Une étude montre que l'exposition à un chien pendant la petite enfance réduit les risques d'allergie par la suite.
Le mécanisme exact de l'effet protecteur de la présence d'un chien dans le foyer n'est pas encore connu. Il fournirait les bases de nouvelles stratégies de prévention des troubles atopiques durant l'enfance.
Il est bien établi que l'exposition à certains animaux de compagnie peut conduire, chez certains patients allergiques sensibilisés, notamment au chien ou au chat, à une exacerbation des symptômes de leur rhinite allergique ou de leur asthme.
A l'opposé, des études récentes ont montré que l'exposition à des animaux de compagnie au cours de la petite enfance pouvait réduire le risque d'atopie, bien que le mécanisme reste encore largement mal connu. On sait par exemple que l'exposition chronique aux chats peut induire une réponse de type Th 2 modifiée qui abaisse la synthèe d'Ig E et favorise celle d'Ig G4. L'exposition aux chiens est, elle, associée à une diminution du risque de sensibilisation allergique et de dermatite atopique au cours de la première année de vie.
Analyse d'échantillons de poussières
Une étude publiée dans la revue Clinical and experimental allergy en 2008 a cherché à étudier le mécanisme par lequel l'exposition aux chiens durant la petite enfance réduisait les risques allergiques par la suite, en réalisant le suivi pendant 3 ans de 275 enfants prédisposés aux allergies respiratoires.
Le but était de savoir si le moment auquel a lieu l'exposition aux chiens avait une incidence sur l'atopie et de vérifier l'hypothèse selon laquelle ce contact répété modifierait le développement du système immunitaire en permettant une exposition précoce à différents micro-organismes.
Les auteurs ont analysé des échantillons de poussières récoltés dans la chambre de ces enfants (au niveau du lit essentiellement : oreiller, matelas, couvertures …) afin d'y rechercher les allergènes canin et félin, ainsi que l'ergostérol, l'acide muramique et l'endotoxine, biomarqueurs respectifs d'une contamination de l'environnement par des champignons et des germes Gram + et Gram - .
Prélèvements sanguins annuels
En parallèle, des prélèvements sanguins ont été réalisés chaque année sur les enfants afin de mesurer les taux de différentes cytokines impliquées dans l'inflammation et l'allergie : IFN-y, IL-5, IL-10 et IL-13 mais aussi les taux d'Ig E spécifiques (acariens de la poussière, chat, chien, moisissures, œufs, noix, lait).
Dans cette étude, 35 % des enfants vivaient avec un chien dès leur naissance, et même si cette population a été relativement stable au cours des 3 ans, une faible proportion d'entre eux n'a pas gardé le chien durant les 3 ans. A l'inverse, un petit nombre d'enfants possédait un chien à l'âge de 3 ans mais ne l'avait pas dès la naissance (5%). Il est important de noter que dans cette population , le fait de posséder un chien était totalement indépendant de la présence ou non d'allergie et d'asthme chez les parents.
Posséder un chat n'influe pas
Il en résulte que l'exposition aux chiens dès la naissance a été associé à une diminution de la prévalence de dermatites atopiques au cours des trois premières années de vie et à une diminution du risque de sifflements respiratoires (wheezing) à l'âge de 3 ans.
A noter que la présence d'un chien dès la naissance n'influence pas le risque de sensibilisation au chien. L'exposition au cours de la troisième année vie a été associée à une diminution de la prévalence de la dermatite atopique à l'âge de 3 ans.
La possession d'un chat, que ce soit dès la naissance ou à l'âge de 3 ans, n'a pas influencé la prévalence de l'atopie, de la dermatite atopique ou du wheezing à l'age de 3 ans.
Préciser l'influence de l'âge
Afin de préciser l'influence de l'âge lors de l'acquisition du chien dans la prévalence de l'atopie, les enfants inclus dans l'étude ont été divisés en 4 groupes : ceux qui ont eu un chien dès la naissance et l'ont gardé pendant les 3 ans (28%), ceux qui l'ont eu à la naissance mais ne l'avaient plus à l'âge de 3 ans (8 %), ceux qui n'avaient pas de chien à la naissance mais en avaient un au cours de la 3ème année (5%) et ceux qui n'ont jamais été exposés aux chiens (60%).
La prévalence de la dermatite atopique au cours des 3 premières années était tout à fait comparable entre les deux premiers groupes (respectivement 11 et 14%)n ainsi qu'entre les deux derniers (23 et 27 %). Il en va de même pour le wheezing (20% et 15 % dans les deux premiers groupes; 42% et 35 % dans les deux derniers). En revanche, aucune influence notable sur le taux de sensibilisation allergique, ni sur les taux d'Ig E spécifiques ou totaux n'a été notée
Risque réduit de Wheezing
C'est donc bien l'exposition aux chiens et pas celle aux chats qui est associée à un schéma unique du développement du système immunitaire, permettant une réduction du risque de dermatite atopique et de wheezing. Il est intéressant de constater que si les répercussions immunologiques, sont plus importantes à l'âge d'un an, les répercussion cliniques sont notées à l'âge de 3 ans. Et ce phénomène est accentué si l'exposition aux chiens a eu lieu tôt au cours de la vie.
Il est important de noter également que cette étude a été menée sur une population d'enfants prédisposés, sélectionnés pour avoir au moins un parent souffrant d'allergie respiratoire et/ou d'asthme. Il n'est pas exclu que l'effet protecteur de l'exposition aux allergènes canins sur le développement immunitaire soit moindre dans une population non prédisposée.
Corrélations entre allergènes
En ce qui concerne le wheezing, la possession d'un chien n'a pas d'influence au cours de la première année. En effet, dans cette tranche d'âge, le wheezing est majoritairement dû à des infections virales et n'est donc pas un indicateur fiable d'atopie.
En revanche, la dermatite atopique infantile est très souvent un indicateur d'atopie et son incidence est diminuée chez les possesseurs de chiens, que ce soit à l'âge de 1 an ou de 3 ans. Il semble donc que le fait de posséder un chien permet de réduire le risque d'atopie mais n'ait malheureusement pas d'effet sur les maladies atopiques, comme les bronchiolites infectieuses.
L'analyse des échantillons de poussière a permis d'établir des corrélations entre certains allergènes mais aucune n'a pu permettre d'expliquer l'effet bénéfique de l'exposition aux chiens sur le système immunitaire. Il n'est pas impossible que d'autres facteurs microbiens, comme l'ADN bactérien, soient mis en cause.
Constatations paradoxales
L'analyse des réponses cytokiniques à l'âge d'un an a montré une augmentation conjointe des taux d'IL-5, IL-10 et IL-13 chez les enfants exposés dès la naissance mais ces observations n'ont plus lieu à l'âge de 3 ans.
Ces constatations paradoxales ne permettent pas d'établir un profil de réponses cytokiniques qui expliquerait l'effet protecteur de l'exposition aux allergènes canins.
En conclusion, l'exposition aux chiens pendant la période néonatale a une influence notable sur l'apparition de troubles atopiques, en réduisant significativement l'incidence des dermatites atopiques et du wheezing chez des individus prédisposés. Bien que les effets allergènes canins ne puissent s'expliquer par l'exposition microbienne qui en résulte, il semble que ce soit la stimulation du système immunitaire immature, à une étape clé de son développement, qui sous-tend les effets bénéfiques de la possession d'un chien. La compréhension du mécanisme exact de l'effet protecteur de la présence d'un chien dans le foyer fournirait les bases de nouvelles stratégies de prévention des troubles atopiques durant l'enfance.