Magazine Cinéma
La disparition soudaine de son enfant est un instantané dramatique foudroyant, terreau absolument génial pour y faire germer les pires tourments humains. Dans Keane, Kerrigan embrasse une nervosité à l’intensité saisissante, dans Flight Plan, Schwentke adopte le prisme du thriller. Le madrilène Gabe Ibáñez, pour son premier long-métrage, lui, préfère miser sur une atmosphère mélancolique insulaire, sur une photographie aussi sublime qu’inquiétante, et sur le jeu tout en nuances d’Elena Anaya (Lucia y el sexo) pour y jouer sa partition tragique. L’errance de Maria – qui commence à bord d’un ferry où disparaît mystérieusement son petit garçon Diego- prend alors de belles allures fantastiques, confirmant tout le bien que l’on pense du cinéma ibérique (Los Ojos de Julia dernièrement), et des accents dramatiques bouleversants qui confèrent à un scénario un peu prévisible le charme languissant des égarements de l’âme.
Présenté à Gérardmer notamment, Hierro est d’une beauté envoûtante, nappé de teintes crépusculaires et de touches d’une tristesse infinie. Un tableau endeuillé et psychologique d’un cauchemar feutré, à la douleur sourde- et, surtout- un véritable exercice de style pour Ibáñez, qui offre un voyage monstrueux, onirique et éploré au cœur du chagrin d’une mère. Son décor, splendide et élégiaque, confère une coloration toute singulière à son récit, appuyant le trouble maternel, captant au vol les non-dits, les larmes refoulées, et le déni. Ralentis, silences et contemplations apparaissent alors comme autant de compagnons de route vers l’acceptation cruelle et déchirante d’une (morte) vivante, piégée dans un leurre obsessionnel, et obsédant.
Sortie France: prochainement.