Merveilleux parfums de Sayama

Par Florentw
Pour en finir avec ma selection, voici trois thés de Sayama (departement de Saitama).
Plus exactement, il s'agit de trois thés produits par Hiruma Yoshiaki.
Est-il encore besoin de présenter cet avant gardiste du thé japonais ? Pour faire rapide, c'est un très talentueux producteur, qui s'illustre aussi bien dans les milieux très académique des concours généraux et en tant que maître de temomi-cha (thé malaxé/roulé à la main), que dans la production d'une grande variété de thés originaux, particulièrement innovants. Cela peut être des thés semi-fermentés, s'inspirant des méthodes chinoises, mais aussi et surtout son travail sur le flétrissement des sencha.
L'idée, qu'il n'est bien sûr pas le seul à partager, et que ce qui manque au thé japonais, au sencha, c'est le parfum. Or, la clé du parfum extraordinaire des thés wulong est le flétrissement. Ainsi, depuis nombre d'années, nombreux son les producteurs à faire légèrement flétrir leurs feuilles de thés avant l'étuvage pour ne faire ressortir un peu plus de parfum (c'est par exemple le cas du Kôshun et du Inzatsu131 de Fuji de ma sélection). Mais Hiruma-san est allé bien plus loin, en systématisant cette démarche jusqu'à la conception d'une machine, "UVT-Hiruma", destinée au flétrissement des feuilles. En fait, tous ces sencha y passent (seuls les thés destinés au concours font exceptions et ne sont par conséquent pas fabriqués dans son usine).
Ses "sencha" comme ses "bihakkô-cha" (微醗酵茶 thés micro fermentés) passent par cette étonnante machine, et le résultat ne l'est pas moins, étonnant : un enivrant parfum fleuri, qui ne peut que nous rappeler aux wulong au faible niveau d'oxydation.
J'ai sélectionné trois de ces thés. Un "sencha" et deux "micro-fermentés".
Le sencha est un fukamushi (étuvage long) obtenu avec le très remarqué cultivar Yumewakaba (très bonne réaction au processus de flétrissement). Son goût est suffisamment prononcé, sans astringence déraisonnable, de la douceur, et une saveur fleurie et crémeuse divine, qui se retrouve dans le parfum velouté qui se dégage de cette jolie liqueur verte (tous les cultivars ne montrent pas une aussi jolie couleur après flétrissement !).

Une chose qui m'a étonnée, c'est que le parfum de ce Yumewakaba est bien plus prononcé que sur la version "micro-fermentée".  Monsieur Hiruma explique cela par le fait que Yumewakaba n'est peut être pas adapté à un étuvage standard (les micro-fermentés sont des futsumushi sencha, étuvage standard donc).
Le second est un bihakkô-cha, cultivar Sayama-kaori. C'est le cultivar représentatif du département de Saitama, qui connu son heure de gloire un peu partout, mais qui est en perte de vitesse depuis une dizaine d'année.
Avec un parfum fleuri dans la même lignée, plus piquant, sans le côté lacté, ce thé offre une saveur elle aussi plus puissante, avec plus d'astringence, se montrant ainsi plus stimulante, rappelant un peu ainsi l'image classique des thés de Sayama. Attention, quand je parle ici d'astringence, il s'agit ici d'une astringence maîtrisée, agréable, pas d'un cheveu dans la soupe.

Enfin, le dernier, encore un "micro-fermenté", mais en valeur le cultivar Musashi-kaori, qui compte parmi ces ancêtre le cultivar Luanze.
Ainsi, notre délicieux parfum fleuri est encore présent, ici peut être le plus subtil, tout comme la saveur, douce, délicate, aérienne. La liqueur est également d'un très joli vert.

Bref, trois thés complétement atypiques. Dans la même lignée, mais avec chacun une personnalité propre. Velouté pour le premier, force pour le second, et délicatesse pour le dernier.
En ce qui concerne l'infusion, je ne m'y attarderai pas trop. Les possibilités sont ouvertes, mais je pense qu'il faut éviter les extrêmes avec ces thés. Une trop basse température ne mettra pas en valeur leurs parfums, et une trop haute température les rendra trop astringent, voir amère. Surtout, pas de temps d'infusion trop long, là encore peu favorable à leur saveur.