Légalité et légitimité de la guerre : voici un sujet âprement débattu par des générations de juristes, mais aussi d'officiers. L'actualité récente incite à revenir sur le sujet, car il ne m'étonnerait pas que des candidats à des concours prestigieux soient testés, à l'écrit ou à l'oral, sur la question..... On me pardonnera donc la banalité de mes propos.
En fait, dorénavant, seule l'ONU semble légitimer la guerre et les interventions armées.
C'est bien sûr vrai de la plupart des interventions armées que nous observons depuis maintenant vingt ans : Balkans, Afghanistan, et aujourd'hui Libye et Côte d'Ivoire. A contrario, certaines guerres s'en sont passées : Kossovo, Irak .
A cet égard, l'article de L. Jospin dans la RDN de ce mois est intéressant quand il explique : "En raison de l'évidence du veto russe au Conseil de Sécurité des Nations-Unies, l'OTAN doit prendre l'initiative. Le 23 mars, elle ordonne le début des frappes aériennes sur la Serbie" : autant dire qu'un responsable politique, pourtant très attaché au droit international et à la justesse des causes, n'a pas hésité en situation à s'affranchir de cette "légitimité" : la guerre demeure un affrontement des volontés, un tribunal de la force.
Notons que les "guerres" menées pour des raisons de légitime défense seraient également couvertes par l'article 51 de la charte.
Ceci explique, entre autres, la relative déshérence de l'article 35 de la Constitution (dont l'ancienne formulation se résumait à : La déclaration de guerre est autorisée par le Parlement.) : on sent bien que l'expression "déclarer la guerre" non seulement appartient au XIX° siècle, mais ne répond plus aux conditions modernes de la conduite de la guerre (à cause du nucléaire). Autrement dit : soit on aurait une légitimation onusienne, soit on aurait une telle montée aux extrêmes qu'on passerait rapidement à l'article 16...
Cela justifie aussi la révision de la Constitution, avec l'article 35 nouveau (voir mon billet) que je rappelle :
- « La déclaration de guerre est autorisée par le Parlement.
- « Le Gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l’étranger, au plus tard trois jours après le début de l’intervention. Il précise les objectifs poursuivis. Cette information peut donner lieu à un débat qui n’est suivi d’aucun vote.
- « Lorsque la durée de l’intervention excède quatre mois, le Gouvernement soumet sa prolongation à l’autorisation du Parlement. Il peut demander à l’Assemblée nationale de décider en dernier ressort.
- « Si le Parlement n’est pas en session à l’expiration du délai de quatre mois, il se prononce à l’ouverture de la session suivante. »
Je m'étonnai, l'autre jour, en mon for intérieur, qu'il n'y eût pas de vote à la suite du débat sur la Libye : en fait, c'était parfaitement correct. Revenir aux textes..... évite de proférer des âneries trop nombreuses. Il en restera toujours bien assez, et je m'en excuse par avance.....
O. Kempf