Avez-vous suivi le lancement du site de Québec Leaks?
L'annonce de l'avènement d'un site québécois dans la mouvance de Wikileaks avait attiré mon attention. Je ne savais trop à quoi m'attendre, mais les idées de dossiers ne manquaient pas; gaz de schiste, corruption dans la construction, contributions douteuses aux partis politiques, scandales à la ville de Montréal, corruption à la mairie de Laval, etc.
Puis, le lancement officiel a eu lieu. Le 9 mars dernier, j'ai donc tapé l'adresse de Québec Leaks dans mon fureteur... et j'ai découvert que son seul document était un communiqué de presse annonçant le lancement officiel. On dévoilait du même coup le nom du porte parole de l'organisation, et c'est l'identité de ce dernier qui allait retenir l'attention des quelques rares articles relatant la création du site.
Rien d'autre.
Je n'étais ni déçu ni surpris, puisque je ne savais pas à quoi m'attendre du site. Par contre, j'avais imaginé que l'organisation aurait voulu marquer un coup de force lors du lancement pour se faire un nom; pour attirer les visiteurs, ce qui aurait probablement entraîné quelques fuites intéressantes pour eux par la suite. J'avais imaginé que les fondateurs du site avaient déjà des documents, et qu'ils démarreraient en lion.
Le lancement officiel a donc eu l'air d'un pétard mouillé, puisque Québec Leaks annonçait en fait n'avoir aucun document concernant la transparence et la gouvernance au Québec (le mandat officiel du site), ce qui revenait à dire que l'affaire était en fait toujours à l'état de projet.
Ce n'est que trois semaines plus tard que le site allait publier son premier document, et, comme fuite initiale, là encore, on a eu droit à un pétard mouillé. L'entente entre la Ville de Québec et Québécor concernant le projet d'amphithéâtre à Québec était disponible à la ville pour qui en faisait la demande; on parle donc ici d'un document public. Quoi qu'il en soit, il est certes plus accessible via le site qu'en effectuant une demande écrite à la Ville de Québec. Toutefois, après lecture du document, je ne peux pas dire qu'il révèle des informations qui n'avaient pas déjà été rapportées par les médias traditionnels lors de la signature de l'entente en question.
Une fois de plus, le démarrage du site s'avère plus mou que ce que ne laissait croire les ambitions que l'on énonce dans sa mission ou dans son communiqué de presse.
Sinon, Québec Leaks parle d'une autre entente (Radio-Canada et Gesca en 2001) qui a déjà été rendue publique en 2008... et de d'autres documents sensibles.
On est donc très loin de Wikileaks. C'est normal, me direz-vous, puisque même Wikileaks a pris du temps à se développer; on n'a pas publié les vidéos sur l'Iraq ou les journaux de guerre en Afghanistan ou encore les câbles diplomatiques lors du lancement du site. La différence, c'est que maintenant que les internautes savent ce que sont les sites comme Wikileaks ou Openleaks, un site qui se réclame de cette mouvance se doit de livrer un minimum de marchandise. Si demeurer inactif pendant quelques mois n'est pas inhabituel pour ce genre d'organisation, être inactif au lancement était une drôle de stratégie; pourquoi ne pas avoir attendu quelques mois avant de lancer le site avec des documents prêts à être publiés?
Québec Leaks n'est peut-être qu'un feu de paille, l'avenir nous le dira, mais pour devenir un réel site de référence, l'organisation devra montrer qu'elle peut faire mieux que publier des documents publics; elle devra montrer en fait qu'elle peut même faire mieux que les médias traditionnels, qui, au Québec, peuvent être parfois très efficaces (pensez l'équipe de l'émission Enquête de la SRC par exemple). Je ne suis pas certain que le québécois moyen ait la fibre leaks, ou la trempe pour collaborer à ce genre de projet.
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Note amusante: Québec Leaks (.org) a déjà un concurrent (.com) qui n'a pas plus de documents à offrir aux visiteurs que son homonyme et qui est (déjà!) en hibernation.