Silk Flowers l’interview

Publié le 09 avril 2011 par Hartzine

Acteurs émergents de la scène de Brooklyn, Silk Flowers exposent une personnalité suffisamment tordue et loufoque dans leur art-pop granuleuse pour qu’on se penche sur eux. Leur premier album, le claustrophobe et naïf Silk Flowers en 2008, sonnait assez lo-fi pour echapper à une catégorisation cold-wave un peu réductrice. Probablement pas insensible au printemps de la chillwave, le groupe a depuis le temps décidé d’élargir sa palette chromatique et d’aérer le mix, tout en adoptant des accents indie-pop qui leurs vont bien, et ce tout en restant assez fidèles à leur formule instrumentale. Quelques temps après la sortie de ce deuxième album, résulte de ce nouvel état d’esprit (Ltd. Form, sur Post Present Medium, label monté par No Age), quelques réponses d’Aviram Cohen, membre central du groupe.

Le premier album était à la fois très DIY et très précis. Tout ce boulot sur les textures et les ambiances était-il intentionnel ou juste une conséquence de vos moyens techniques minimalistes ?

C’était tout à fait intentionnel. Nous savions qu’enregistrer sur cassette ajouterait une couche de texture saturée qui condenserait les sons pour créer une certaine atmosphère. Le fait de l’auto-produire nous a aussi donné le temps de bien mûrir la chose et de travailler sur la forme.

Comment la transition entre ce sentiment d’isolation du premier album et la plus grande ouverture du second s’est-elle produite ?

On a davantage pensé les idées que l’on voulait véhiculer et l’impression que l’on voulait laisser. Nous avions la sensation d’avoir été mal interprétés auparavant. Notre démarche jusque là était celle d’un groupe plus jeune. On utilisait presque toutes les idées qui nous passaient par la tête au lieu de mettre de côté celles qui ne fonctionnaient pas. Cette fois-ci on a vraiment pris le temps de trouver une manière d’agencer plusieurs éléments pour construire quelque chose de cohérent, de nous concentrer sur un son atmosphérique. Notre utilisation de structures pop est le même qu’avant cependant, elle a toujours été présente dans notre formule.

Dans quelle mesure vous sentez-vous proches de l’esthétique minimal wave ?

On a été plus libérés qu’influencés par la minimal wave. Après trois décennies, le public ne s’étonne plus lorsque tu débarques sur scène avec des synthés et des boîtes à rythme, et sa notion de ce qu’un groupe peut être et peut faire s’est élargie. Les gens comprennent maintenant que ces instruments “synthétiques” peuvent être porteur d’une grande émotion. La ténacité et le refus du compromis de toute la première vague de la minimal wave (comme Absolute Body Control), ainsi que d’artistes contemporains comme Martial Canterel, ont été la clé de cet affranchissement et nous ont offert la liberté de faire les morceaux que nous voulions faire dans se soucier de la manière dont ils seraient reçus.

Vous avez optés pour une son assez particulier de synthétiseurs sur certains morceaux, notamment un son assez FM un peu cheesy, est-ce le signe d’une certaine tendresse nostalgique ?

On utilise beaucoup de sons de synthés très différents sur l’album. Il est dans tous les cas difficile de choisir n’importe quel son de synthé (ou autre) sans qu’il fasse référence à quelque chose d’autre. Il nous arrive souvent d’écrire des morceaux en nous basant sur une série de sons, ainsi le songwriting et le choix des sons sont très liés, pratiquement indissociables. Nous ne souhaitons pas sonner retro, ironique ou cheesy, mais les machines que l’ont utilise donnent probablement une couleur à notre musique qui la rapproche d’une certaine sensibilité, d’une certaine époque - c’est le phénomène de synthèse soustractive des années 80.

Le son de Silk Flowers est souvent qualifié de sinistre mais il semble pourtant se cacher une certaine dimension humoristique, voire un peu de bouffonnerie derrière ce chant de crooner à la Ian Curtis ?

L’ironie c’est qu’il se peut bien que je me suicide la prochaine fois que quelqu’un fait cette comparaison. Vous pourrez peut-être trouver de l’humour là-dedans…

Qu’est ce qui vous a mené à bosser avec Amanda Warner (davantage connue pour être la moitié du duo électro-pop extra-light MNDR) et qu’a-t-elle apporté à votre son ?

On l’avait rencontrée il y a quelques années pendant notre première tournée sur la côte ouest, elle était venue un soir où on partageait la scène avec des groupes noises, un milieu auquel elle est fortement connectée. On a découvert il n’y a que quelques mois qu’elle était également très calée en musique électronique et en synthés, d’où l’idée de travailler avec elle puisqu’elle est dans une position idéale pour comprendre et respecter les divers aspects de notre travail.

Pourquoi “Ltd Form”?

L’un des dilemmes les plus courants auxquels les gens doivent faire face est le sens de leurs propres limites. Presque tout le monde veut être plus que ce qu’il est ou avoir plus ce que ce qu’il a. Nous sommes constamment ramenés à la condition de notre existence - et nous vivons seulement en tant que forme limitée. L’abréviation est une petite blague sur le mot en lui-même qui n’est pas forcément traduisible en français.

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