L’artiste et militant Ai Weiwei avait l’intention de s’installer à l’étranger pour échapper aux harcèlements de la police politique chinoise dont il était victime. Il n’en a pas eu le temps.
C’est peut être ça l’effet papillon. Un printemps arabe, et un homme, à l’autre bout du monde, qui disparaît. Des révolutions arabes éclatent, et la Chine s’inquiète, se méfie et réprime. Depuis deux mois, la Chine a peur de la contagion et écrase, tant bien que mal, les mouvements de contestation. Le printemps chinois ne sera fait que « d’harmonie et de stabilité », de gré ou de force.
Ai Weiwei, un artiste chinois de 53 ans, a été arrêté cette semaine. Il est le fils d’un célèbre poète, Ai Qing, et a participé à la réalisation du grand stade des J.O. de 2008. Il est aussi connu pour ses installations monumentales, notamment pour l’exposition Sunflower Seeds visible à Londres. Mais Ai Weiwei est également un militant. Un de ceux qui n’acceptent pas de se taire, qui refusent de rester dans le rang. Un de ceux qui condamnent, dénoncent, s’opposent: contre la corruption du régime, contre les malversations des dirigeants, contre le manque de liberté. Et pour le respect des droits de l’homme, sans relâche. Quitte à en payer le prix.
Depuis novembre, on avait poliment prié Ai Weiwei de ne pas trop sortir de son domicile, voire d’y rester. Une anodine assignation à résidence. Et puis son atelier avait été détruit, écrasé, pulvérisé, broyé, pour cause d’« autorisation non conforme du terrain ». Sans préavis. Il est à présent arrêté pour « délits économiques présumés ». Jusqu’à quand ? Nul n’ose se prononcer.
- Ai Weiwei et son oeuvre Sunflower Seeds au musée Tate modern à Londres
Et puis un vague souvenir, datant de novembre 2010, revient dans les mémoires. Un cri, un appel à l’aide lancé par Ai Weiwei aux gouvernements occidentaux. Il avait demandé aux dirigeants européens « d’insister sur les droits de l’homme ». Il avait ajouté : « s’ils n’y arrivent pas, ils trahissent fondamentalement les valeurs les plus importantes de l’humanité ». Nicolas Sarkozy a chaleureusement reçu le Président chinois Hu Jintao, David Cameron a effectué une visite officielle en Chine. De gros, très gros contrats ont été signés. La question des droits de l’homme a été quelque peu –passée sous silence ?- omise.
Cette fois, les grands dirigeants occidentaux n’ont pas feint l’ignorance, ils ont unanimement condamné l’arrestation. Reste qu’ils paraissent impuissants, bien impuissants.