31 mars 2011
Quatrième de couverture :
" Ça ne vaut plus le coup d'avoir mes règles. Ma tante a dit : t'as perdu ta langue, Anne ? t'étais plus causante avant. C'est plutôt la leur de langue que j'ai perdue. Tout est désordre en moi, ça ne colle pas avec ce qu'ils disent."
Histoire d'une adolescente comme les autres, qui cherche à communiquer, à comprendre. Mais rien, dans le langage de ses parents, de l'étudiant qu'elle a rencontré, dans les mots des livres même, ne coïncide avec la réalité de ce qu'elle vit et elle se trouve renvoyée à la solitude.
Anne a 15 ans. Elle vient de réussir son BEPC et va passer l'été avec ses parents, à son grand désarroi. Elles ne s'entend pas avec eux, ils ne se comprennent pas, et elle subit leur présence et les chamailleries du couple. Elles les trouvent bêtes, mesquins, ploucs.
Elle voudrait être plus libre, sortir, voir ses amis. Elle s'ennuit. Elle se sent mal dans sa peau, n'aime pas son corps, sa poitrine plate, ses lunettes qu'elle cache dès qu'elle sort de la maison, les vêtements que choisit pour elle sa mère.
Elle attend l'amour et croit l'avoir trouvé quand elle rencontre Mathieu. Mais leur brève relation sera vite interrompue quand il découvrira qu'elle l'a trompé avec Yann. Elle veut se faire aimer mais semble ne pas comprendre la différence pourtant fondamentale entre l'amour et l'amour physique, et le fait que d'avoir des relations sexuelles avec un garçon ne les fera pas obligatoirement tomber amoureux d'elle. Elle rencontrera ensuite Michel, mais bien vite, son corps se rebellera et exprimera à sa façon ce mal-être grandissant : elle n'a plus ses règles. Elle s'isole, n'est plus la bonne élève d'autrefois, se renferme sur elle-même...
Je n'ai pas du tout aimé l'écriture de Annie Ernaux, bien qu'elle soit vraiment totallement en adéquation avec le sujet et le personnage. On a l'impression d'être dans la tête de Anne, et ce long monologue monocorde, ces pensées mises en mots et ressassées nous aident à percevoir la détresse de l'adolescente. Il faut donc reconnaître à l'auteur le talent de savoir décrire à la perfection les interrogations, tourments, angoisses de cette jeune fille. Et ce roman est tout à fait intéressant à ce point de vue, puisqu'il décrit de façon très précise cette lente descente vers la dépression, vers l'isolement de l'adolescente. Un sujet qui fait froid dans le dos, et réfléchir également. Le roman n'a fait que me conforter dans mes convictions : c'est en parlant, en échangeant, en communiquant sans arrêt que nous pouvons soutenir nos enfants, et les protéger de leurs peurs et d'eux-mêmes. La complicité peut permettre d'éviter de telles dérives, et bien des drames encore plus terribles. Les sentiments de Anne sont extrêmement bien décrits, disséqués même, on entre littéralement dans sa tête, c'est assez impressionnant, d'autant plus qu'on se sent totalement impuissant, on aimerait pouvoir crier aux parents que leur fille va mal, qu'il leur faut lui parler...
A lire donc si vous voulez en savoir plus sur les adolescents et éviter pour vos enfants de tels problèmes.
L'avis très enthousiaste de Cécile Qd9 que je remercie du prêt de ce roman.