Depuis la naissance du numérique et son intrusion dans la photo, tout un chacun devient ou le croit du moins photographe, un petit bidouillage et il frôle la perfection, nous donne une vision subjective d’un monde édulcoré ou totalement conformiste. Les grands formats fleurissent et nous donnent à voir le spectaculaire, le pittoresque, l’insolite, ou la pauvreté du portrait non dépourvu d’acné juvénile.
La photo de Stephane Couturier résiste à ces courants et énonce sa pensée, sa perception, son rapport au monde. Ce monde en mutation cet univers qui se construit autour de nous. En effet S C travaille sur la notion du temps, sur les couches de temporalité, strates d’histoire éphémères, travail sur la trace du passé, du changement de nature sur la notion de fragments.
Dans sa photo peu d’anecdotes, peu d’humains, un autre regard sur la nature des choses, sur l’idée de passage. Les photos de Stephane Couturier consistent en un foisonnement articulé de textures, de couleurs, de formes, un agencement de multiples évènements et éléments générés par les bouleversements de la mutation urbaine. La photo bascule dans l’abstraction, entre vision documentaire et œuvre plastique. Les architectures qui sont des volumes par essence, sont ramenées à la surface de l’image en font une œuvre frontale telle une peinture par des aplats . Au-delà de la forme nous pouvons faire lecture de ses photos à plusieurs niveaux
Dans la mezzanine, les œuvres plus anciennes de 1997 à 2005, la seule manipulation effectuée par SC, quasi insoupçonnable, aussi simple qu’efficace, consiste à l’inversion de sens, gauche droite, et à l’intervention entre différentes formes.
Pour les dernière œuvres situées au rez-de-chaussée, « Melting point » plus récentes superposition de photos, pour essayer de perturber la visibilité à la narration d’une photographie, qui a beaucoup évoluée depuis une dizaine d’années, avec l’arrivée du numérique, qui a changé notre vision et notre regard sur la photographie. Ce qu’on croyait réel et vrai il y a une décennie, est sujet à suspicion, l’idée de l’artiste a été de réfléchir à cette évolution du regard des gens, de prendre 2 images en une, en les superposant, sans autre manipulation, sans changement de couleurs, pas de découpage, comme deux calques superposées, en jouant sur l’opacité de la transparence. Cela permet un vision du presque réel, avec la sensation du bruit de la chaîne de montage, comme en mouvement et en relief de l’endroit visité (l’usine Toyota ). C’est un travail de complexification et de densification de l’image, mais il correspond aussi à la complexification de la société où nous vivons, avec tous les nouvelles techniques liées à Internet, comme les ordinateurs, les Ipad et autres Iphones, qui permettent d’effectuer une foule de choses simultanément. De ce fait le regard a évolué.
C’est un parcours d’un travail d’une douzaine d’années entre la France (Valenciennes) Shangar en Inde, ou les US, en partant d’une base classique, il désire garder l’ancrage du documentaire, en privilégiant la notion de fragments, une intervention dans le cadrage, ce que l’œil va regarder dans le sujet, et d’être moins narratif, en permettant un regard moins statique, et de faire en sorte que la photo se rapproche d’une vidéo ou des tableaux photographiques avec des masses de couleurs, des compositions picturales.
Il a appliqué ce même travail de superposition d’images à 2 enregistrements de vidéos, faits à Brasilia, dans l’axe monumental, avec le noeud autoroutier qui dessert toute la ville. A nous de détecter les incohérences, l’ambiguïté du regard, réalité ou fiction ? Réalité tangible ou réalité virtuelle., réflexion sur le monde qui nous entoure, avec un effet hypnotique, des photographies qui nous interpellent.
Jusqu’au 5 juin 2011-04-06 pour poursuivre à la LandersGalerie de Linz (Autriche)
Photos de photos et une vidéo d’un photographe que vous pouvez consulter dans mon album