la percée du Front de gauche

Publié le 04 avril 2011 par Despasperdus

Attention, ce billet n'est pas un poisson d'avril.

Dans Le Monde du 24 mars 2011, Michel Michel Delberghe donne une information étonnante :

« En nombre de voix, la percée du Front national paraît relative. Il recueille 15 812 voix de moins qu'en 2004 (pour mémoire : des cantonales), année au cours de laquelle il était présent dans 409 cantons supplémentaires ».

Pourtant, le Front national monopolise l'actualité des médias dominants qui ne cessent de vanter ses résultats mirobolants, sa progression fulgurante, son évolution grâce à sa cheftaine...

Ainsi, la percée du Front de gauche aux élections cantonales tant en termes de voix, de pourcentages et d'élus est passée complètement inaperçue ! Comme si rien ne s'était produit à gauche !

Ci-dessous, l'évolution du vote Front de gauche par rapport aux précédents scrutins :

Combien devra faire le Front de Gauche pour qu'on parle de lui ?

C'est le titre d'un excellent article de Blaqui Boulaf que nous reproduisons ci-dessous :

Les médias glosaient sur les prétendues percées d'Europe Ecologie et du Front National, en omettant totalement le score à deux chiffres du Front de Gauche...

Les préoccupations des grands médias sont ainsi faites qu'un rassemblement comme le Front de Gauche, ayant obtenu plus de 10 % au premier tour, et 121 élus à l'issue du second, ne paraît pas digne d'intérêt pour les éditorialistes des grands quotidiens nationaux, hormis, bien évidemment, l'Humanité, qui aura été exemplaire avant, pendant et après les cantonales, en faisant beaucoup d'articles, de reportages, d'interviews et de débats, ainsi que de nombreux appels à la mobilisation citoyenne et à la participation électorale. Les autres quotidiens ont beau jeter des larmes de crocodile en constatant l'historique taux d'abstention, il ne tenait qu'à eux d'écrire et de mettre en valeur des reportages sur ces cantonales au sein de leurs colonnes. Et encore heureux (si l'on peut s'exprimer ainsi...) que l'UMP ait focalisé les débats dans l'entre-deux tours avec sa cacophonie sur les consignes de votes, cela a semble-t-il réveillé les journalistes qui ont ainsi parlé du scrutin - même si ce n'était pas pour les raisons qu'on aurait pu espérer et que cela a peut-être contribué à dégoûter encore plus les électeurs de la politique - et ce n'est pas un hasard si la participation a sensiblement augmenté au deuxième tour par rapport au premier.

Mais je suis désabusé de constater que la plupart des quotidiens se répandent sur des pages entières du score du FN (la promotion organisée et orchestrée par ces mêmes journaux autour de "Marine" depuis des mois n'y est sans doute pas étrangère...), sur les bisbilles à l'UMP, sur une prétendue percée d'Europe-Écologie-les-Verts (qui n'obtient qu'une vingtaine d'élus, pas toujours de manière très fairplay vis à vis de ses partenaires de gauche...), qui octroie même une interview à...François Bayrou (en s'évertuant à le classer au centre ni gauche ni droite, comme si le MoDem n'était pas un parti de centre-droit...), mais ne dit rien ou presque sur l'implantation du Front de Gauche qui, sans alliance avec le PS, parvient à augmenter les scores du PCF en 2004 et 2008, et augmenter significativement son nombre d'élus !

Alors il est temps de le dire, une des données importantes de ce scrutin est la progression du Front de Gauche. Conjugué à l'abstention, cela indique que l'électorat politisé, ou, du moins, qui s'intéresse suffisamment à la politique pour faire partie des quelques Français qui se sont déplacés pour ces cantonales, porte une attention toute particulière sur le Front de Gauche et son programme proche des citoyens et des problématiques des élections (comment expliquer que le FN soit fort aux cantonales sur un programme parlant de sécurité ou d'immigration, thématiques sur lesquelles les Conseils Généraux ne peuvent pas agir). De plus, beaucoup d'électeurs de gauche, qui votent traditionnellement socialiste, ou qui votaient autrefois communiste, semblent perceptifs au discours et aux méthodes citoyennes du Front de Gauche, et reviennent vers une gauche ancrée dans le social, une sorte de prolongation politique dans les urnes de la colère qui grandit et des mouvements sociaux de l'automne dernier. L'apport du Parti de Gauche et de Mélenchon, pour redonner espoir à des électeurs socialistes consternés et désespérés par la paralysie d'un Parti socialiste de plus en plus mondain et plus proche des potins que des programmes et projets politiques, semble jouer un rôle important. La tradition et la culture de gouvernement du Parti Communiste Français et de ses nombreux élus permet à ce rassemblement de rester dans le concret et la crédibilité, sans tomber dans une radicalité stérile.

Outre la Gauche Unitaire, le Front de Gauche doit s'ouvrir à d'autres formations (FASE, M'PEP...), pour étendre et rassembler le plus possible les branches de toute "l'autre gauche" de transformation sociale au cœur de cette gauche enracinée dans le mouvement social et qui a pour but d'agir concrètement, radicalement et efficacement dans les institutions.

Blaqui Boulaf [1] [2]

Notes

[1] L'Humanité - Combien devra faire le Front de Gauche pour qu'on parle de lui ? Heureusement, il y a l'Huma !

[2] Sur le même sujet : Jean-Luc Mélenchon - Lendemain de vote