouver très agréable le Rully de Nicolas Potel. Cette côte chalonnaise devrait être mieux mise en valeur. Je suis certain qu'on peut y trouver de très bons RQP.
Des amis m'annoncent que des haineux, vindicatifs et malfaisants disent plein de méchancetés sur le GJE sur ce media auquel je pige que couic. J'ai pas trouvé. Ce doit être dérisoire. Ah les cons ! Ça pullulle grave !
Mine de rien (et on reviendra sur le sujet), la question de l'éthique du journalisme du vin est sérieusement d'actualité aux USA où l'événement créé par Antonio Galloni pour se faire des sous (il a clairement avoué ses buts) pousse les winegeeks de Parker à exiger d'enlever tout ce texte ancien sur l'éthique qu'il recommande en couverture du Wine Advocate.
Il est évident que celui qui rachètera TWA à Parker, c'est Antonio et que celui-ci devra envisager une autre façon de voir les choses s'il veut réussir financièrement. On ne quitte pas un job bancaire grassement rémunéré pour l'aléatoire de la presse, sans avoir bien pesé les possibilités d'améliorer l'ordinaire.
Pourquoi je parle de cela ? Simplement pour redire encore et encore que la seule solution pour éviter tout conflit d'intérêt, c'est simplement de systématiser les dégustations à l'aveugle. Ce n'est pas pour demain la veille.