Je ne vous cache pas le trouble derrière cette histoire, nimbée de beauté éthérée, de contemplation de la vie, d'intuition et de sens moral à double tranchant. J'ai été séduite par toute la première partie du récit, me glissant dans la peau de Lenah afin d'apprécier, comme elle, son cadre de vie et ses petits bonheurs quotidiens. Lenah est très sensible aux détails quelconques, pose un regard neuf sur des banalités, ose de nouvelles expériences, va au-devant des rencontres. Elle connaît le secret des plantes et des herbes, parle leur langage, cultive un rapport quasi mystique avec sa nature d'humaine. Elle s'entoure ainsi d'une aura délicate et qui subjugue. J'étais hypnotisée ! La partie sentimentale est plus accessoire, même si elle participe au charme général. Lenah est complètement fascinée par Justin, quand elle l'évoque, c'est en des termes d'aveuglement et de magnétisme. J'ai trouvé que c'était très beau, et pas niais. Mais de manière générale, l'auteur a su donner un charisme fou à chacun de ses personnages.
La transition entre la première et deuxième partie est un peu plus biaisée et j'ai regretté certaines réactions et attitudes, le basculement de situation fait entrevoir une réalité plus amère et pesante. Jusqu'alors, j'avais de Lenah une image d'icône intouchable, à la façon d'une Audrey Hepburn dans Breakfast at Tiffany's, et j'étais envoûtée par cette atmosphère classieuse. En fait, tout ce qui survient aux alentours du Bal d'Hiver et après m'a un peu moins touchée. C'est brouillon et vaguement larmoyant, l'action part un peu dans tous les sens, et n'est même pas très crédible par instants. Ceci dit, cela ne m'a pas empêchée d'être captivée par le dénouement. (L'édition en VO offre le premier chapitre du tome suivant, cela atténue le suspense mais réactive l'envie de se procurer la suite très vite !) Il ne faut pas se tromper sur ce roman, il est plus tourné sur l'introspection, sur son ambiance vaporeuse et subtile, et beaucoup moins sur les actes et les retentissements. C'est une histoire délicate, avec une héroïne touchée par la grâce, qui laisse planer un certain spleen. Personnellement, j'ai beaucoup aimé cet aspect.
Humaine - Rebecca Maizel
Albin Michel, coll. Wiz (2011) - 450 pages - 16€
traduit de l'anglais (USA) par Valérie Le Plouhinec