GRETCHEN LA PÂLE
Elle est de la beauté des profils de Rubens
Dont la majesté calme à la sienne s’incline.
Sa voix a le son d’or de mainte mandoline
Aux balcons de Venise avec des chants lambins.
Ses cheveux, en des flots lumineux d’eaux de bains,
Déferlent sur sa chair vierge de manteline;
Son pas, soupir lacté de fraîche mousseline,
Simule un vespéral marcher de chérubins.
Elle est comme de l’or d’une blondeur étrange.
Vient-elle de l’Éden ? de l’Érèbe ? Est-ce un Ange
Que ce mystérieux chef-d’oeuvre du limon ?
La voilà se dressant, torse, comme un jeune arbre.
Souple Anadyomène… Ah ! gare à ce démon !
C’est le Paros qui tue avec ses bras de marbre!
(Emile Nelligan)