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PS : un projet qui ne fait pas rêver

Publié le 05 avril 2011 par Hmoreigne

 Martine Aubry dévoile officiellement aujourd’hui ce qui est présenté comme le projet du PS pour 2012. Le texte, censé être passe-partout de façon à pouvoir s’adapter à celui ou celle qui sortira vainqueur des primaires, se veut réaliste et marqué à gauche. Il est surtout sans saveur. Une addition de mesures sans épine dorsale politique qui aura bien du mal à enchanter les foules et la campagne de 2012.

Martine Aubry n’échappe pas à la malédiction qui frappe les premiers secrétaires du PS et qui a pour nom synthèse. Le consensus mou, c’est le ciment des socialistes. Benoît Hamon peut bien rouler des mécaniques en affirmant à propos du projet que “Ce ne sera pas une de ces synthèses dont nous pouvons avoir le secret et qui consiste à faire plaisir à tout le monde”. Le côté revendiqué « clivant » des propositions par rapport à la droite a le tranchant d’une asperge.

Un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir” disait Aimé Césaire. La vérité vaut aussi pour les formations politiques qui cèdent à l’amnésie. Martine Aubry peut se gargariser de grandes déclarations et de propos ronflants, de « Redressement de la France » et de «justice sociale », les Français ont de la mémoire. Chien échaudé craint l’eau froide.

Les dirigeants socialistes se trompent. Penser qu’il leur suffit de sortir un catalogue pour être crus. Or, s’il est un élément qui leur fait défaut au regard de leur passé aux affaires, c’est la crédibilité.

Le rouleau compresseur médiatique a fait rentrer dans la tête des Français le fait que les caisses sont vides et les marges de manœuvre politiques très ténues. Là où le volontarisme de Nicolas Sarkozy s’est cassé les dents, que pourront faire les socialistes ?

Plus que des mesures phares, c’est le retour d’une éthique, d’une morale qui est souhaité. C’est que le futur chef de l’Etat ne sois pas un nouveau bateleur de foire mais un repère, un phare dans une période sombre où les habits du monde d’hier se délitent lentement. Or le PS donne l’impression de vouloir nous ouvrir les portes de l’avenir avec les clés du passé.

C’est bien une compréhension du monde qui fait défaut à la rue de Solferino. Comme si, enfermés dans la gestion de leurs exécutifs locaux, les socialistes n’avaient plus comme seule ambition que de cultiver leur jardin.

BHL dit sans doute beaucoup d’âneries mais dans le flot surnagent quelques vérités. Comme par exemple lorsqu’il annonçait en juillet 2009 que, « le PS est mort ». Certes, la machine bouge encore mais, l’encéphalograme est plat.

Le PS va mourir ? Non. Il est mort. Personne, ou presque, n’ose le dire. Mais tout le monde, ou presque, le sait. (…) La seule chose sûre c’est que ce Parti qui fut celui de Blum et de Jaurès est en train de perdre ce qui lui restait d’âme – et doit disparaître“, jugeait péremptoire Bernard-Henri Lévy.

A quoi bon se voiler la face? On est à la fin d’un cycle. Le PS est dans la situation du PCF de la fin des années 1970, quand la désintégration s’amorçait et qu’on tentait de la conjurer par des formules incantatoires sur, déjà, la ‘refondation’, la ‘rénovation‘”, rajoutait le belliqueux philosophe hostile à tout acharnement thérapeutique.

En fait le PS a subi ce qu’il redoutait le plus. Une lente mais inexorable transformation en SFIO bis. Un parti d’élus, de salariés ou d’obligés d’élus. Le fonctionnement des fédérations socialistes de l’Hérault et des Bouches-du-Rhône est beaucoup moins caricatural qu’il ne paraît. Un parti sans base militante, à peine 120 000 pour un corps électoral de l’ordre de 45 millions d’électeurs potentiels.

Privés de militants capteurs, le PS s’est peu à peu coupé de la société civile et s’est autocentré sur ses petites affaires, essentiellement la gestion des places. Dans ce contexte le projet présenté constitue le chant du cygne. Il est certes correct techniquement  mais déconnecté de la société qui attend autre chose en horizon que la grisaille du gestionnaire.

Le PS s’entête dans une approche calquée sur celle de Lionel Jospin en 2002 dans laquelle on pense que, sous prétexte d’un projet solide, on ne peut pas perdre. La plume du projet en a pourtant conscience. “Ni Jospin ni Royal n’ont perdu par insuffisance de mesures techniques, mais par défaut d’un projet de société, inscrit dans un récit national“, s’excuse presque Guillaume Bachelay. En filigrane, les Français attendent du futur chef de l’Etat qu’il soit le passeur entre un monde connu qui disparaît et un nouveau, qui reste à inventer.

La tonalité choisie par Martine Aubry marque un reniement voire l’expiation de la campagne de Ségolène Royal raillée pour son improvisation. Et pourtant la présidente de Poitou-Charentes avait démontré ce dont Martine Aubry semble bien dépourvue : dépoussiérer le parti et intéresser le français ordinaire à la politique.

Les imperfections du projet ramènent au calendrier arrêté par les socialistes. Fallait-il tenter de verrouiller le futur candidat par un projet préformaté ou fallait-il lui laisser la possibilité de lui donner une coloration personnelle ? L’avenir le dira mais le bagage est aujourd’hui plus encombrant qu’autre chose.


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