Les arguments en faveur de l’indexation automatique des salaires semblent défendables à première vue. Une simple analyse montre pourtant à quel point elle est antisociale.
Quels sont les arguments en faveur de l’indexation des salaires ?
Les deux arguments principaux sont d’une part que cela préserve le pouvoir d’achat des travailleurs et d’autre part que cela soutient l’économie.
Pourquoi les prix augmentent-ils ?
Afin de pouvoir vérifier si ces deux affirmations sont exactes, il est important de se rappeler la raison pour laquelle les prix augmentent. Si les prix augmentent, c’est qu’il y a un déséquilibre entre l’offre et la demande.
Les solutions : autoritaire ou libre
Plusieurs solutions existent pour rétablir l’équilibre.
Rationner la demande ne change rien au problème. Les consommateurs ne peuvent plus acheter la même quantité qu’avant. Le prix n’augmentera pas, mais les consommateurs devront réduire leur consommation. Enfin, augmenter l’offre est la plupart du temps impossible à réaliser. Sauf à subventionner l’offre, ce qui ne fait que camoufler une hausse des prix, puisque ce sont bien les consommateurs qui payeront cette subvention.
Dans les pays où la liberté individuelle existe, ce sont les agents économiques eux-mêmes qui réaliseront cette correction du déséquilibre. Les prix vont augmenter, ce qui aura comme conséquence d’une part que les consommateurs vont diminuer leur consommation de ce produit, soit en étant économe (rouler moins en voiture, chauffer moins, …), soit en remplaçant le produit ou le service par un autre (utiliser les transports publics, utiliser une autre source d’énergie, …). L’autre conséquence est qu’avec un prix plus élevé, il deviendra intéressant pour les producteurs de produire plus. Pa exemple la production de pétrole revient dans certains cas à plus de $100 le baril. Il est donc inutile d’en produire quand le prix de ce baril est inférieur à $100.
Quelle est la conséquence de l’indexation des salaires ?
La première conséquence est que la pression d’augmentation de prix du produit ne diminuera pas. Puisque les travailleurs verront leur salaire augmenter, ils continueront à demander la même quantité de ce produit et le prix continuera à augmenter. Du moins pendant quelques temps, car les consommateurs modifieront tout de même leurs habitudes d’achat. Et achèteront d’autres produits qui alors verront leur prix augmenter, ce qui augmentera à nouveau l’index, et le cercle infernal pourra s’initier.
Cet effet inflationniste de l’index est heureusement limité d’une part par la manière dont il est calculé, et par l’effet de retard que ce calcul implique. Il est malheureusement limité par un autre effet pervers de l’indexation : la diminution du nombre de travailleurs. En effet, cette augmentation de salaire est exclusivement supporté par les employeurs. Qui n’ont que deux solutions pour maintenir leur activité : augmenter leurs prix, ce qui alimente l’inflation, ou diminuer leurs coûts. Pour diminuer leurs coûts, ces employeurs seront obligés de diminuer le nombre de travailleurs, par exemple en remplaçant des hommes par des machines. Ou alors ces entreprises partiront vers des contrées où les coûts salariaux sont moins élevés. Ce chômage supplémentaire diminuera le revenu total du pays, ce qui diminuera la demande de produits et donc l’inflation.
Si le pays a encore sa propre monnaie, il peut contrer ces effets négatifs par une dévaluation. Ce n’est pas le cas de la Belgique qui utilise l’euro comme des pays à coûts salariaux bien inférieurs aux nôtres…
L’indexation automatique augmente le pouvoir d’achat des plus hauts salaires
Sans rentrer dans les détails de la manière dont l’indice des prix est calculé, celui-ci reflète les prix d’un « panier de la ménagère moyen ». Or si les prix des produits de première nécessité augmentent, et les produits de luxe n’augmentent pas ou peu, l’indice des prix augmentera. Le taux d’augmentation sera inférieur à l’augmentation des prix des produits de première nécessité, et supérieur à l’augmentation des prix des produits de luxe. Ceux dont les dépenses sont principalement des produits de première nécessité ne pourront de toute manière pas continuer à consommer la même quantité de produit, tandis que les travailleurs ) haut salaires pourront consommer beaucoup plus de produits dits de luxe. On peut se poser la question de savoir si la personne qui gagne 1.000.000 € par an a besoin de voir ce salaire être indexé pour « maintenir son pouvoir d’achat ».
Il est évident qu’il faut veiller à ce que les personnes qui ont des salaires très bas soient protégées ds hausses des prix qu’elle ne peuvent supporter. Mais dans ce cas, pourquoi ne pas simplement augmenter significativement le premier palier de taxation, par exemple en utilisant un indice des prix des ménages à bas revenu? On peut se poser la question de savoir si la personne qui gagne
1.000.000 € par an a besoin de voir ce salaire être indexé pour »maintenir son pouvoir d’achat ».
L’indexation des salaires est donc anti-sociale puisqu’elle a comme conséquence une diminution du volume de l’emploi, principalement des travailleurs les moins qualifiés et avantage les hauts salaires.
L’indexation des salaires ne soutient pas l’économie
L’argument est que l’augmentation des salaires permettra aux travailleurs de continuer à consommer. Mais cet argent supplémentaire n’est pas créée à partir de rien. Cet argent vient soit des augmentations de prix, soit des économies réalisées par l’engagement de moins de personnes. Donc cette augmentation ou maintien de consommation se fait au détriment de la consommation d’aitres consommateurs. Et surtout nous avons montré que le risque est que des entreprises délocalisent, sans parler de la tentation des consommateurs d’acheter dans des pays limitrophes. Ce qui augmentera la consommation ans ces pays, mais diminuera de nouveau la consommation intérieure.
En conclusion les seuls arguments de maintien de l’indexation automatique des salaires sont d’une part le fait que c’est un argument électoral de poids, à condition que l’électeur ne se rende pas compte que cette indexation est anti-sociale et le fait que cela évite des négociations salariales annuelles. Et nous savons combien négocier en Belgique est difficile…