Les poissons d’avril se perdent. Ces plaisanteries que distillait la presse le 1er avril, sont en voie de disparition. Jadis, quand j’emploie ce mot j’ai l’impression de rameuter les âmes de mes grands-parents mais d’un autre côté je suis d’âge à être le grand-père de certains d’entre vous. Jadis, autrefois, comme vous voulez, le premier jour du mois d’avril il était courant de se livrer à quelques facéties du genre, accrocher un poisson en papier dans le dos d’un ami ou d’un professeur à l’école pour les plus hardis et la presse pour sa part, annonçait des informations erronées et farfelues.
Tout le monde riait de ces bêtises, sauf les pisse-vinaigre évidemment, et dénicher les poissons dans les journaux équivalait à trouver la fève dans la galette des rois. A ces époques il est vrai, on s’amusait d’un rien, d’une blague lue dans l’Almanach Vermot ou d’un dessin humoristique vu dans Le Hérisson, ce journal satirique imprimé sur du papier de couleur rose si je me souviens bien.
Honnêtement, avec le recul, je suis d’accord pour dire que tout cela ne volait pas bien haut, mais ça ne faisait de mal à personne (excepté à l’amour propre de ceux qui rentrant chez eux le soir, découvraient qu’ils s’étaient trimballé un poisson dans le dos toute la journée !) et au moins cela arrachait un sourire à tous. Ca n’a l’air de rien un sourire, mais quand toute une société se met à l’heure du rire, cela me paraît un bon signe sur son état général. Je vous laisse faire le diagnostic de notre société actuelle.
Vendredi, j’ai bien repéré un poisson par-ci, par-là, à la radio, mais désormais ils sont lourdement lancés par les animateurs et aussitôt démentis dans les secondes ou minutes qui suivent ; on n’ose plus ces canulars, par peur peut-être des réactions imprévisibles des gens maintenant ? Ou plus simplement parce que tout le monde accepte sans broncher ce qui se dit dans les médias, prenant toutes les annonces pour argent comptant. Il faut dire à la décharge de l’auditeur de base qu’on entend tellement d’énormités à la télé ou à la radio de nos jours – quand on prend réellement le temps d’écouter ce qui y est dit - qu’il est difficile parfois de faire le tri entre les conneries « réelles » liées à notre monde moderne et les âneries annoncées parce qu’elles n’ont pas été vérifiées.
Finalement, à l’inverse de ce que je voulais prouver, peut-être que les poissons d’avril ont envahi les médias, qu’ils sont légions toute l’année. A la réflexion, non seulement cela ne m’étonnerait pas, mais ça expliquerait toutes ces informations ahurissantes qui me font hausser les sourcils en permanence dès que j’écoute radio ou télévision !