Lorsque disparut, au Mans, "Plurielle", la librairie de James Tanneau, qui avait été le repère de tous les amoureux de la littérature et de la poésie, qui avait vu passer tant de ventes-signatures et tant de lectures, nous avions cru qu'une certaine conception de la littérature était morte avec lui.
Et puis naquit "L'herbe entre les dalles", nichée rue des Ponts Neufs, entre une crèperie, un bar et le tout nouveau Carrêt Plantagenêt, alias le musée archéologique (lui-même logé dans une ancienne imprimerie : tout un symbole). Nous y retrouvions l'ambiance feutrée, et surtout le bonheur d'y retrouver de petits éditeurs à peu près ignorés des "grandes" librairies, et les auteurs que nous aimons, Prigent et Pennequin, Yves Mazagre et Rémy Froger...
Mais voilà : cette littérature peu commerciale ne se vend pas, ou peu. Et puis, "L'herbe entre les dalles" déménagea, oh, pas loin, il suffit de faire le tour du pâté de maisons ; mais elle a quitté le petit nid douillet, entre le musée et la crèperie, où à vrai dire elle étouffait un peu, pour la vaste, et un peu froide, et fort peu commerçante Avenue de Rostov-sur-le-Don.
Et c'est pourquoi je reçois aujourd'hui cet appel pathétique d'un ami poète : il faut sauver "L'herbe entre les dalles", avant que l'herbe n'envahissent les dalles, et que les dalles ne deviennent pierres tombales.